C’est l’heure du bilan pour Halt and Catch Fire. La série qui vise à remplacer Mad Men sur AMC a-t-elle réussi son départ ? Il semblerait que non, puisque AMC « réfléchit » à une seconde saison. Pourtant cette série ne manque pas d’intérêt. D’abord son sujet, l’éclosion de l’informatique personnelle dans au début des années 80. Et en particulier, l’arrivée des clones d’IBM PC qui va révolutionner l’industrie informatique (et nos vies, puisque vous êtes en train de lire cette chronique sur le petit-fils de ces machines). C’est le talent d’AMC, que de mettre en scène un sujet apparemment ridicule (la publicité) et d’en tirer une saga d’époque, profonde et riche.
La volonté ici est évidente : un Mad Men des années 80, la pub remplacée par l’informatique, les Directeurs Artistiques par des geeks, et Joe MacMillan en Dan Draper tout aussi mystérieux, mais écrit par Bret Easton Ellis… Et si l’argument est faible (une success story in the making), Halt and Catch Fire va s’attacher à en tirer une intrigue convenable sur la difficile mais nécessaire coopération entre les visionnaires du marketing et le cerveau des ingénieurs.
Mais ce qui les intéresse les créateurs de la série (Christopher Cantwell et Christopher C. Rogers, qui n’ont même pas une page Wikipedia, les pauvres), ce sont les personnages. Quelle motivation pousse trois personnes à affronter IBM ? Un ingénieur, qui a raté son premier PC et failli ruiner sa famille ? C’est le formidable Scoot McNairy (Monsters, Killing them Softly, 12 Years a Slave et Gone Girl, le prochain Fincher) qui l’interprète. Un beau ténébreux visionnaire et passionné, au passé trouble (Lee Pace, Lincoln, The Hobbit 2) ? Ou encore la femme du premier (formidable Kerry Bishé) ou la maitresse du second (Mackenzie Davis, excellente mais peu crédible en punkette-codeuse) ?
En tout cas, ce sont les personnages et leurs acteurs qui sont la grande réussite de Halt and Catch Fire. Il reste néanmoins qu’il manque un petit plus, qu’on aurait du mal à expliquer. Aux dernières nouvelles, AMC aurait signé pour une deuxième saison malgré des résultats faibles (500 000 spectateurs par épisode).
La saison 1 se suffit de toute façon à elle-même car elle a l’intelligence de fournir à la fois un cliffhanger pour une éventuelle saison 2 et une fin acceptable si jamais la série s’arrêtait. C’est-à-dire aucun regret à ceux qui auront le courage de regarder tout.
PS Le pilote (qui définit, comme chacun sait, l’esthétique d’une série pour toujours) est signé Juan José Campanella, l’immortel auteur de Dans Ses Yeux. Ceci expliquant cela : Halt and Catch Fire est aussi formidablement filmé dans une esthétique eighties, que l’était Mad Men dans ses sixties resplendissantes.