Si les séquences cultes ne manquent pas dans Game of Thrones, ce n’est pas forcément parmi elles que la plus significative se cache : à une échelle m’étant personnelle, il faut ainsi remonter aux origines du show, bien avant que le brasier Targaryen n’alimente à n’en plus finir une audience des plus passionnelles. Car, après tout, tout débuta dans l’ombre mortifère d’une forêt enneigée où trois anonymes infortunés s’engageront pour le pire... et nous avec pour le meilleur.
Je garde ainsi un souvenir très net de ma « première fois », où l’atmosphère pesante et suspendue du Nord délivrait de funestes présages n’augurant pourtant que du bon : j’étais pris au piège, et dévorais sans sourciller l’intégralité de cette première saison dans la foulée. Et quand bien même le rythme devait retomber, la maestria visuelle de larges moyens techniques bien employés, le casting aux petits oignons et l’intrigue à tiroir (alternant avec brio les points de vue) enjoignaient aux espoirs les plus fous. Aussi, le devenir de Ned Stark n’en était que plus cataclysmique, Game of Thrones dévoilant une facette aussi bien addictive qu’ambivalente de son jeu : nul ne sera à l’abri, et le spectateur non plus par extension.
La suite nous donnera raison, au point d’étendre à n’en plus finir un monumental échiquier mené par de formidables figures de proue : mais à l’image de son fameux gimmick sanglant servant de climax saisonnier, le fil rouge de la série ne sera ô grand jamais paisible, pour notre plus grande satisfaction masochiste. Et plutôt que de revenir en détail sur les rouages essentiels du tout, chose malvenue tant nous risquerions de ne pas leur rendre hommage à tous (d’autant que cela nécessiterait une pléthore de paragraphes tous plus dithyrambique les uns que les autres), je préfère dédier ce papier à un point plus spécifique.
Il aurait d’ailleurs été tentant de se focaliser sur sa dernière saison, sujette à bien des controverses pour la plupart fondées, mais suffisamment d’encre (et de jérémiades) a coulé à son propos. Mais à l’image de la réaction outrée de Jessica Chastain vis-à-vis du traitement de Sansa Stark, il convient plutôt de s’attarder sur un facteur indissociable du succès, et de la pérennité, de Game of Thrones : ses personnages féminins. Sans revenir sur la pertinence discutable de tels propos, il apparaît que parmi le jeu des paires rythmant la série, celui des sexes aura été des plus prédominants : car par-delà d’avérés penchants tape-à-l’œil (surtout à ses débuts), le « bon » déroulement des hostilités n’aurait pas connu pareille évolution sans ce jeu d’influence entre les genres.
Quitte à grossir le trait, disons carrément que derrière chaque événements majeurs de la série se trouve une femme, et la chose ne se limite en aucune façon aux figures majeures que sont Cersei, Daenerys ou Arya. Un état de fait à bien des égards subtil dans son essence, nombre de solides et emblématiques gaillards privilégiant l’action à la réflexion sitôt pris dans leur toile, tandis que bien des rebondissements y trouveront leur source : Lyanna Stark et Lysa Arryn peuvent en témoigner.
Nous pourrions pousser plus loin la démonstration, mais la richesse sans borne du show enjoint à la retenue : concluons plutôt donc que, sitôt passé outre la « déception » relative à son grand final tronqué, Game of Thrones aura marqué durablement le « petit » écran, et bien plus encore. Et il sera diablement difficile de combler un tel vide, quand bien même HBO ne nous abreuve d’alléchants (mais risqués) spin-off... à moins que le miracle ne nous soit livré par Amazon en nous passant la « bague » au doigt ?