Créé dans les années 60 par Sydney Newman et Donald Wilson, "Doctor Who" a, au fil du temps, généré un véritable engouement de la part des fans qui suivirent pendant 30 ans les aventures spatio-temporelles de cet extraterrestre malicieux qui, dès qu'il s'éteint, se régénère avec un nouveau visage. Au cours des 26 saisons de la série originelle, huit acteurs ont prêté leurs traits pour incarner le célèbre aventurier. Et après 16 ans d'absence, le Doctor est revenu en 2005 à travers une nouvelle série faisant guise de suite dans le fond mais de reboot dans la forme. Reprise par Russell T Davies ("Queer as Folk"), la série culte repart sur de nouvelles bases avec un nouveau Docteur et une nouvelle alliée pour de nouveaux voyages à travers le temps et l'espace...
Ce revival est donc une cure de jouvence où de nouveaux éléments vont être mis à sa disposition, aussi bien dans le scénario que dans l'aspect visuel avec la banalisation d'Internet et des outils informatiques et les effets visuels de plus en plus réussis (comprenant naturellement les images de synthèse), donnant donc naissance à de nouvelles espèces extraterrestres toujours plus loufoques.
Pour les néophytes, ce revival est ainsi parfait car il conserve l'humour et le style de la série originelle toute en la modernisant à bon escient. Dans la peau du Docteur, le discret Christopher Eccleston s'avère brillant, fugace et très attachant, ne se privant pas d'une certaine autodérision quant à son physique tout en exposant son sourire d'illuminé à tout va et dans n'importe quelle situation. Sa partenaire, interprétée par la jolie Billie Piper, oscille efficacement entre la nunuche blonde maladroite et la femme forte téméraire, créant un lien progressif et puissant entre les deux personnages, ce qui apporte de l'émotion à certains épisodes terriblement surprenants.
Au final, cette première saison accumule 13 épisodes lorgnant entre les âges et les dimensions, certains étant même liés en un double-épisode mais tous sont guidés par un même fil conducteur qui sera dévoilé en fin de saison. Les nouveaux venus seront subjugués par le dynamisme de la série tandis que les aficionados de la précédente série seront comblés de redécouvrir leur univers favoris composé de cet étrange Docteur sans nom, de son vaisseau spatial en forme de cabine téléphonique et son tournevis sonique, affrontant de nombreuses créatures et notamment les monstrueux Daleks, ses pires ennemis robotiques.
Une saison seulement après son revival réussi, voilà que ressurgit le concept unique de la série : une fois mort, le Docteur change de peau et est interprété par un nouvel acteur. Exit donc Christopher Eccleston, place au déjanté David Tennant qui succède avec brio au précédent. Toujours accompagné de Rose Tyler (Billie Piper) et occasionnellement de Jackie et Mickey, le Docteur continue ses virées intergalactiques à travers le temps et l'espace en faisant des rencontres toujours plus extraordinaires...
Tennant incarne avec malice le héros-titre, donnant un sacré coup de fouet au personnage en mélangeant non seulement la personnalité préexistante du Docteur mais en y rajoutant sa touche burlesque, parfois colérique mais sans cesse touchante tandis que ses relations avec Rose joue également entre retrouvailles et nouvelle rencontre. Et si le concept de la série se voit ici clairement transcendé, on pourra en revanche regretter des épisodes beaucoup moins palpitants que la précédente saison... La mise en scène s'éloigne peu à peu du format télé à travers quelques bonnes trouvailles renforçant la qualité visuelle mais c'est surtout dans le choix des scénarios que l'on va non pas s'ennuyer mais tout de même regretter les folles péripéties du Neuvième Docteur.
Sur 14 épisodes (l'épisode de Noël compris), seuls 5 ou 6 sont vraiment exaltants tandis que certains s'avèrent très classiques. Certains permettent d'en savoir plus sur le Docteur mais ces détails n'y sont que parsemés à travers une réplique ou une allusion. Dommage. Faire mieux que la première et excellente saison était difficile mais cette suite reste dans l'ensemble agréable, notamment grâce à l'attitude pétillante de David Tennant et la nouvelle mise en forme de ses relations avec Rose, mais les voyages sont tout simplement moins originaux, beaucoup trop centrés sur la Terre alors que la précédente alternait efficacement entre futurs inédits et présents déjantés.
- SAISON 3 (ALLONS-Y ALONSO !)
