Requiem pour un fou

Qu'est-ce que tu veux que je te dise ?
Que t'aurais pas dû y aller ? Qu'il fallait laisser le passé là où il est ?

Comme si ça allait changer quelque chose. Tu m'as déjà pas écouté au moment de partir, alors maintenant...
De toute façon je le sais très bien, tu m'écoutes jamais. Je suis pourtant ta conscience nom d'un chien. Enfin, ça doit être pour ça que tout le monde te traite d'inconscient.

Je suppose que je devrais sans doute m'être fait une raison depuis le temps, mais que veux-tu, c'est le job. C'est à moi de te guider dans tes choix, quoique t'en dises, quoique t'en penses. Si seulement t'en faisais pas qu'à ta tête.

Mais non. Il a fallu que tu sois un Space Cowboy, un chasseur de primes. Bon, je veux bien reconnaître que t'as tout ce qu'il faut. La force, la ruse, l'agileté, la classe. Et je te dis ça en toute objectivité.

Même dans tes failles t'es le type le plus charismatique du monde ! Ton seul problème, c'est la solitude, liée à ce passé que tu ne peux pas oublier. Si seulement t'avais pu laisser tomber Julia, Vicious et tout ce qui va avec !
Ce serait trop simple que tu sois équilibré. Non, évidemment t'es torturé, solitaire, mutique. Allume ta clope, mets tes mains dans les poches. Le Bebop t'attend.

Qui peut dire ce que tu penses ? Même moi j'en sais rien.
Pourquoi tu t'es entouré de Jet, Faye et Ed ? J'en sais rien.
Tout ce que je pense avoir compris, c'est que Jet il est un peu comme toi. Pas besoin de grands discours, tout passe par les actes. Ça doit être pour ça que tu le respectes. Ça doit être pour ça que c'est ton ami.

Il vous en est arrivé des broutilles pendant toutes ces années ensemble. T'aurais sans doute pas été le même sans lui. Finalement, je retire ce que j'ai dit, c'est pas un ami, c'est un frère. Pour une fois que tu fais un choix judicieux.
Parce que je vais pas revenir dessus, mais t'as quand même souvent fait n'importe quoi.

Remarque, moi, depuis un moment, je m'en fiche des choix que tu fais. Plus ça va, moins j'essaye de t'aider. De toute façon, avec tout ce que j'ai vu, j'ai pas de doute. T'es le plus grand, Spike. Tu m'écoutes tellement pas que je suis un spectateur de ta vie. Et j'admets que même si je suis souvent pas d'accord avec ce que tu fais, je l'admire jusque-là.

T'as peut-être juste merdé sur ce coup-là. T'aurais sans doute pas dû y aller dans cette tour, c'était évident qu'ils t'attendaient. Je t'avais prévenu. Mais comme d'habitude, t'en as fait qu'à ta tête. Et tu veux que je te dise ? Je t'en veux même pas.
C'était plus raisonnable de pas y aller. C'est pas ton genre, raisonnable.
T'es un guerrier, un fou. Un Space Cowboy.

Tu te demandes peut-être pourquoi je te déballe tout ça maintenant ? Tout simplement parce que moi, je sais que c'est trop tard. Toi aussi d'ailleurs je pense, je le vois bien ton petit sourire en coin. T'es pas con, Spike, t'as compris aussi. Cette session-là, t'en réchapperas pas. Fini le jazz, c'est un requiem.

Maintenant que tu gises ici, tu la connais aussi bien que moi la raison. Gravée quelque part au fond de ton coeur ou de ta mémoire, la source de tous tes problèmes.
Un mot, un seul.
Nostalgie.

Ça peut paraître absurde, mais pas pour moi. Pour une fois, je t'approuve complètement. C'est trop tôt, mais c'est trop beau. Ça a été un plaisir de faire un bout de chemin avec toi.

Bang

See you space cowboy.