Espace et trou noir
Après avoir injustement annulé Stargate Universe et enterré toute la franchise, SyFy réalise qu’elle n’a plus de série de space opera et décide d’y remédier. En résulte plusieurs projets de tout...
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le 31 janv. 2016
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Après avoir injustement annulé Stargate Universe et enterré toute la franchise, SyFy réalise qu’elle n’a plus de série de space opera et décide d’y remédier. En résulte plusieurs projets de tout genre (killjoys, expanse), dont Dark Matter, qui raconte l’histoire d’un équipage dans un vaisseau spatial, qui a perdu la mémoire et tente de retrouver leur identité. Ils évoluent dans un univers où règnent les puissantes corporations, qui font tout pour mettre la main sur des gisements précieux, devant une Autorité Galactique apparemment impuissante. A priori rien de bien nouveau, et la série fait indéniablement penser à d’autres du même style, rappelant les grandes heures de Stargate, mais aussi Firefly, et difficile de ne pas y voir un point de ressemblance avec Continuum pour son futur marquée par la dictature de corporations puissantes et amorales, impression renforcée par la présence d’un même acteur au casting (Roger Cross, n°6). Pour Stargate, cela n’a toutefois rien d’étonnant puisque l’on y retrouve les mêmes producteurs (Joseph Malozz et Paul Mullie). Le design du vaisseau est d’ailleurs assez proche de la dernière déclinaison de la franchise. Puis difficile pour une série ayant pour base un vaisseau et son équipage de ne pas ressembler à d’autres séries ayant un vaisseau et un équipage...
La perte de mémoire est un ressort souvent employé, et pas seulement en science-fiction, pour son potentiel en termes de mystères et de révélation. Et c’est ce qui fait le potentiel de la série : les membres découvrent petit à petit, par bribes, qui ils étaient et leurs motivations, pour se rendre vite compte que tout n’est pas aussi simple qu’il n’y paraît.
En effet, même si dans leur vie oubliée ils constituaient un équipage, tous n’étaient pas là pour les mêmes raisons. Certains avaient réellement commis des actes criminelles, d’autres accusés à tort, mais qui pour survivre ou se venger n’en sont pas moins devenus dangereux. Certains ne sont pas qui ils prétendent, tandis que d’autres cachent des secrets dont ils ont tout intérêt à ne pas voir dévoiler.
Cette ignorance et ces incertitudes rendent très difficile l’instauration d’une confiance, alors qu’ils se retrouvent tous dans la même situation et ne peuvent compter que les uns sur les autres. Comment en effet se reposer sur des personnes que l’on ne connait pas, des personnes potentiellement dangereuses qui plus est ? La révélation que la perte de mémoire n’était pas un accident mais un acte volontaire à priori par un membre de l’équipage renforce cette paranoïa.
La confiance apparaît pourtant indispensable, alors qu’ils sont seuls dans un monde dangereux dont ils ne connaissent plus rien, avec des tas d’ennemis qui souhaitent leurs morts. Savoir à quels alliés se fier est une autre incertitude qu’ils vont devoir gérer.
La révélation de leur passé criminel dans le premier épisode n’est pas sans créer plein de questionnements. Est-ce l’occasion d’un nouveau départ ? Ou ce que j’étais avant va finir par ressurgir ? Y-a-t-il encore un sens à continuer les combats d’avant, pour des causes ou des personnes dont on ne se souvient plus ? Tout le monde n’est pas prêt à remettre les compteurs à zéro, et tout le monde n’est pas prêt non plus à le faire sur le passé des autres.
Si de prime abord les personnages pouvaient paraître assez lisses et stéréotypés, entre le bourrin détestable, le guerrier muet, ou la petite ingénieuse bizarre, la suite les rend plus ambigu et les plus dangereux ne sont pas forcément ceux que l’on pourrait croire. La trahison, ancienne ou à venir, peut venir de n’importe qui. Le bourrin détestable par exemple, s’il semblait pouvoir les trahir à la première occasion, semble être plus attaché qu’il n’y parait et ses fâcheuses habitudes révéler plus une grande gueule qu’un mercenaire sans foi ni loi. La leadeuse autoproclamée semble prendre à cœur l’intérêt de l’équipage, quitte à leur mentir ou les manipuler. N°1 semble être celui doté d’une morale, mais serait-il prêt à trahir pour ces principes ? Et derrière son mutisme et sa maîtrise de soi, que cache l’homme aux sabres, est-il du genre à se soucier d’autrui ou ne suit-il que ses propres intérêts ?
Autant de questions auxquels s’ajoutent des éléments du vaisseau à la fonction encore inconnue. Un pendentif, une porte fermée, un cadavre non identifié, ou d’étranges rêves qui semblent être les souvenirs des autres…
A propos des mystères c’est un point positif de la série, ils ne trainent pas en longueur. Ainsi la révélation du rôle de l’équipage ait donnée dès le premier épisode, laissant à chacun la tâche de digérer la nouvelle et de chercher plus tard son rôle exact et ses motivations. Quand des personnes gardent un secret, il finit par être rapidement révélé, sans servir de remplissage où l’on s’attarde sur les efforts de la personne concernée pour le cacher. L’histoire avance ainsi à chaque épisode.
La continuité est donc marquée, et permet de suivre l’évolution des relations de l’équipage, la délicate instauration de la confiance, les réactions de chacun avec son passé, les quêtes personnelles se confrontant souvent à l’intérêt commun.
Le monde extérieur se révèle petit à petit. Si la série se concentre sur le vaisseau, on en apprend un peu plus sur les forces en présence, l’Autorité Galactique, des rebelles terroristes, les corporations, leurs exactions et les rivalités entre elles, mais aussi des empire comme celui des Ishida, peuple d’origine asiatique ayant gardé des traditions de combat à l’épée au milieu de technologies avancées. Ce n’est encore que quelques bribes, mais nul doute que ce monde devrait encore se développer dans l’avenir.
Le budget paraît assez limité, et si se concentrer sur le vaisseau a l’avantage de réduire les coûts et de le concentrer sur les décors extérieurs, comme les stations spatiales, cela reste relativement faible néanmoins, les planètes ne paraissent pas bien exotiques, et l’aspect carton-pâte du vaisseau se devine un peu. Mais le budget d’une série, nouvelle qui plus est, n’est pas celui d’un film, et il serait sans doute déraisonnable d’en demander d’avantage.
« Dark Matter » parvient à créer une atmosphère de mystère et de méfiance. Et ce n’est pas grand chose, mais des tableaux de paysages extraterrestres dans les salles constituent des petits détails sympathiques. La série exploite plusieurs idées de science fiction, des clones commandés mentalement à distance, des androïdes très humanisés, des organismes artificiellement améliorés, des armes de destruction planétaire, de quoi apporter un minimum de satisfaction aux amateurs de science-fiction.
Sans innover le genre, « dark matter » reste donc de très bonne facture avec une écriture bien cohérente, des mystères et des révélations maîtrisées, et des personnages que l’on finit par apprécier au fur et à mesure qu’ils se dévoilent. Sous ces apparences de space opera classique, la série laisse deviner un potentiel intéressant.
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le 31 janv. 2016
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