Je dois avouer que les thèmes du voyage dans le temps et de l'effet papillon ont toujours été des sujets qui me passionnent en tant que geek. Ils donnent souvent lieu à des récits plus fous les uns que les autres et permettent des possibilités aussi innombrables qu'un vaste univers de Science Fiction. Mais à défaut d'être associé à ce genre, ces histoires restent le plus souvent ancrées dans la réalité.
Et soudain arrive cette adaptation d'un manga de grand renom que je découvre avec beaucoup de curiosité. Beaucoup de curiosité car le thème de l'effet papillon est ici abordé sous un point de vue inédit: un thriller avec un point de vue juvénile.
Et c'est là qu'Erased tire un parti pris des plus audacieux, le protagoniste Satoru ne se limite pas à rectifier une ou plusieurs actions, il se permet carrément de tout réécrire depuis son enfance.
Cherchant désespérément à arrêter le futur assassin de sa mère, il doit remonter à la source des assassinats, d'abord perpétrés sur des enfants de son entourage, une quinzaine d'années auparavant.
Alors qu'en est-il ? Chef d'oeuvre ou pétard mouillé ?
Réponse A mon cher Jean Pierre (et quasi sans spoiler s'il vous plaît !).
Erased nous plonge dans un retour en enfance absolument stupéfiant de par la qualité de sa narration et le réalisme avec lequel les gamins sont traités. Ici, pas de têtes blondes adorables et sans reproches et pas de loli psychopathes non plus. Juste un portrait de l'imagination et des peurs des enfants d'une incroyable justesse.
Le protagoniste est l'un des plus intéressants de ces dernières années, de par son aspect adulte dans un corps d'enfant, le rapprochement avec Détective Conan est presque inratable. Mais il arrive quand même à se détacher de ce modèle en évoluant dans un univers beaucoup plus sombre et en étant en proie à beaucoup de démons intérieurs tel que le manque de confiance et les remords qui pèsent sur ses épaules.
L'ambiance baigne littéralement dans un délicieux melting pot au niveau des émotions qu'elle transmet. Le premier épisode installe le cadre d'une manière radicale et l'évolution scénaristique est toujours d'une grande cohérence. Et même si les principaux intéressés ne sont même pas encore des collégiens, pas question de nous épargner la violence à laquelle ils sont parfois victimes pour autant.
Cette détresse est incarnée par le personnage de Kayo, victime des violences d'une mère célibataire totalement déséquilibrée, ainsi que des brimades des autres enfants de sa classe. Etant la première cible de la série d'assassinat dont la mère de Satoru sera également victime, ce dernier compte à tout prix la sauver de son funeste sort afin d'inverser le cours des choses.
Les échanges entre ces deux personnages sont d'une grande beauté, même si empreint de beaucoup de tristesse de par le caractère désenchanté de la petite fille qui, cachée derrière sa carapace, ne veut en fait qu'un peu d'affection. Je pense notamment à leur randonnée de l'épisode 3, véritable joyau pour les mirettes (encore une fois A-1 Pictures ne se fout pas de nous).
Cette gamine en sera même arrivée à me faire pleurer durant la scène du petit déjeuner chez son camarade.
Les autres camarades de Satoru ne sont pas en reste et offrent une magnifique leçon d'amitié et de courage dans les rapports qu'ils entretiennent avec le héros.
L'autre personnage marquant de cet anime est sans conteste la mère du protagoniste. (ben oui les mecs, si elle meurt dans le premier épisode qui se passe dans le présent et qu'on retourne ensuite dans le passé, elle est bien vivante). Véritable figure forte portant haut les couleurs de l'indépendance féminine, elle fait office d'une magnifique mère courage qui n'hésite jamais une seule seconde à prendre d'énormes risques pour aider son fils.
L'autre parti pris hyper couillu de l'oeuvre réside dans la révélation de l'identité de l'assassin. L'histoire ne cherche presque même pas à dissimuler qui il est, les indices sont parfois gros comme des maisons mais tout est parfaitement volontaire car la question de l'oeuvre ne réside pas dans "Qui est le tueur" mais bel et bien dans "A quel point la confiance peut aveugler notre jugement."
Encore une fois, brillante manière de se démarquer dans l'océan des Seinen.
La relation teintée de haine et d'admiration qu'entretiennent d'ailleurs les deux "ennemis" est absolument fascinante car elle soulève une problématique des plus pointues: quand on évolue dans une constante adversité et que cette dernière vient tout à coup à disparaître, peut-on continuer à avoir un but sans elle ?
Bref, tout est mené tambour battant jusqu'à la conclusion, tout aussi irréprochable que le reste de l'histoire.
Quid de cet Erased au final ? Très simple. Une animation très propre qui réserve parfois de véritables moments de grâce, une ambiance terriblement mature dans un univers juvénile où la violence côtoie la poésie, des personnages à l'écriture magistrale et hyper attachants, quelques notes d'humour très bien amenées, un récit absolument irréprochable et un suspense parfois insoutenable tant le déroulement de l'histoire est passionnant (attendez vous à de gros cliffhangers putassiers à la fin d'un bon nombre d'épisodes). Egalement un des plus beaux portraits de l'enfance que l'on ait pu voir et qui sait parfaitement nager entre deux eaux, montrant aussi bien leur naïveté et leur connaissance de la violence du monde qui les entoure ainsi que leur aspect responsable malgré leurs caractères fantaisistes.
Ma seule réserve au final ne concerne que l'opening que je trouve plutôt curieux au niveau du ton, complètement décalé avec celui de l'anime. Mais c'est vraiment parce que c'est le seul aspect qui m'a dérangé et il est rattrapé par un magnifique ending.
Êtes vous prêts à retourner en enfance ? Vous devriez, Erased est un voyage dans le temps qui est bel et bien l'incontournable de 2016.