Spoilers
2018 n'a pas révélé de grandes séries comme certaines années peuvent le faire, il y'a cependant eu de la qualité, je pense notamment à Succession, Homecoming, Waco, Trust ou encore à quelques innovantes, The Haunting of Hill House, Sharp Objects, Maniac, Kidding et j'en passe.
Malgré tous ces beaux titres et plus encore, à mes yeux du moins, il n'y a pas eu une série majeur, celle qui explose, comme ont pu par le passé le faire, True Detective, Big Little Lies, Fargo, The Handmaid’s Tale et bien évidement une certaine Twin Peaks.
Pourtant, j'ai dit aucune, je voulais plutôt dire "aucune autre", car 2018, si elle est arrivée tard dans l'année, fin novembre, fut placée sous le signe de la prison, avec la brillante Escape at Dannemora.
On a tous déjà connu cette sensation, sensation que quelque chose passe trop vite, car on est à fond dans cette chose, on prend son pied. Là ici on parle de cinéma, plus précisément de télévision, même si la série dont nous parlons est purement cinématographique.
Chaque épisode, peut être certains plus que d'autres, sont passés comme une balle, pourtant ils durent tous près de 50 minutes. Si ces 50 minutes paraissent éternelles quand je regarde d'autres œuvres, même des bonnes, ici, c'est passé beaucoup trop vite.
Escape at Dannemora, titre aussi explicite que classique, appelant presque aux films des années 50/60 et leurs titres qui le sont parfois tout autant. Nous place en 2015, sur une durée de quelques mois, chaque épisode en représentant un. Au Nord de l'Etat de New York, dans une ambiance glaciale et manipulatrice.
Cette histoire vraie, celle de ce triangle amoureux et de cette évasion aussi simpliste que surprenante, nous est conté ici par une personnalité archi connue dans son pays comme dans le nôtre, puisqu'il s'agit du comédien/réalisateur Ben Stiller.
Quand on pense Stiller, on pense Mary à tout prix, Zoolander, La Nuit au musée et j'en passe, moi je pense surtout à Tonnerre sous les tropiques, un chef d'oeuvre de comédie. On oublie ainsi peut être trop sa première réalisation, Génération 90, bon faut dire qu'elle est oubliable. Cependant sa version de La Vie rêvée de Walter Mitty, elle, vaut le détour.
Malgré tout cela, associer drame épuré, univers carcéral, manipulation et autres à cet homme, ce n'est pas ce qu'on fait en premier en se levant le matin.
Tout ne repose pas sur lui, loin de là, il produit le show et le réalise admirablement, mais les scénaristes y sont pour beaucoup dans la réussite et cohérence de cette mini série.
Brett Johnson, Jerry Stahl et Michael Tolkin ont su retranscrire cette histoire vraie avec un réalisme et une cruauté saisissante. Nul besoin d'ailleurs de rajouter de la cruauté là où elle se trouve déjà, le trio de tête du show en est une définition suffisante.
L'exemple le plus assommant, qui m'a littéralement claqué le buffet, c'est l'écriture des personnages, car pendant 5 épisodes nous sommes enfermés dans la prison avec eux. Nous vivons leur plan d'évasion et la manipulation envers une des employées, en apparence simplette et facile à détourner.
Puis d'un coup, sans prévenir, v'là qu'au lieu de nous plonger dehors avec les évadés, on nous colle un épisode 6 flashback où on découvre que les trois personnages auxquels on a su un peu s'attacher, sont des raclures absolues. Surtout la femme, la pauvre petite brebis n'est finalement qu'une salope de louve.
La claque continue car si en prison le détenu Richard Matt (incarné par le Del Toro, Benicio) s'avérait être le caïd, le dur à cuir devant lequel les autres se prosternaient, n'est à l'extérieur qu'une petite merde, une frappe ridicule, sans couille, alcoolique et bête. Sa mort, d'une connerie humaine incroyable me fout encore les larmes, cette scène est tellement forte, montrant le plus profond de cet homme, de ce connard infini qui se prenait pour un chef.
Le deuxième détenu, David Sweat (incarné par le fabuleux Paul Dano), semble être le moins merdeux du groupe, il a fait quelque chose d'impardonnable pour se retrouver dans cette prison mais c'est celui auquel on s'attache forcément le plus. Le gars qui au contraire, en prison se faisait discret et n'avait pas vraiment son mot à dire, qui dehors prend les commandes. Il aurait réussi son coup et vivrait loin de cet isolement dans lequel il est enfermé désormais s'il n'avait pas traîné avec lui le boulet, Matt.
Voilà où j'ai principalement pris ma claque, dans l'écriture minutieuse, subtile et bluffante de ces personnages, dont celui de Patricia Arquette restera le plus détestable, celui de Tilly Mitchell, qu'elle incarne magnifiquement derrière ce visage grimé. Son Golden Globe n'est que logiquement mérité.
Le casting est d'ailleurs aussi réduit que fort, Del Toro, Dano, Arquette ou encore les superbes David Morse, Jeremy Bobb et surtout... MAIS QUOI ?! Eric Lange que je ne connaissais pas de nom mais de visage, mais je viens seulement de taper dans google image son nom, MAIS QUOI ?!!! Mais ce mec était dans LOST, Narcos et j'en passe, jamais je l'ai reconnu ! Malgré le trio de tête de la série, il ne reste pas très loin derrière tant il a son importance, grâce à son interprétation remarquable.
Escape at Dannemora est assurément mon coup de cœur série de l'année, entre un casting aussi subtil que marquant, un Stiller qui nous sert une mise en scène d'un classicisme impeccable (l'épisode 5 et ses divers plans séquences est particulièrement fou) et une écriture hallucinante de détails, au réalisme captivant, on tient ici une pépite de mini-série.