Ever Night
8.2
Ever Night

Drama Tencent Video (2018)

La Nuit Eternelle approche... le Games of throne chinois

La Nuit arrive, l'ombre dévore les étoiles et le froid et la glace engloutissent peu à peu les territoires du Nord, l'éternel hiver chasse les tribus Barbares affamées qui s'approchent dangereusement des frontières des prospères royaumes du sud et Xiling capitale de la clarté Céleste appelle à nouveau à prendre les armes contre les peuples Démoniaques....
Immanquablement on pense au Trône de Fer(enfin, j'y ai pensé même si le thème de la nuit cyclique mettant fin à toute vie sur terre est répandu dans nombre de récits traditionnels). Tout comme ce dernier, la série est tirée d'un roman fleuve de fantasy, Nightfall ou Jiang Ye de l'auteur très populaire en chine Mao Ni(Fighters of the destiny ). Il construit un univers vaste et complexe, avec ses propres systèmes de valeur morale, politique et spirituelle, des royaumes maintenus dans un équilibre précaire, une foule de personnages, des guerres et des complots politiques, des luttes de pouvoir et la compétition constante entre les plus hauts pratiquants de magie, tandis qu'une menace bien plus redoutable se profile au loin...


La série commence avec Ning Que, l'orphelin rescapé du massacre du Manoir Lin et sa petite servante Sang Sang qu'il a découvert, bébé sous un amoncellement de cadavres. On reviendra souvent sur cet événement déclencheur, un épisode hors-série y est d'ailleurs consacré ainsi qu'à l'anéantissement de la secte des démons et des tribus barbares(épisode magnifique plein de combats épiques dans des paysages enneigés). Ning Que incarne le classique jeune héros épris de justice qui veut devenir plus fort pour venger les meurtres de son clan et protéger ceux qu'il aime. Il se moque de la politique et de la religion, ne se laisse pas impressionner par le pouvoir et la renommée, il est décidé à forger son propre destin librement.
Bien que fort peu doué en magie(ses points d'acupuncture étant bloqués), il se doit de rivaliser avec les meilleurs pratiquants pour espérer vaincre ses ennemis, il part donc pour Tang, la capitale afin de se "cultiver" et découvrir les véritables instigateurs du meurtre de ses parents. Là-bas, il sera confronté à la politique et ses complots, se fera des amis et des ennemis. Contre toute attente, il deviendra le disciple de Fu Zi à l'académie Tang ainsi que l'apprenti d'un grand maitre des talismans. Mais est-il cet enfant des enfers dont on a prédit qu'il ferait s'abattre la destruction sur le monde?


Si Tang est un royaume tolérant où politique et religion sont séparées, de pensée rationnelle et prônant la liberté, il n'en est pas de même des royaumes du sud dominés par Xiling, capitale du Dieu de la lumière Céleste qui s'impose comme l'unique détenteur de la vérité et prétend conduire le monde vers une guerre éternelle contre le mal: les peuples démoniaques ainsi désignés en raison de leur méthode de culture jugée maléfique par Xiling. Ceux-ci, refoulés aux nord sont impitoyablement pourchassés et massacrés par les disciples de la lumière alors qu'ils fuient l'avancée de La Nuit éternelle et l'hiver mortel qui l'accompagne.
Rien n'est blanc ou noir. Ce n'est pas simple comme la lutte du bien contre le mal. A travers de nombreux personnages, différents peuples et croyances, c'est la façon d'appréhender le destin inéluctable qui fait l'histoire: soit imposer la vérité(par la violence et peut-être ainsi provoquer le mal qu'on souhaitait éviter)soit laisser le libre-arbitre en faisant confiance à l'humanité.
Ever Night parle surtout de liberté: la liberté de choisir sa voie, et de tolérance: nul ne détient la vérité universelle(ce qui a son importance en Chine aujourd'hui... et ailleurs).
En deçà des visions à long terme des grands maîtres spirituels, les rois, les empereurs et les héritiers présumés continuent à se mesurer pour le pouvoir temporel, ce qui tisse une trame complexe et serrée de personnages et d'intrigues courant tout du long de la série. Si Ning Que reste le personnage central et le fil conducteur pour la découverte de Tang, il nous est donné de suivre la trajectoire de nombreux autres personnages plus ou moins attachants et importants(la tâche est d'envergure autant y être préparé, comme pour Games of Thrône ça fourmille!).

