Le point de départ a tout pour plaire si on veut regarder une sitcom légère. Un jeune couple citadin, dynamique et soudé, hérite d’un vieux manoir perdu dans la campagne. Ils décident de le transformer en bed and breakfast, sauf que la maison est hantée par une ribambelle de fantômes issus de différentes époques, tous coincés là depuis leur mort. Seule Sam peut voir et entendre ces revenants. Son mari Jay, lui, est totalement aveugle à tout ce petit monde, ce qui crée une dynamique de couple intéressante – et source d’un bon paquet de quiproquos. On se retrouve donc avec une héroïne entourée de spectres envahissants qui s’incrustent dans son quotidien, réclament des services, découvrent la télé-réalité avec émerveillement, et tentent maladroitement de comprendre le monde moderne.
La série joue sur plusieurs tableaux : les péripéties du couple qui tente de rénover la bâtisse, les flashbacks sur les vies passées des fantômes, et quelques touches plus émotionnelles, comme la rencontre de Sam avec sa mère défunte. L’ensemble reste sympathique, attachant même, avec une certaine tendresse pour ses personnages. Mais justement, c’est peut-être là que le bât blesse. Car les intrigues, aussi drôles peuvent-elles être, ne font pas avancer grand-chose. La série promet des résolutions mais aucun ne quitte jamais réellement les lieux. On reste dans une sorte de boucle où les choses semblent changer sans jamais vraiment avancer. Un surplace narratif qui, au bout de quelques épisodes, commence à peser. Et on finit par se poser des questions : pourquoi faut-il attendre l’arrivée de Sam pour que certains secrets soient dévoilés ? Les fantômes parlent entre eux depuis des siècles, non ? Ajoutons à cela une inconstance dans le traitement de Jay : parfois hilarant quand il erre dans une pièce sans comprendre ce qui se passe, parfois étonnamment clairvoyant alors qu’il est censé ne rien percevoir, parfois on a même carrément l’impression qu’on a oublié qu’il était dans la pièce, comme un PNJ sur pause. Ce genre d’oubli scénaristique trahit une écriture qui manque un peu de rigueur. Même chose côté réalisation : posée, basique, rarement inventive. On sent qu’on pourrait aller plus loin, surtout avec un concept aussi généreux.
Quelques épisodes surnagent tout de même, grâce à des trouvailles bien senties : l’ami imaginaire d’Hetty qui se révèle être le viking, la partie de D&D ou encore la fantôme ado en robe de bal, vestige d’un slasher des années 90. La série sait parfois jouer de la pop culture et tirer parti de ses personnages hauts en couleur. Mais dans l’ensemble, elle reste sage, gentille, un peu trop lisse. C’est un peu ça le résultat : Ghosts est une série « sympathique mais oubliable ». Et on peut se demander si la version britannique de la BBC dont est tirée la série, que je n’ai pas vue, ne serait pas plus fun à regarder. En effet je trouve que tout semble mieux coller à l’humour grinçant et absurde si typique des Anglais. Cette version a-t-elle trop lissé l’identité de son modèle au point de devenir tiède ? Il existe même une version française, qui semble encore moins bien reçue. Plus on avance dans les remakes, moins on rit. Coïncidence ?
Seule la première saison est disponible sur Netflix, alors que la série en compte déjà quatre. Malgré son côté très oubliable, la série et ses personnages sont suffisamment attachants pour donner une chance à la suite.