Lancer une série de super-héros c'est toujours délicat.
Cela l'est encore plus lorsqu'on lance une série de super-héros sans super-héros.
La précédente tentative du genre, Marvel Agents of S.H.I.E.L.D. , était pour moi un échec flagrant, avec ses personnages, ses acteurs et ses scénarios plats comme la poitrine de Birkin et aussi profonds que la réflexion de Carla Bruni (je ne sais pas pourquoi cette série m'évoque des chanteuses sans voix...).
Mais Gotham ce n'est pas une organisation de super-espions (ce qui aurait dû suffire à faire une série qui déchire tout, bref). C'est encore moins un décor. Dans l'univers de Bruceman Batwayne, Gotham est un véritable personnage à part entière. La question était donc de savoir si la série parviendrait à relever le défi de créer ce personnage principal, et d'articuler tous les autres autour de lui.
L'histoire de Gotham est censée se passer dans le passé, à une époque où Bruce n'est encore qu'un enfant et les vilains de sa galerie tout juste des gagne-petits ou des psychopathes de bas étage.
Si au début elle devait principalement mettre en scène Jim Gordon, tout jeune détective, ses créateurs ont finalement décidé d'y introduire la genèse du Dark Knight, ainsi que les origines des divers méchants qu'il affrontera plus tard.
Au final, ce premier épisode contient beaucoup de choses. Probablement un peu trop.
Spoilers non aggravants ci-dessous.
Le choix de l'époque de l'histoire est assez troublant. Si les relents gothiques de Gotham la rendent assez intemporelles, et si les voitures et costumes évoquent aisément des années depuis longtemps révolues, il semblerait que pour ne pas s'aliéner le jeune public les auteurs aient jugé bon de mettre des téléphones portables dans toutes les mains. C'est dommage, on y perd en cachet et en cohérence. Parce que si ça se passe maintenant et que Batman est petit, il sera grand quand ? Dans le futur ? On s'y perdrait hein...
La scène de la mort des Wayne est assez bien réussie et plutôt fidèle au canon (si ce n'est que du coup ce n'est bien sûr pas le très vieux film The Mark of Zorro qu'ils viennent de voir).
Gordon est campé par le sosie de Russel Crowe jeune. Un peu trop balèze au corps-à-corps ce Gordon, mais sinon pas mal. Et sa femme a de faux relents de Charlize Theron, enfin, elle est blonde et bonn... euh, belle quoi.
Est-il nécessaire d'introduire dans le même épisode la future Catwoman (l'actrice étant de 2 ans l'aînée de celui qui joue Bruce, n'aurait-elle pas dû s'appeler Cougarwoman ?), Penguin, E. Nigma, Poison Ivey, probablement le Joker, et j'en passe ? Probablement pas, là ça passe du private joke à l'étalage de confiture à base de raclure Gothamite. Mais bon ça reste assez bien fait.
Après, il y a toujours cette étrange tendance que je ne comprendrais jamais : celle de mettre un maximum de noms familiers aux lecteurs même si c'est dans des rôles ou à des périodes qui n'ont rien à voir (cf. Yondu dans Guardians of the Galaxy). Là on a Harvey Bullock, ok, il a déjà bossé avec Gordon, et même s'il n'était pas censé être son aîné comme c'est le cas ici, il a été retconné (re-déconné) tellement de fois dans les comics qu'on n'en est plus à ça près.
Mais Montoya ? Elle est normalement plus jeune que Bruce Wayne et là on l'a en vétérante. Quel intérêt ? Expliquez-moi s'il-vous-plait, j'ai pas envie de mourir con, je veux comprendre ce qui se passe dans la tête des ricains !!
Bon, à part ça l'histoire tient plutôt bien la route. Et Gotham, je veux dire Miss Gotham, la ville tellement tordue qu'elle va engendrer tous ces tarés, est plutôt bien représentée. Elle a du caractère. Des tripes. Des couilles au cul. Elle est sombre, sale, et belle à la fois. Comme une vieille pute qui aurait encore du chien. En version bien malade dans la tête.
Alors, cette série est toute jeune, et elle pêche par sa jeunesse, son envie d'en dire trop, d'en montrer trop, et parfois pas ce qu'il faut.
Mais c'est quand même bien prometteur tout ça, et on va voir où ça nous mène.
Probablement dans une ruelle sombre où rebondissent encore quelques perles, tandis que résonne dans l'allée l'écho de deux coups de feu qui changeront à jamais la vie d'un jeune garçon fasciné par les chauve-souris...