Les 2 acteurs interprétant Ning Que et Sang Sang sont très jeunes, mais ils collent parfaitement à leur rôle(très bien écrit d'ailleurs), avec leur stupide jeunesse pleine d'illusion, arrogance et naïveté, leur passion et leur aspiration à la liberté, leur courage pour faire face aux difficultés de l'existence.
La liberté est aussi le maitre mot de l'académie Tang, une école où chacun développe ses pouvoirs dans ce qu'il aime le plus, où les disciples de Fu Zi sont tous plus excentriques(et attachants) les uns que les autres par opposition à Xiling capitale du dieu céleste où tout est maintenu dans une stricte hiérarchie opprimante, où la vérité est unique et imposée par la force et la violence.
Fu Zi observe le monde et laisse les événements suivre leur cours, confiant dans les capacités humaines de contrer les imprévus du destin. Il laisse au monde la liberté de choisir sa voie et donc il accordera à Ning Que la possibilité de faire ses propres choix.
C'est une fantasy asiatique avec des codes différents plus ou moins difficiles à intégrer et il faut un peu de temps pour se familiariser avec la "cultivation", mais c'est bien expliqué dès l'arrivée à Tang: Les pratiquants de la magie ont le choix entre 3 domaines de compétences: l'épée, le talisman et l'esprit. Pour chaque compétence, il y a des niveaux à franchir, les derniers étant inaccessibles en une vie humaine(c'est l'illumination!).

