Dead Like Me, diffusée sur Showtime en 2003, c’est un peu comme si on avait pris une adolescente blasée, l’avait tuée d’une manière aussi absurde qu’un accident avec une lunette de toilettes tombée de l’espace, et l’avait ensuite recrutée pour un job encore plus monotone que de vendre des aspirateurs : faucheuse d'âmes. Imaginez une vie après la mort où vous ne flottez pas dans le bonheur éternel, mais où vous pointez chaque matin pour récupérer des âmes qui doivent quitter ce monde. Glamour, non ?
Georgia "George" Lass (jouée par Ellen Muth) est l’héroïne de cette histoire, une ado cynique et anti-conformiste, qui déjà vivante ne voyait pas l’intérêt de la vie. Alors, bien sûr, après sa mort, elle ne voit pas trop l'intérêt de devenir une faucheuse non plus. Mais on ne lui a pas vraiment laissé le choix. Plutôt que d’aller directement dans l’au-delà, elle est coincée sur Terre pour travailler sous la houlette de Rube (Mandy Patinkin), le boss des faucheurs, un type bourru mais sympathique qui distribue des petites post-it à son équipe avec les détails des âmes à récolter.
Chaque jour, George et ses collègues un peu déglingués – Roxy, la faucheuse policière badass, Mason, l’ex-junkie totalement irresponsable, et Daisy, une ancienne starlette narcissique – doivent accomplir leur sale boulot avec une touche de noirceur, beaucoup d’ironie, et une pincée d’humanité. Parce que oui, même mort, on se rend compte que l’on n’a pas tout réglé avec la vie, et que les faucheurs d’âmes doivent souvent se coltiner les états d’âme de leurs "clients" juste avant qu’ils ne passent l’arme à gauche.
Le concept de Dead Like Me est aussi absurde qu’original, mais c’est précisément ce qui en fait son charme. La série nous plonge dans un monde où la mort n’est pas une fin, mais juste un boulot de plus, avec des horaires, des collègues parfois insupportables, et des petites mesquineries quotidiennes. Les morts ne sont pas forcément sublimes ou spectaculaires, elles sont souvent ridicules ou inattendues, comme une grand-mère étouffée par un morceau de poulet ou un type tombé dans un jacuzzi. Cela donne à la série un ton décalé, où la gravité de la mort est constamment désamorcée par l'humour noir et le cynisme des personnages.
George, en tant que personnage principal, est un concentré de sarcasme. Elle passe la majorité du temps à râler sur son existence de faucheuse, à chercher des moyens d’échapper à ses responsabilités (qui a envie de ramasser des âmes toute la journée ?) et à observer, avec un mélange d’indifférence et de frustration, sa famille, qui tente de faire son deuil. George est une ado dans un monde d’adultes où personne ne sait vraiment ce qu’il fait, et cette dynamique crée un décalage constant entre son comportement désinvolte et les véritables enjeux de son nouveau "travail".
Mais là où Dead Like Me brille vraiment, c’est dans sa capacité à mélanger comédie noire et réflexion sur la vie et la mort. Derrière chaque moment de sarcasme, chaque mort absurde, il y a une question plus profonde : comment faisons-nous face à notre propre mortalité ? Comment acceptons-nous de passer à autre chose ? Les faucheurs eux-mêmes, bien qu'ils soient morts, ont encore des comptes à régler avec la vie, et cette humanité persistante, même dans la mort, donne à la série une profondeur inattendue.
Les relations entre les personnages, en particulier celle entre George et Rube, sont au cœur de la série. Rube, en mentor bourru, agit souvent comme une figure paternelle, tentant d’apprendre à George ce qu’elle n’a pas compris de son vivant : la responsabilité, l’empathie, et peut-être même, un certain sens du devoir. Le reste de la bande, avec leurs propres névroses et histoires passées, apporte une dynamique de groupe dysfonctionnelle mais attachante. Leur quotidien, entre une tâche macabre et une pause-café, devient un théâtre d'absurdités existentielles, avec des moments de pure comédie noire.
Visuellement, la série se déroule dans un Seattle morose et un peu gris, qui reflète parfaitement l’état d’esprit de George. La mort y est omniprésente, mais elle est rarement traitée de manière dramatique. Au contraire, chaque disparition est l’occasion de montrer à quel point la vie est fragile, ridicule et, au final, pas si différente de la mort. Les effets spéciaux sont minimalistes, mais suffisants pour montrer les transitions subtiles entre les vivants et les morts.
Cependant, Dead Like Me n’est pas sans défauts. La série souffre parfois de longueurs et de répétitions, surtout dans sa manière de traiter les différentes morts d’épisode en épisode. Le format "une âme à récolter par jour" peut sembler un peu répétitif, même si chaque mort est une occasion de gag. Par ailleurs, la famille de George, qui tente de survivre sans elle, est parfois trop en décalage avec le ton général de la série, et leurs scènes peuvent paraître plus pesantes et moins intéressantes que celles des faucheurs.
En résumé, Dead Like Me est une série qui réussit à transformer la mort en un sujet aussi léger que profond, avec un humour noir omniprésent et des personnages attachants malgré leur cynisme. C’est une comédie macabre, une réflexion ironique sur la vie et la mort, où même les faucheurs d’âmes sont coincés dans les petits tracas du quotidien. Si vous aimez l’humour acide, les situations absurdes, et que vous vous demandez ce qu’il se passe vraiment après la mort (spoiler : beaucoup de paperasse), alors Dead Like Me vous offrira une perspective rafraîchissante... et légèrement morbide.