Roi de la castagne

Par une étonnante coïncidence, Hit and Run sort quelques semaines après que fut révélée l’affaire Pegasus, du nom d’un puissant logiciel espion israélien employé par certains gouvernements pour surveiller illégalement leurs alliés. C’est dans ce même climat de « je suis ton ami mais je t’espionne dans ton dos » que baigne la série, laquelle se double aussi d’un complot dont notre héros Seguev Azulai (Lior Raz) va chercher à élucider les mystères de part et d’autre de l’Atlantique, entre Tel Aviv et New York.

Première force de Hit and Run, la qualité de sa production. Une réalisation remarquable, dont la qualité de la photographie et de la mise en scène occasionnent de belles surprises (notamment dans l’intégration des flashbacks, très réussie), une bande-son minimaliste mais efficace, des acteurs secondaires satisfaisants que ce soit côté Israël ou États-Unis… bref, c’est de ce point de vue un quasi sans faute. Seul petit point négatif, des fusillades qui manquent un peu de punch par rapport à ce qu’une série comme Fauda (issue des mêmes créateurs) a pu nous habituer.

L’histoire est bien ficelée, et même si certains retournements apparaissent bien vite comme inéluctables pour mieux nous attacher au héros et ses convictions, la manière dont sont amenées les révélations sur l'intrigue principale m’a paru convaincante. L’utilisation des flashbacks, habile et jamais trop omniprésente, ainsi que des personnages aux caractères bien nuancés constituent les principales forces d’un scénario qui parvient à rester crédible juste ce qu’il faut pour nous tenir en haleine jusqu’à la fin.

J’ai beaucoup apprécié la façon dont la langue était employée tout au long de la série, permettant aux personnages de discuter entre eux tantôt en hébreu, tantôt en anglais en fonction des situations. D’autres aspects, comme la question du rôle de la presse dans la révélation d'affaires d'espionnage, ou la gestion du contre-espionnage entre pays censés normalement être alliés sont également bien traités.

Bien qu’elle s’inspire pas mal d’autres séries d’espionnage, Homeland en tête, Hit & Run parvient à se démarquer grâce à cette ambigüité permanente qui déjoue toute classification manichéenne. Pas de gentil ou de méchant donc, mais juste des gens dangereux dont notre héros, en quête pour sa propre vérité, cherche à déjouer les plans impitoyables, quand ce n'est pas le système tout entier (police, justice...) qui lui tombe dessus.

Lior Raz, après son superbe rôle de Doron Kabilio dans Fauda, prouve une fois de plus pourquoi il est de plus en plus reconnu à l'international dans les rôles d'action. Bourru, castagneur mais aussi volontiers charmeur (son anglais est impeccable), il brosse ici comme dans Fauda un personnage à la personnalité perturbée, impulsif mais gardant toujours à l’esprit un certain idéal de justice. Il se dégage de lui une humanité particulière, toujours contrebalancée par sa fâcheuse tendance à s'embarquer dans les pires situations, parfois par manque de préparation ou de réflexion.

9 épisodes de moins d’1h qui se regardent rapidement, grâce à un rythme qui sans être effréné demeure très fluide et sans longueur tout du long. Hit and Run est une belle surprise en cet été assez pauvre de sorties sur Netflix, dont je suis impatient de voir la suite, puisque saison 2 selon toute chose il y aura !