Le budget semble conséquent, les effets spéciaux, combats décors sont réellement splendides et évocateurs, la mise en scène et l'écriture des rôles est parfaite, ce qui est loin d'être le cas dans la plupart des séries de ce genre, les acteurs collent parfaitement à leur rôle...
Une des choses qui m'ont totalement séduite, c'est que sur la longueur, on prend le temps de s'attarder sur une foule de petites scènes quotidiennes qui mettent l'accent sur les relations des personnages entre eux, l'évolution de leurs sentiments et opinions ou projets et leurs attachements. Ces scènes sont pleines de naturel et de simplicité(ce qui m'a ravi et surprise dans un environnement fantastique la tendance serait à caricaturer les rôles), elles sont touchantes et sont loin d'être superflues, tous les personnages ont leur histoire, leurs motivations et leur tempérament. Il n'y a pas de bons et de méchants, il y a des circonstances et des croyances, des volontés, des peurs et des espoirs, tous les personnages sont abordés avec finesse et compréhension, pas seulement des images. Il y a un gros travail de ce côté-là(et de bons comédiens).
On nous invite à suivre deux trajectoires principales: Ning Que(et Sang Sang), l'orphelin miséreux le roturier et le prince Long Qin, paladin de la lumière et de la perfection. L'un, unique survivant du massacre du manoir Lin commis au nom de la lumière(anéantir l'enfant des enfers et pour d'obscures raisons politiques) recueille un bébé sous un tas de cadavres et ils s'élèveront ensemble, indissociables, l'un prenant soin de l'autre, puisant sa force et son espoir l'un en l'autre, Ning Que et Sang Sang sont merveilleux dans leur rôle, leur relation à travers de simples scènes, côte à côte sous le grand parapluie noir, elle minuscule oisillon et lui, intrépide et arrogant. Sur la voie de la vengeance, Ning Que nous conduira à la capitale de Tang et à l'académie de Fu Zi où il souhaite être accepté pour apprendre la cultivation(magie) et devenir assez fort pour affronter ses ennemis.
Le prince Long Qin quand à lui, fils cadet du royaume Yan vaincu par Tang est appelé l'enfant de la lumière, très précoce, il a déjà franchi les niveaux de culture, il est le plus pur et le plus parfait(mais arrogant et méprisant, incapable d'empathie) et son chemin nous mène à Xiling, capitale spirituelle célébrant le dieu céleste de la lumière.Lui aussi incarne parfaitement son rôle, beau, lumineux, froid et indifférent, drapé dans sa perfection. Comme sa bien-aimée, le maniaque des fleurs. pure et détachée. Et pourtant il demeure inférieur à Ning Que, pourquoi? Lui ne le réalisera jamais, mais j'ai une petite idée...
Il y a beaucoup d'humour et de sympathie dans l'arrière colline où Ning Que fera son apprentissage, protégé et encouragés par ses frères ainés. Liberté, tolérance, ils font ce qu'ils aiment le plus et sont tous très particuliers. Il deviendra aussi le disciple du maitre des talisman un personnage que j'ai adoré comme beaucoup d'autres vieux sages, les plus hauts pratiquants sont simples, humbles et plein d'humour, tellement naturels et bien joués, des scènes touchantes et pleine d'humour et des détails attachants comme la célèbre note du potage au poulet qui rend Ning Que célèbre et permet à Sang Sang d'en tirer pas mal d'argent.
Sans aucun doute ce qui fait le charme de cette série c'est la façon de nous attacher à ses personnages, même les pires, comme le vieux maitre de la lumière, celui qui a massacré tant de gens, s'est échappé de sa prison et ressurgit en vieux mendiant errant, ce monstre(qui a commis des crimes contre l'humanité) est un vieillard timide et discret, apprenant à découvrir les autres et affairé à rendre service, plein de bienveillance et de sourires. Il n'y a que le doute qui soit vrai: aucune certitude sur le bien et le mal, on peut changer de voie comme la scène où les vieux frères s'affrontent dans un combat plus psychologique et moral que physique, et franchissant les derniers niveaux de clairvoyance avant leur mutuel anéantissement, s'écrient: j'avais raison, j'avais tort, tout est vrai et tout est faux en même temps, je vois tout clairement! avant de disparaitre en cendres flottant dans le vent.
Comme le dit l'un des maitres: dans la pleine lumière on est aussi aveugle que dans les ténèbres...


Pour qui aime la fantasy, trop rare car difficile en ce monde à adapter, je conseille Ever Night: d'abord, les chinois sont les meilleurs actuellement pour ce genre, et je dirais même les seuls à oser. C'est dans leurs gènes, ça coule de source. Et puis là, ils ont mis les moyens! Je constate que la qualité dans les séries chinoises(autant animation que live est en hausse spectaculaire), avec un plus, l'humour, l'émotion, la capacité à intriguer et nous balader sur des voies innovantes, autre que la dualité brute entre le bien et le mal. On a droit à bien plus de nuances et de réflexions. 

Bon, certes, le système est complexe surtout en raison des difficultés de traduction: ce sont des concepts qui n'ont pas d'équivalent chez nous. Mais on s'y fait. Par contre j'ai vraiment eu du mal avec la notion du temps, beaucoup d'événements ne collent pas... ce qui s'est passé il y 20 ans, 15 ans... quel age a vraiment Sang Sang et Ning Que? Tout ça n'est pas clair.
J'ai du prendre le parti de faire mon propre barème de temps...
Mais un grand nombre de scènes me resteront en mémoire, magnifiques ou touchantes. C'est très bien tourné: les grandes scènes de bataille aux nombreux figurants comme l'épisode hors série revenant sur le massacre 15 ans auparavant(poignant et prenant) et le dernier épisode crucial, évidemment. Une seconde saison devrait bien sur arriver en 2020 et il me tarde! Tellement de personnages en suspens.

boomba
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le 11 oct. 2019

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