Goliath
7.1
Goliath

Série Prime Video (2016)

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David [Critique de la série "Goliath" saison par saison]

Saison 1 :
Et si on inventait enfin une nouvelle règle absolue de la Série TV (et du cinéma aussi pendant qu'on y est) ? Du genre : "une série avec Billy Bob Thornton ne peut qu'être excellente" ? Car, avouons-le, ce type, qui a toujours été un très bon acteur, est devenu - en même temps qu'il se faisait plus rare - un truc monstrueux. Littéralement hypnotisant. Dans la première saison de "Fargo", il emportait tout sur son passage. Dans la première saison de "Goliath", polar judiciaire bien troussé de la maison Amazon, il fascine, bouleverse, réjouit tour à tour : il tient la baraque à lui tout seul. Grâce à lui, on ferme sans problème les yeux sur les gentilles invraisemblances d'une intrigue qui pousse un peu loin le bouchon dans le genre "le peuple américain contre les méchantes corporations" (David contre Goliath, donc...), tout en empruntant le chemin bien balisé de la rédemption de l'avocat génial mais dégueulasse devenu alcoolique. A priori pas grand chose de nouveau dans "Goliath", donc, qui mêle cynisme insupportable façon "House of Cards", lesbianisme chic et violence sporadique (mais efficace), sans oublier une belle galerie de monstres comme on a appris à les aimer. Il faut d'ailleurs admettre qu'en "gardien de la crypte" répugnant, effrayant et intégralement haïssable, William Hurt remplit lui aussi largement son contrat. Bref, 8 épisodes un peu capillotractés mais toujours passionnants, qui font frémir, trembler, rire, sans trop s'appesantir sur les faiblesses criantes d'une intrigue "à trous" ou de certains personnages par trop incohérents (la palme revenant au juge, mal incarné par Harold Perrineau, dont on ne saisit jamais le jeu...). 8 épisodes avec Billy Bob dans presque tous les plans.


[Critique écrite en 2017]


Saison 2 :
La réussite notable de la première saison de "Goliath", même si elle reposait en grande partie sur les étroites (mais finalement robustes) épaules du génial Billy Bob Thornton a logiquement donné envie à la maison Amazon Prime de poursuivre l'expérience, mais en poussant cette fois tous les curseurs dans le rouge. La bonne nouvelle est que la seconde saison n'est pas une pâle copie de la première dont elle reprendrait les mécanismes (il s'agit c'est fois bien plus d'un polar traditionnel que d'un "film de procès"), mais la mauvaise c'est que l'on frôle parfois le grand n'importe quoi, en particulier du fait de l'introduction de personnages sévèrement déviants et de scènes qui pourraient traumatiser les plus sensibles d'entre nous. On peut aussi juger que la série perd un peu de son originalité en louchant occasionnellement vers "Bosch" (les romans de Connelly restant pour le moment LA référence quand il s'agit de dépeindre le monde de la politique et de la police de L.A.) ou vers Breaking Bad (l'épisode assez WTF de la captivité de Billy McBride au Mexique...). C'est assez amusant, mais ça n'aide pas à la crédibilité d'une énigme qui a pourtant l'intelligence de se terminer de manière beaucoup plus contrastée - et donc réaliste : il est clair qu'on ne saurait attendre à chaque fois le triomphe de David sur Goliath !


[Critique écrite en 2018]


Saison 3 :
La saison 3 de "Goliath" nous raconte cette fois le combat de Billy McBride et son équipe pour le moins fantaisiste contre les riches propriétaires terriens californiens s’appropriant la quasi-totalité des réserves d’eau de l’Etat au détriment des populations, et ce, à travers la corruption des politiciens locaux… soit un sujet globalement pertinent en notre ère de violent changement climatique. Le problème de cette saison est qu’il y a une sorte d’évidence dans ce sujet qui en réduit notablement l’intérêt en termes de « suspense ». Conscients de cela, les scénaristes ont cru malin d’ajouter nombre de personnages bizarres, dérangés, parfois franchement cocasses, parfois heureusement un peu inquiétants, qui tirent parfois la série du côté de "Twin Peaks". Car "Goliath" erre désormais à la lisière du surnaturel, avec un recours à des hallucinations - causées par l’usage de drogues indiennes - aussi déstabilisantes pour les personnages qui en sont victimes que pour le téléspectateur. Nombres de mystères nourrissant les premiers épisodes font ainsi craindre que Goliath bascule dans un fantastique un peu facile, avant que des explications rationnelles ne viennent nous rassurer. Sombres prophéties (se réalisant pourtant) et visions torturées (pas forcément loin de la réalité, en fait…) complexifient une intrigue qui serait peut-être sans cela, en effet, un peu trop légère.


