Pour le coup, ils font carrément semblant. Au départ, Faking it c'est un concept somme toute novateur au milieu d'une cohorte de teen-dramas normatifs et redondants (comme MTV semble d'ailleurs en faire à la pelle). L'intrigue prend place dans un lycée américain peu ordinaire, calqué sur le modèle du Greendale de Community, où l'on célèbre la différence autour d'un bac à composte autant qu'on ostracise la normalité en la renvoyant sur les bancs de touche.
Qu'on se le dise, pas de quoi casser trois pattes à un canard, mais la série est alléchante pour le vent de fraîcheur qu'elle apporte (du moins, aurait pu apporter) à un genre au paysage relativement balisé, à quelques éclairs de génie près. Le plus intéressant, c'est la manière avec laquelle elle entreprend de renverser les codes dans une tentative bienveillante d'acceptation de tous : les queers, loosers et marginaux galvanisent pour une fois toute l'attention, ce qui est assez rare pour être noté (même si Orange is the new black est quand même d'un tout autre niveau).
Malheureusement, c'est ce même concept qui l'aura perdu. En même temps, à quoi peut-on s'attendre de plus ? A force de nous asséner de messages positivistes, Faking it a fini par se noyer dans une surdose de niaiseries mielleuses, se renfermant dans un univers indigeste et insipide, tentant de s'affranchir des barrières d'une réalité drastiquement différente – la série se déroule à Austin, Texas, soit l'une des régions les plus conservatrices des USA – en en occultant grossièrement des vérités indispensables pour un tel sujet, embrassant à pleine bouche un politiquement correct consensuel inintéressant.
Pire encore, supposément progressiste, la série se fourvoie dans une masse infâme de stéréotypes, incapable de la moindre finesse, matraquant le spectateur à coups de topos-inversés manichéens – en gros, les gays sont soudainement populaires alors que les cheerleaders et les jock sont passés du côté des ringards – et de clichés gerbants – tout le monde rêve de s'accaparer le meilleur ami gay, la bimbo égocentrique se révèle être intersexe –, faisant de ses personnages des pantins désarticulés tout juste bon à fournir à l'intrigue davantage d'excuses rocambolesques pour servir une série en carton.
Un peu de sérieux, merde, et de la crédibilité ! C'est artificiel, grotesque, pas toujours drôle, mal écrit. Pourtant, le fil rouge autour de des deux meilleures amies dont l'une tombe amoureuse de l'autre aurait pu donner lieu à une chronique adolescente touchante (façon Sugar Rush), mais se vautre pathétiquement dans un jeu de je t'aime moi non-plus pendant deux saisons, usant des mêmes ressorts narratifs à chaque fois, sans jamais faire évoluer les personnages d'un chouïa, radotant dans un systématisme assommant les mêmes conflits puériles de pré-adolescentes immatures, peu aidé par un format 20 minutes qui donne aux épisodes des airs de teasers allongés.
Puis, j'en viens même à me dire que le côté gay-friendly s'est avéré tout bonnement racoleur quand l'on voit à quel point ils font tourner le personnage d'Amy en bourrique depuis le début, dans un espèce de queerbaiting inavoué insupportable – puisque jusqu'à maintenant, c'est la méchante hétéronormalité qui l'emporte dans le trio ! –, finissant même par lui trouver un copain (le comble de l'hypocrisie !!!) : l'on accepte tout le monde, mais surtout qui l'on veut.