Sacrée meilleure série dramatique de l'année aux Golden Globes, Homeland a remporté un franc succès tant critique que commercial, la chaîne faisant ses meilleures audiences sur l'ouverture et la conclusion de cette première saison.
Précocement comparée à 24h Chrono, ce qui a pu légèrement la faire surestimer par contraste, elle est plutôt à rapprocher de Rubicon mais surtout de la trop souvent oubliée Sleeper Cell qui officiait déjà sur Showtime. Les deux séries câblées abordent en effet le grand thème national du Terrorisme sur le sacro-saint territoire américain en proposant une accessibilité immédiate, une légèreté de ton vanillée, presque une certaine forme de naïveté. Elles ont en outre le mérite à l'instar du remake (encore) d'AMC de the Killing de présenter la communauté musulmane américaine sous un jour nouveau : Le discours nuancé et critique est à présent bien ancré sur le petit écran outre-atlantique.
Si le scénario de l'enquête de la CIA demeure plutôt accrocheur, quoique pas vraiment dense, allant d'informateurs peu loquaces en indices fragiles, elle n'évite pas, surtout en fin de saison, quelques grosses ficelles artificielles, des facilités scénaristiques et une tendance à tomber dans du drama peu réaliste à l'écriture attendue. Le couple en crise avec un(e) infidèle empli(e) de remords semble depuis quelques saisons déjà infecter tout l'espace : Homeland, American Horror Story ou bien encore the Walking Dead centrent cette année leur ressort dramatique sur cette véritable gageure.
Homeland souffre donc du triste syndrome dit du stabilo psychologique : tout y est surligné en fluo. Un personnage, souvent Virgil ou Saul commentera forcément ce qui a déjà été explicitement évoqué, un panneau géant semblant clignoter au-dessus de l'écran "PSYCHOLOGIE !". Il manque clairement de la finesse et de la pudeur non pas dans leur construction mais dans la finition.
Formellement, Homeland se place dans la moyenne haute à la photographie et la réalisation certes soignées, chaîne du cable oblige, mais paraît terriblement fade et plate par rapport à d'autres séries comme la Rubicon déjà citée, Breaking Bad, les débuts de Dexter ou pour prendre une série de 2011 Boss qui offrent une esthétique marquée, un véritable projet visuel qui forme le temps d'un épisode une bulle imperméable. Homeland contient toutefois quelques pépites mélancoliquement jazzy et tente certes par moment une stylisation au filtre jaunâtre et aux blancs saturés mais sans succès. Ces scènes dans le désert et au Proche-Orient restent malheureusement sans saveur.
Le point fort viendra donc des acteurs qui soutiennent une écriture trop souvent légère. Sans surprise, le duo principal Claire Danes & Damian Lewis était nominé aux GG, la première a remporté le prix de meilleure actrice dans une série dramatique. Il faut aussi souligner Mandy Patinkin tout en réserve et tendresse bourrue mais également les enfants qui pour une fois ne sont pas insupportables de bout en bout. Morena Baccarin quant à elle est totalement sous-utilisée en potiche dénudée.
Au final, Homeland ne frappe pas le home run mais gagne quelques bases : elle ne parvient jamais à véritablement s'extraire de son médium et faire oublier à son public qu'elle n'est une série, c'est-à-dire un amas de minutes censé apporter son minimum syndical de suspense, de mystères, aussi un peu d'action, et des personnages torturés, enfin structurer une saison pour préparer un season finale en apothéose.
La confirmation d'une seconde annonce-t-elle les débuts malheureux d'un jeu incessant et indigent du chat et de la souris ? Espérons plutôt qu'elle ne dépassera pas le tiercé car si elle possède des défauts ils n'éclipsent pas pour autant ses qualités et son fort capital sympathie.