Avec cette mini série de 5 episodes d'une heure que j'ai dévoré d'une traite, on atteint la quasi perfection formelle et visuelle. La reconstitution de cette époque pas si lointaine est impressionnante, on se croirait dans un documentaire avec des images tirées tout droit de ces années 1986-87. Visuellement c'est une plongée dans cette bonne vieille URSS, avec un grain d'image aussi austère que son politburo sans pitié.
Evidemment le sujet ne prête pas à la franche rigolade, donc on est complètement raccord avec cette ambiance dramatique et anxiogène. Une atmosphère pesante plane sur les images grises de la centrale, et poussiéreuses des couloirs du Kremlin.
Une austérité que l'on retrouve chez des acteurs en tous points excellents, concernés par le sujet et sans surjeu inutile. Jared Harris et Stellan Skarsgard sont sensationnels, Paul Ritter et Emily Watson idem, sans oublier tous les seconds roles vraiment très bons. Un casting sans grosses pointures qui est habité par son sujet.
Un sujet que tout le monde connait plus ou moins dans les grandes lignes, et j'ai beaucoup apprécié le côté technique rendu accessible au spectateur lambda par des explications certes un peu pointues, mais énoncées de manière très "pédagogique".
Même si réellement on ne saura peut être jamais le vrai pourquoi du comment, cet enchaînement de maladresses, mauvaises decisions, erreurs humaines, couplées à une mauvaise conception initiale, est bien relatée.
Les grandes étapes de la catastrophe, et les actions qui en ont découlé pendant les heures, les jours, les semaines et les mois suivants, sont bien exposées, plus ou moins détaillées, et c'est souvent glaçant quand on sait que ce n'est pas une fiction...
J'ai aimé cette réalisation sobre et minutieuse, cette narration brute, qui "rend hommage" à tous ces sacrifiés, toutes ces victimes qui ont eu pour seul tort d'être au mauvais endroit au mauvais moment, tous ces volontaires qui ont oeuvré pour améliorer la situation et contenir ce désastre. Pompiers, militaires, mineurs, liquidateurs, scientifiques, simples civils...
Que des éléments de fiction soit mêlés à la réalité ne me dérange pas, ils ne déforment pas ce qui s'est réellement passé, ils sont, à l'image de cette scientifique incarnée par Emily Watson, une "facilité" scénaristique pour apporter une certaine compréhension et symboliser tout le corps scientifique dans sa globalité.
Que les déficiences de l'appareil étatique et du KGB soient évoquées est logique, je ne vois pas pourquoi cela aurait dû être passé sous silence, c'est un fait qu'en ce temps là les hautes sphères tenaient le secret et l'opacité comme des nécessités pour toujours montrer aux yeux du monde, et de son peuple que L'URSS restait toute puissante. Et encore je trouve que les scénaristes n'alourdissent pas le propos.
Et ne soyons pas hypocrites, chaque Etat a ses secrets, et on ne sait pas comment cela aurait été géré chez nous ou ailleurs. Alors que les russes se soient vexés ou sentis offusqués, ma foi pourquoi pas, mais n'oublions pas que si on les écoute, le décompte de victimes directes est toujours bloqué à la trentaine, selon eux...
Cette série possède une très forte charge emotionnelle grâce à toutes ses qualités évoquées, un modèle de reconstitution historique pour une tragédie qui a marqué l'Histoire des hommes, et dont les conséquences perdureront des siècles si ce n'est plus.