À la base y'a ce mec, là... George. Le gars est curieux d'Histoire, évidemment inspiré par Tolkien pour la méthode de construction de son univers, et puis ça tombe bien puisqu'il va puiser dans le médiéval anglais pour écrire un bouquin. À la base c'était bien. Chaque personnage est travaillé, a une forte présence, a un rôle unique et utile à l'intrigue qui, bien que complexe, tient la route et tient en halène.
Puis on en fait une série... sur HBO. Cool. Et ils ont pas lésiné sur les moyens : costumes "d'époque", figurants par milliers, gros casting, pleins de châteaux et de lieux de tournage à travers le monde, construction des décors, et cætera. C'est sans doute la série la plus chère de tous les temps, dès la première saison. Et au début ça allait, le scénario avait été écrit par George, la série était cohérente et promettait que du bon. Et promesses furent tenues...
Mélange de cul, de sexe, de morts, de complots, de manœuvres politiques, d'arbres généalogiques nobles récités par d'autres nobles, de langues inventées pour l'univers... Tout y était. Ça annonçait de grandes batailles, une belle progression des personnages... et des prises de risques. Le ton était mature, on prenait pas les spectateurs pour des cons (même si on les appâtait à la poire, à l'abricot et à la pêche), chaque épisode prenait le temps de prendre le temps... C'était l'bon temps.
J'sais pas quand tout a dérapé... Je crois que c'était lors de la saison 4... Les épisodes ont commencé à être de plus en plus pressés, de plus en plus rythmés, tout en démolissant une à une les briques de cohérence et de maturité que les saisons précédentes avaient posé. À mesure que le budget augmentait, la qualité diminuait... Le pompon fut la fin de la saison 5. Une honte. C'était bien filmé, hein... mais il n'y avait plus le réalisme du temps et de l'espace qui caractérisait la première saison. Les soit-disant stratèges et meneurs de troupes commencent à faire n'importe quoi, les personnages deviennent plus stupides, les intrigues deviennent moins complexes, moins intéressantes, plus familières... Les armées se déplacent comme on prend le métro, passant d'une région à l'autre en un éclair, comme si on venait d'inventer la machine à vapeur et les locomotives. C'était d'autant plus frappant dans la saison 7, la saison qui enfonce le clou.
Dans cette saison les scénaristes ne s’embarrassaient même plus d'essayer de respecter le contrat de départ. Finis les intrigues politiques et diplomatiques. Place à l'histoire d'amour, et aux gué-guerres. On avait l'impression qu'ils souhaitaient en finir avec la série, qu'elle commençait à peser trop sur leurs épaules et qu'ils ne pourraient pas répondre aux attentes populaires et faire honneur au culte de la série. Pourtant le budget augmentait encore. Peut-être était-ce le budget, qui pesait...
Les scénaristes ont choisi d'appliquer la stratégie de la terre brûlée. « Si on ne peut pas avoir la série que nous voulions, alors ils ne l'auront pas non plus. » Ou bien peut-être que le succès de la série l'a amenée à évoluer, et pas vers le meilleur. Peut-être qu'HBO s'attendait à un succès confidentiel, que seuls les geeks et les nerds s'intéresseraient à Game of Thrones. Peu importe au final puisque de l'aveu même des derniers showrunners, ce qui comptait c'était le show, toujours le show. Aux oubliettes le scénario, car il devait se plier au rythme accéléré et au spectaculaire qui caractérisait maintenant la série.
Et voilà... maintenant la série s'est terminé comme un pet silencieux. Bâclée, trucidée, finie à la truelle... Game of Thrones s'est laissé mourir comme un chat se sachant mourant, quittant son logis, partant se loger dans un coin pourri, renonçant au luxe et à la coquetterie d'un noble chez-soi.
Repose en paix.