Mais ce sont avant tout les nouveaux « bad guys » qui font le sel de la saison : si l’on souffre de voir notre cher Randy Quaid lui aussi défiguré par une malheureuse chirurgie esthétique, son personnage de grand propriétaire roublard mais finalement généreux s’avère réellement savoureux, tandis que Amy Brenneman, dans un rôle délirant de sœur psychopathe, est littéralement délicieuse.


Alors, Billy McBride aura-t-il échappé à la prophétie qui le condamnait, et reviendra-t-il pour une quatrième saison ? Rien n’est moins sûr, à date… Mais de toute manière, "Goliath" aura été un véritable plaisir, d’autant plus fin que nous ne l’aurons pas partagé avec la masse des addictes aux séries TV.


[Critique écrite en 2019]
Retrouvez cette critique et bien d'autres sur Benzine Mag : https://www.benzinemag.net/2019/10/27/amazon-prime-goliath-et-le-genie-de-billy-bob-thornton/


Saison 4 :
Comment réaliser une nouvelle saison d’une série dont le personnage principal est mort à la fin de la précédente ? On peut jouer le flashback – et dans le cas de Billy McBride, l’as du barreau alcoolique et cynique, héros de notre chère série judiciaire "Goliath", il y aurait tant de choses de son passé qu’on aimerait connaître. On peut aussi prétendre qu’il ne s’est rien passé, comme avec un "Lapinot" revenant de l’au-delà sans que personne ne s’interroge outre mesure, sa mort se voyant résumée au port d’un t-shirt noir approprié. N’importe laquelle de ces deux solutions aurait été meilleure que celle choisie par David E. Kelley, Jonathan Shapiro et leur équipe : le vieux coup usé du « eh bien non, il n’était pas mort », ou plutôt « Il était mort, mais les médecins l’ont ressuscité ! ». Et comme le cerveau de Billy en a pris en coup, nous avons droit à deux premiers épisodes lourdement peuplés de cauchemars, d’hallucinations, de visions distordues de la réalité, qui vont logiquement dissuader une bonne partie des téléspectateurs de poursuivre l’aventure "Goliath" : les références répétées à "High Noon" sont particulièrement déplacées et irritantes et nous donnent une furieuse envie d’en rester là !


On peut toutefois s’accrocher, car les épisodes suivants relèvent le niveau, et l’on retrouve cette excitation des saisons précédentes, avec la désormais habituelle lutte du petit David contre le méchant et énorme Goliath : cette fois, c’est Big Pharma, soit une cible bien dans l’air du temps, le sujet du procès étant la dépendance (bien réelle) de la population américaine aux opiacés provoquée par l’avidité financière des fabricants de drogues… Mais comme il faut bien compliquer les choses, Billy et Patty travaillent cette fois pour une grosse compagnie d’avocats de San Francisco, elle-même curieusement engagée dans des tractations secrètes. Le climat hivernal pluvieux et l’exotisme du quartier chinois de Frisco fournissent l’occasion au directeur de la photo et au(x) réalisateur(s) de nous proposer une ambiance fantomatique et une image onirique certes séduisantes, mais qui déréalisent largement – comme c’était déjà un peu le cas dans la saison précédente – les enjeux judiciaires et policiers, et nous éloignent aussi des personnages, qui semblent plus théoriques, plus froids qu’avant.


Et c’est dommage parce que "Goliath" sait toujours nous offrir des moments vertigineux où l’intrigue bascule de manière inattendue, de ces moments qui font revivre notre passion pour une série pourtant clairement en fin de parcours. Mais cette satisfaction s’avère de courte durée, finalement, car le dernier épisode brade de manière honteuse la conclusion judiciaire du bras de fer entre McBride et les bad guys – même si Bruce Dern et JK Simmons font tous deux, sans réelle surprise, un beau boulot ! – avant de boucler la série sur un happy end ridicule de réconciliation de McBride avec ses vieux démons.


Bref, une quatrième saison tout-à-fait dispensable, qui écorne les bons souvenirs que l’on aurait aimé garder de "Goliath"… et ce d’autant que même Billy Bob Thornton, bien dans son personnage, semble planer dans un état second tout au long de cette triste histoire et se révèle définitivement moins touchant qu’à son habitude.


[Critique écrite en 2021]
Retrouvez cette critique et bien d'autres sur Benzine Mag : https://www.benzinemag.net/2021/11/01/prime-video-goliath-saison-4-tout-est-mal-qui-finit-mal/

EricDebarnot
7
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Créée

le 10 mars 2017

Critique lue 8K fois

20 j'aime

Eric BBYoda

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