Au commencement, il y avait Asimov. Pour ceux qui ne le connaissent pas, c'était un brillant scientifique qui a apporté au monde Les Robots, les lois de la robotique et plein d'autres merveilles. On peut être d'accord ou non avec ces lois, ce n'est pas le sujet... Ce que j'aimais chez Asimov c'est qu'il partait d'un postula très simple et le complexifiait à loisir pour aborder des sujets plus philosophiques que scientifiques.
Problème : il a tellement réussi en ce sens qu'il est depuis longtemps considéré comme le père de la robotique et qu'on a souvent (trop) tendance à rapprocher n'importe quelle œuvre frictionnelle incluant des robots à l'œuvre d'Asimov... dommage.
Dommage car voir les points de vue se multiplier sur le sujet de la robotique est toujours une bonne chose, car il faut rappeler que les lois de la robotique n'en sont pas, et c'est là qu'Ex Machina entre en jeu.
Bienvenue au cottage...
Caleb travaille pour une entreprise multi-milliardaire qui lance un jour un concours pour rencontrer le CEO : Nathan. Le film vous embarque au moment où Caleb gagne la seule et unique place octroyée par le concours. Dans une ambiance « start-up » tout le monde le félicite, Caleb en pleure presque de joie. Il part alors pour un grand voyage confidentiel pour rencontrer Nathan au sein d'un complexe de recherche planqué dans la nature, là-haut, dans le grand nord américain.
Nathan est... Nathan est un cliché de CEO high-tech. C'est un jeune génie qui a, depuis ses premiers succès, grandi dans un environnement nourrissant son égo quelque peu démesuré. Il fait du sport... beaucoup. Il est intelligent... évidemment. Il est... réservé.
Entre Caleb et Nathan s'installe une relation forcée par la promiscuité des lieux. Caleb se demande ce qu'il fait là et Nathan tente d'épaissir au mieux le mystère qui... qui est dévoilé par la bande annonce. Oui, le film s'appelle « Ex Machina ». Oui, on sait que tu as fabriqué une androïde, Nathan...
Que reste-t-il ?
Si on est mis au courant assez rapidement des plans de Nathan, il restait fort à faire avec les thèmes principaux abordés par Ex Machina : la robotique et le transhumanisme, deux sujets vastes et encore assez peu inexploités. Pour le premier on a eu droit, la plupart du temps, à des robots tueurs sans cervelle. Pour le second, son "meilleur" étendard reste encore Transhumance et c'est plutôt navrant.
Alors... j'attendais beaucoup du film à ce niveau. J'attendais qu'il approfondisse l'essence de la nature humaine, la relation entre un créateur et sa créature, les dilemmes moraux qui en découlent, la place de la créature dans une société de créateurs, la place de l'homme dans ses propres sociétés... mais j'ai été déçu.
L'esthétisme, le début, le nom, tout laissait penser qu'on aurait affaire à un film puissant et réfléchi. Puisqu'il laissait filtrer pas mal d'élément de son intrigue, on pouvait espérer que cette dernière fusse au moins... intrigante. Non.
Comment faire du vieux avec du neuf
Caleb sent que quelque chose cloche, ses rapports avec Nathan se dégradent au fur et à mesure qu'il apprend à le connaître. Ses sessions avec l'androïde confirme ses doutes vis-à-vis de Nathan. Leur relation devient alors très claire et le conflit s'installe. À cet instant, l'ambiance change du tout au tout et Ex Machina vire au film d'horreur classique des années 90... sans l'horreur. Dommage (pour le revirement). Le film jète alors son potentiel aux rebuts, dès le moment où les réflexions cessent.
On l'avait doucement vu venir : bien qu'ils paraissent intelligents, les dialogues entre Nathan et Caleb sont souvent vide de sens, se résumant parfois à un enchainement de mots que les acteurs eux-même ne comprennent pas. Petit à petit, on s'éloigne d'un sujet qui s'annonçait complexe et profond pour aborder des faits triviaux, le commun des Hommes, le passé, bref... ce n'est plus aussi excitant qu'au début.
La fin du film se passe de commentaires, le scénariste fini d'accoucher difficilement de son hybride horreur/science-fiction improbable, et on fini de le regarder ébahis, non pas par la réussite du film, mais par l'étonnant tournant qu'il prend. Ex Machina commence comme un intelligent huit-clos intimiste et fini comme le commencement d'un mauvais film d'horreur, sans horreur. Vous l'avez compris, deux débuts ne font pas une fin ; le film ne trouve pas vraiment de conclusion, il semble être le bâtard issu d'une relation conflictuelle au sein de l'esprit d'Alex Garland (le scénariste).
Que reste-t-il vraiment ?
Honnêtement... pas grand chose. Parce que c'est typiquement le genre de film qu'on ne regarde qu'une fois. Parce que c'est typiquement le genre de film que j'aurai vu en VHS. Parce qu'il a un peu les fesses entre deux chaises, deux chaises très éloignées.
Ceci dit, c'est un film qui se laisse regarder... comme pas mal de bouses des années 90, au final. Meh...