Pour poser le décor, je vais vous expliquer ce qui m’a attirée dans cette série, alors même que je n’en avais jamais entendu parler. J’ai toujours été quelqu’un de mélancolique, pessimiste, endeuillé. Parfois ça va moins mal, parfois c’est un gouffre. Dans ces périodes, j’ai besoin, paradoxalement, de me plonger dans encore plus de noirceur, pour relativiser. Ayant eu l’immense privilège de bénéficier d’un mois gratuit chez VousSavezQui Prime, j’étais partie pour aller jeter un œil à Fallout sans grande conviction. Spoiler : je n’ai jamais vu Fallout.
La "mode" depuis les années 2010 de faire des saisons indépendantes avec une nouvelle intrigue d’une année sur l’autre (notamment American Horror Story) me plaît bien. Bon, AHS a sombré depuis la saison 3, mais ils nous auront au moins laissé ça.
Les deux saisons de The Haunting sont aussi très importantes pour moi par les sujets qu’elles traitent.
Et me voilà face à l’affiche de Them, série du même format.
Ce titre qui rappelle Us de Jordan Peele, Jordan Peele qui a aussi réalisé Get Out, les traits de la sublime Deborah Ayorinde, l’intuition qu’il y avait dans cette série quelque chose qui me parlerait… Il s’est passé un truc. Ce serait tout ou rien, mais mon petit doigt (il s’appelle Tony) m’a dit d’y aller. Alors on y est allé.
La suite va être un peu longue donc tl;dr : excellente série, oui c’est politique, supers acteurs, saison 2 > saison 1, si vous êtes du genre à pleurer au racisme anti-blanc passez votre chemin, multiples TW.
Saison 1
La saison 1 se déroule dans les années 50. C’est l’après-guerre, et beaucoup de noirs fuient le Sud du pays pour la Californie où on leur promet une vie meilleure, du travail et de belles maisons.
Alors on n’est pas sur une série "historique" relatant des faits réels, mais l’intrigue se déroule dans le contexte de l’époque. Les anciens soldats qui ont combattu pendant la guerre ont eu droit à des reconversions professionnelles et des facilités pour retrouver un emploi. La famille Emory, dont le père Henry est ingénieur, va s’installer à Compton. On pourrait croire que tout démarre bien, mais au fil de l’histoire on verra que non.
Dès les premières minutes, on a peur. On comprend qu’il fallait avoir des yeux dans le dos quand on était noir à l’époque. Le deuxième sentiment c’est la honte. La honte de se traiter de cette manière entre êtres humains. Le voisinage de Compton est abject. Honnêtement l’ajout de la couche "surnaturelle" du scénario était superflue, parce qu’il y a pire que les fantômes dans cette série, et c’est le quotidien (et pas seulement pour la famille Emory). À en avoir des hauts le cœur.
J’ai lu des critiques dépeignant les blancs comme "systématiquement mauvais" dans la série. C’est vrai qu’au fil des épisodes, on peut noter… 3 blancs qui ne sont pas hostiles aux Emory.
La scène qui m’a marquée notamment est celle où Henry emmène ses filles au diner pour un goûter, les fait s’installer au comptoir, et la serveuse les sert comme n’importe quels clients. Ils se regardent tous les trois, et apprécient un moment de calme dans un lieu où ils sont enfin accueillis. On peut rajouter à cette perception du « blanc-ennemi » le traumatisme très récent vécu par la famille avant son arrivée en Californie.
Personnellement, je l’interprète comme le fait qu’il y a deux mondes, dont l’un ne veut pas de l’autre, et l’autre ne peut pas se sentir en sécurité face à l’un.
Pour moi la saison 1 est extrêmement pesante, beaucoup plus politique que la seconde saison, beaucoup plus violente aussi, lente, oppressante, et il m’a fallu une bonne journée pour évacuer les images de ma tête et toute la détresse et l’angoisse des personnages.
Malgré tout, je ne peux que la recommander, mais si possible visionnez la saison 2 avant, qui est un peu plus… "digeste". J’aimerais vous parler plus en détails des « fantômes » qui hantent les personnages mais ma critique est déjà longue, donc… désolée, faudra regarder !
(Gros TW viol + actes barbares – ép.5)
Saison 2
Contexte de la saison : 1991, pendant l’affaire Rodney King. Elle n’est pas omniprésente mais marque, comme pour la saison 1, le contexte pour la population noire aux US. Reeve (jouée de nouveau par Deborah Ayorinde) est inspecteur de police, femme et noire. Beaucoup de ses collègues sont racistes, ou misogynes, ou les deux, mais heureusement y en a un qui est cool. Not all men, tout va bien.
Reeve va enquêter en binôme avec Ronald sur des meurtres très violents, dont le premier est celui d’une mère de famille d’accueil. Ronald veut expédier l’affaire en collant le meurtre sur le gamin de 16 ans hébergé par cette femme, Reeve veut enquêter. Les meurtres se multiplient et des événements étranges se produisent jusque chez Reeve, qui vit avec sa mère et son fils. Au fil de l’histoire et de l’intensification des événements terrifiants, elle apprendra des choses sur son passé.
En parallèle, nous suivons la vie d’Edmund Gaines, un gars très gentil, très perdu, très émotif, très maladroit, qui voudrait juste devenir acteur mais loupe ses castings.
On sent qu’il vit avec un gros trauma qui le submerge, qu’il est sur la brèche et prêt à basculer dans la violence, contre les autres ou contre lui-même. (TW suicide épisode 9)
Edmund est vraiment le personnage qui m’a retourné le bide dans cette saison. Luke James incarne à la perfection son personnage, ses changements d’humeur, de personnalité même, ce côté perdu dans un monde trop violent pour lui, et qui finit par le pousser à bout à force d’injustices.
J’ai trouvé la fin de saison un chouïa bâclée et paresseuse, et je regrette vraiment qu’Edmund ne soit pas plus mis en avant parce que c’est réellement LE meilleur personnage de la saison.
À la toute fin de l’épisode 9, on a droit à un clin d’œil de Da Tap Dance Man. Peut-être le protagoniste d’une saison 3 ?
J’ai vraiment préféré la saison 2, mais Them est la meilleure série que j’ai découvert depuis The Haunting of Hill House qui était ma série indétrônable depuis des années. Une super découverte.
Tant pis pour Fallout.