Le high-concept sur lequel repose l’entièreté de la série n’a pas vocation à surprendre sur la durée mais à pérenniser le propos par l’emprunt d’un chemin un peu différent que celui des rom-coms habituelles. À la fois réaliste et sujette à laisser entrer dans son déroulement une douce touche de fantastique/fantaisie, Forever est une réflexion sur le temps qui passe lorsqu’on est deux. Un coup d’œil jeté par-dessus l’épaule pour prendre la mesure du chemin parcouru tout en constatant à côté de quoi on a pu passer (l’épisode 6 est un bijou sur le sujet). De la même manière que les personnages de Judd Apatow dans 40 ans : Mode d’emploi, June et Oscar forment un couple qui arrive au milieu de son existence, aux alentours de la quarantaine. Le moment propice pour faire un premier bilan et aussi la dernière chance de changer ce qui peut l’être pour que le reste soit meilleur.
Forever aborde cette problématique avec délicatesse, n’osant rarement faire s’élever un mot plus que l’autre. Tous les épisodes se déroulent dans un certain calme, qui symbolise autant l’apaisement que la résignation face à un combat qui aurait dû se dérouler il y a des années. Le temps a enraciné ce couple dans une routine que la série ne cherche jamais à glorifier. Comme dans ce long travelling de plusieurs minutes qui ouvre le premier épisode, débutant sur un enchevêtrement de balbutiements émotifs et s’achevant sur une situation banale répétée jusqu’à en perdre sa magie initiale. C’est l’usure qui est captée avec brio dans ces premières minutes, faisant oublier la charpente grâce à laquelle s’est solidifié l’amour.
Au travers de ce portrait peu vivifiant d’un quotidien plat, la série est bien trop subtile pour se moquer ouvertement de ses personnages. Du moins, elle ne le fait pas contre, mais avec eux. À la différence de jeunes adultes, June et Oscar sont expérimentés, avec un recul possible sur ce qu’ils sont, sur le monde. Pas la peine de les tourner en dérision, ils savent se débrouiller comme des grands. C’est pour cela que la série avance avec quiétude, peu importe les obstacles qui se dressent. Leur capacité à traverser les zones de turbulences tout en ayant encore cette nécessité de se tenir aux côtés de l’autre est magnifique. Par deux fois, la série les fait s’éloigner (pour des raisons que nous ne dévoilerons pas) et c’est à ces moments, alors que la vie ne peut plus être banale, qu’ils se rendent compte que c’est encore pire. Il paraît qu’on ne se rend compte de l’importance d’une chose que lorsqu’on la perd, n’est-ce pas ?
Retrouvez l'intégralité de la critique sur CinéSérie.com