Etrange objet sériel que Falling Water qui choisit volontairement, et avec un certain aplomb, des voies ignorées par la plupart des productions télévisuelles. Lent, lancinant même, le tempo s'attache principalement à des fragments de vie de trois individus qui, au départ, ne semblent avoir aucun rapport entre eux, mais se retrouvent, malgré eux, connectés par l'entremise de leurs rêves. Des personnes qui souffrent d'un manque, ou d'une perte, sans qu'ils puissent mettre le doigt précisément sur l'objet de leur peine : l'une voit régulièrement en rêve un enfant dont elle est persuadée qu'elle est la mère, alors qu'aucune trace du moindre accouchement n'a été constatée par sa famille ou le corps médical ; un autre recherche une femme qu'il a aimée bien qu'il soit incapable de la nommer et dont il est certain qu'elle a été enlevée ; le troisième essaie tant bien que mal de communiquer avec sa mère, catatonique depuis sept ans. Et derrière tout cela, une secte étrange, une organisation tentaculaire, un complot nébuleux et des personnages équivoques, dont on ne saura jamais vraiment s'ils sont du côté des bons ou pas.
Rappelant parfois Dreamscape dans certaines idées liées au déplacement volontaire dans les rêves, la série, à la réalisation minutieuse privilégiant les décors ambigus et une piste sonore déroutante à l'action quasi inexistante, semble davantage s'accrocher à son concept, y sacrifiant les explications rationnelles et les déferlements émotionnels : l'univers y est froid, aseptisé, et l'atmosphère onirique nie tout spectaculaire. Quasiment pas d'humour non plus et on peut éventuellement regretter une certaine forme de pédantisme intellectuel dans les citations et les monologues ouvrant et refermant chaque épisode.
Pourtant, la quête entreprise par nos héros intrigue d'abord, et finit par accrocher car le suspense est savamment entretenu ; finiront-ils par s'allier contre leurs ennemis ? Saura-t-on qui sont les alliés, les adversaires opportunistes et leurs réelles motivations ? De vérités illusoires en songes éveillés, les épisodes égrènent doucement et patiemment leur développement ondulatoire et, s'il n'y a guère de souffle épique et de bataille homérique, il y a quelqu'un à sauver, et une humanité en danger.
Fascinant.