L'adaptation la plus audacieuse et l'une des plus réussies du classique d'Alexandre Dumas. Car il ne faut pas s'y tromper, si Gankutsuou transpose la trame du Comte de Monte Cristo dans un cadre futuriste et forcément plus mercantile, cette série d'animation témoigne d'un désir sincère de respecter l'atmosphère du roman originel. Le récit plonge ainsi le spectateur dans une ambiance aristocratique et romanesque où la richesse décomplexée des protagonistes ne sert qu'à dissimuler la dépravation de leurs sentiments. L'ingéniosité de la narration est de nous présenter le récit non pas du point de vue d'Edmond Dantès, dont la quête de vengeance demeure pourtant le déclencheur des évènements, mais de celui d'un jeune adolescent qui trouve dans le Comte de Monte Cristo la figure paternelle qui saura répondre à ses tourments identitaires. L'intérêt de cette approche narrative est double, elle permet d'une part de magnifier l’icône élégante du Comte à travers les yeux du jeune héros mais également d'enrichir le récit avec une exploration plutôt pertinente du mal être adolescent, les désillusions successives du personnage principal s'entremêlant avec les plans de vengeance de Dantès et constituant le vrai fil conducteur du récit.
La direction artistique flamboyante de la série enrichit justement cette thématique en accentuant le luxe étouffant qui constitue le quotidien du héros et en illustrant à l'écran son chaos mental grandissant. Certes la profusion d'effets visuels rend parfois l'action un peu confuse mais l'esthétique de Gankutsuou est à la mesure de la multitude des émotions éprouvées par les protagonistes où amour, haine, espoir et nostalgie se succèdent dans un tourbillon sentimental éprouvant.
Il est malheureusement regrettable que la dernière partie de l'intrigue ternisse son propos, d'une part en basculant vers une niaiserie Japonaise que le récit avait pourtant évité et surtout en vulgarisant ses personnages qu'il s'agisse du charismatique Comte se diabolisant jusqu'au ridicule et surtout du jeune héros, devenant tellement passif et pleurnichard qu'il en est exécrable. Si la maladresse du dénouement empêche ainsi Gankutsuou de grimper au Panthéon des séries d'animation Japonaise, l'originalité du concept et la pertinence de son exploitation durant la majorité du récit confèrent à ce Comte de Monte Cristo un attrait véritablement unique et offrent au spectateur une véritable immersion émotionnelle dans un univers aussi fascinant que repoussant.