Après une deuxième saison chamboulant pas mal l'univers de la série avec l'arrivée du Dixième Docteur interprété par David Tennant, voici une troisième saison encore plus déstabilisante. En effet, si vous vous êtes habitués au nouveau visage du Docteur, il va falloir vous maintenant vous accommoder à celui de sa nouvelle partenaire, la jolie blonde Rose Tyler laissant sa place à l'afro-britannique Martha Jones, apprenti-médecin qui va elle aussi suivre l'aventurier spatio-temporel dans ses aventures. La série commence donc avec un choc mais réussit très rapidement à nous introduire ce nouveau personnage et à l'associer au Docteur toujours aussi excentrique...
La personnalité de notre héros retravaillée par Tennant en fait un Docteur énergique, sans cesse virevoltant, adoptant désormais sa célèbre réplique « Allons-y ! » pour des péripéties envolées. La précédente saison souffrait malheureusement de scénarios pas vraiment réussis qui, à défaut d'être ennuyeux, n'étaient pas vraiment mémorables. Ici, c'est tout l'inverse ! Commençant sur les chapeaux de roues pour ne jamais faiblir, le rythme général de la saison et ses 13 épisodes détonants se rapprochent de l'excellente première saison et la détrônent peu à peu. De nouvelles contrées encore plus inédites, de nouvelles créatures et une trame de fond absolument renversante font de cette troisième aventure une réussite totale.
La relation entre la passionnée Martha et le Docteur, alors bouleversé par sa séparation d'avec Rose et très distant avec sa nouvelle partenaire, est à la fois ambiguë et touchante, apportant suffisamment de profondeur aux personnages pour étayer une fois encore la personnalité de notre héros solitaire. De plus, les révélations vont bon train, notamment lors d'un épisode final découpé en trois parties se classant immédiatement parmi les meilleurs que l'on a pu voir à ce jour. L'une des meilleures saisons de la série si ce n'est la meilleure.
On avait quitté le Docteur une fois encore seul, on le retrouve donc avec une nouvelle partenaire en la personne de Donna Noble, qu'il avait déjà rencontré dans l'épisode de Noël "Le Mariage de Noël" au début de la saison 3. Alors agaçante au possible et pas vraiment sexy, Donna s'avère pourtant être une équipière solide qui s'inscrit à sa manière dans la lignée des sidekicks féminins du Docteur et les aventures qu'ils vont vivre sont incroyablement excitantes, à la fois variées et évolutives...
Les scénarios de Russell T Davies et ses comparses nous entraînent dans des lieux moins exotiques pour des aventures nettement plus sombres. Egalement plus violente dans son atmosphère, cette quatrième saison n'épargne pas le spectateur avec des épisodes originaux vraiment déconcertants. On tient parfois du génie scénaristique tant les idées avancées sont incroyablement bien menées. Mais là où cette saison 4 frappe fort, c'est dans ses révélations et surtout son mash-up des précédentes saisons où vont se croiser nos héros actuels et d'autres que l'on croyait effacés comme Martha Jones et Jack Harkness mais aussi Rose, de retour pour pimenter une trame déjà bien virevoltante.
L'histoire part ainsi dans une guerre sans merci où tous les éléments des quatre saisons se rejoignent avec logique pour un final apocalyptique surprenant et passionnant, concluant un gigantesque arc narratif dont on n'en voyait pas le bout et surtout l'issue, nos héros étant dans une sacrée galère à la fin de cette exaltante saison qui marque au fer rouge la série toute entière. À noter qu'il faut impérativement voir les quatre épisodes spéciaux qui suivirent avant d'entamer la cinquième saison.
Cette cinquième saison fait quasi-radicalement peau neuve : nouveaux acteurs, nouveau logo, nouveau générique mais aussi nouveau producteur délégué, le brillant Russell T. Davies laissant la série aux mains de son comparse Steven Moffat qui va désormais gérer l'ensemble de la série... Mais ce qu'on redoutait est bel et bien là : cette saison 5 est une petite déception. En dépit d'un vent de nouveauté bienvenu, aussi bien visuellement que dans son scénario, Matt Smith a du mal à nous faire oublier David Tennant : singeant son prédécesseur tout en essayant de trouver son propre caractère, l'acteur britannique ne convainc pas totalement. Il reste toutefois assez agréable, notamment lorsqu'il pousse l'excentricité à son paroxysme.
