Daria, la série comme le personnage, c'est l'outsider par excellence. La première fois que nos chemins se sont croisés, c'était par un heureux hasard alors que je tripotais la télécommande sans savoir où j'allais, en l'occurence MTV. Mon esprit de gamine de 10 ans s'était uniquement arrêté sur les images, sans trop comprendre, sans se douter qu'on serait amenées à se revoir, sans savoir encore que je réaliserai quelques années plus tard tout le génie de cette demoiselle ma foi délicieusement morne.
Majeure et vaccinée par la vie qui m'avait rendue terriblement cynique, une certaine nostalgie me renvoya au visage le souvenir d'une série télévisée incomprise jusqu'alors mais bel et bien digne de mon intérêt. Et c'est alors qu'au détour de quelques épisodes trouvés sur le meilleur ami de l'homme (j'ai nommé internet), je fais à nouveau connaissance avec des personnages qui n'étaient plus qu'un flou lointain. Et tout devient clair. Il y a en chacun d'entre eux, même les plus stéréotypés, un criant charisme. Plus fort encore, le potentiel comique de ces personnages, qu'il soit subtil ou tapageur, s'avère très élevé. Je n'aurais jamais pensé que l'apathique Tiffany puisse autant me faire rire, lorsqu'elle répond au professeur (lui ventant les mérites d'un livre parlant d'une jeune fille en fleur dans l'ostensible but de la draguer) un magnifique "C'est un manuel de jardinage ?" de sa voix de quasi-mourante, que l'artsy Jane nous délivrant son splendide "Si des extra-terrestres étaient assez intelligents pour venir ici, ils ne seraient pas assez bêtes pour venir ici."
C'est encore sans compter sur la critique de la société américaine décrite dans la série : efficace, parlante et sans pitié. Au delà, en passant outre les cheerleaders exagérément écervelées et le système purement amerloque, il y a une forte critique de la nature humaine, du comportement social et de la société je dirais mondiale, dans le sens où chacun peut regarder par le petit bout de sa lorgnette et trouver tout de même dans Daria des sujets qui lui parlent. Jeunes intellectuels, esprits critiques et/ou analystes dans l'âme trouveront leur bonheur avec cette série, tout comme les amoureux de l'underground (bien que le succès évident de la série l'ait rendue connue, le contenu reste unique) ou toute personne ayant soif de série animée différente, de sujets de société sans prise de tête incluse, de rire sans abrutissement.
La messagère de cette conscience, porteuse d'un amour des mots et de l'intellect qui selon moi peut difficilement déplaire, n'est pas sans doutes et sans failles. Certains pourront voir dans ses analyses de la vie des éléments erronés ou pas assez poussés : Nul n'a la science infuse, et en matière de vie il y a souvent autant de vérités que d'êtres humains. Le personnage éponyme nous ouvre les portes de sa vérité et sait piquer au vif notre intérêt, voire même notre sympathie. Il semblerait effectivement que l'adolescente possède aux yeux du public un capital sympathie ironiquement proportionnel à l'antipathie que lui inspire le monde qui l'entoure. Oui, Daria est terriblement attachante. On voudrait lire ses textes et débattre avec elle pendant des heures. On voudrait être son ami. Mais il faut se rendre à l'évidence : Daria Morgendorffer avec une foule de potes, ça ne serait plus Daria.
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