Sa nouvelle compagne, Amy Pond, interprétée par la truculente Karen Gillan, a elle aussi du mal à remplacer ses prédécesseuses bien qu'elle soit néanmoins très dynamique et devient au fil des épisodes une Who Girl en bonne et due forme. Ensuite, à l'instar de la saison 2, les scénarios proposés s'avèrent très pauvres et ne nous procureront pas beaucoup d'émotions. Malgré une toile de fond intrigante, les histoires n'arrivent pas à la cheville de celles imaginées par Russell T Davies et ses collègues ou sont alors mal amenées. Le constat est le dernier : les bonnes idées fusent mais sont terriblement mal mises en scène et aucun épisode ne viendra nous tirer la larme à l'œil, ne viendra nous glacer le sang ni même nous faire rire.
Reste heureusement l'épisode final, comme d'habitude présenté en deux parties, qui nous retourne le cerveau comme il se doit. Ainsi, plus porté sur des tensions sexuelles inédites et surtout un triangle amoureux ambigu entre le Docteur, sa partenaire et le copain un peu débile de celle-ci, cette cinquième saison n'arrive jamais à transcender les saisons précédentes et à nous faire oublier le génie des deux dernières, riches en séquences inoubliables et aux scénarios passionnants.
La précédente saison mettant pour la première fois en scène le Onzième Docteur campé par Matt Smith n'était malheureusement pas très concluante. On attendait donc beaucoup de cette sixième saison, toujours dirigée d'une main de fer par Steven Moffat. Et heureusement pour nous, le résultat est enfin satisfaisant, Moffat et ses scénaristes ayant trouvé la même niaque que Russell T Davies, précédent showrunner de la série.
Avant tout, Matt Smith tient enfin la barre dans la peau du Docteur. Plus sûr de lui, moins bipolaire et désormais amusant, il arrive à s'éloigner de son prédécesseur en campant le héros-titre de manière globalement plus sérieuse. Cela est ici du à la trame principale de cette sixième saison et son thème lourd : la mort. En effet, dès le premier épisode, le Docteur meurt ou plutôt va mourir. Un thème qui va suivre de près la saison à travers de nouveaux épisodes plus sombres où il y aura finalement peu d'humour en dépit de quelques gags et autres répliques cinglantes du toujours aussi survolté Seigneur du Temps.
De plus, cette saison va aller encore plus loin dans les énigmes spatio-temporelles, nous retournant le cerveau dès les premiers épisodes et ce jusqu'à un final étourdissant dont on ne se remettra pas. Autre point à noter, cette sixième saison n'a que très peu d'épisodes dits "à part" et beaucoup sont très étroitement liés, la plupart étant même des suites logiques. Jamais on a autant été happé par l'intrigue, aussi complexe et démesurée soit elle. Dommage donc de découvrir, surtout en fin de saison, des épisodes classiques qui nous couperont dans notre élan pour n'être que des resucées d'aventures antérieures. Mais que l'on se rassure, cette sixième saison reste d'une intensité dramatique impressionnante, marquant au fer rouge la série.
- SAISON 7 (UNIMPORTANT...)
Décidément, on pourrait croire que la qualité des saisons de "Doctor Who" est en dents de scie. Après une cinquième décevante et une sixième plus complexe et exaltante, revoici une saison inégale qui risque de faire bouder les fans de la série. Et pour la troisième et dernière fois avec Matt Smith, nous suivrons d'un côté les dernières aventures du couple Pond aux côtés du Docteur et de l'autre leur remplaçante, la nouvelle et fringante Clara Oswald, interprétée par Jenna-Louise Coleman, déjà vue dans le premier épisode de la saison. Une nouvelle équipière de choc qui va succéder à Amy et Rory, devenus un peu trop inutiles...
La première partie reste très insatisfaisante, avec cinq péripéties classiques et peu surprenantes qui, après la continuité presque infaillible de la précédente saison, font pâle figure. Quant à la seconde partie, elle conserve le même schéma narratif, soit une succession d'épisodes détachés dont le seul élément commun est la présence de Clara, la nouvelle Who Girl qui va donner du fil à retordre au Docteur. Son existence étant petit à petit source de mystères, elle sera au cœur de l'intrigue de fond sans pour autant être mise au premier plan.
Cette ultime saison avec Matt Smith reste une fois encore décevante : les péripéties sont très inégales et, malgré les habituelles références aux précédents épisodes de la série, on ne passe pas réellement un bon moment. Pourtant, la présence de Carla et son dynamisme nous font oublier le couple Pond en un rien de temps mais cela ne suffit pas : les scénarios sont pauvres, parfois incohérents, très mal montés et sans réel panache. On sent que Steven Moffat tend à complexifier ses intrigues pour pallier à un manque évident d'idées soit neuves soit simples qui par conséquent perdent en efficacité. On ne va pas se voiler la face, au bout de trois saisons avec Smith, il est temps de changer de Docteur...
À venir...