Londres 1900, les journaux titrent "Un fantôme assassin hante un couvent". Houdini, qui vient tout juste de sortir de son caisson remplit d'eau, y voit l'occasion enfin de démystifier une bonne fois pour toutes ces fariboles. Doyle, quant à lui, alors qu’il vient de tuer Sherlock Holmes et de sortir un essai peu engageant, espère profiter de cette actualité pour prouver au monde l'existence d'une vie après la mort. Face à la renommée de deux protagonistes (qui savent s'envoyer des fions avec classe et avec une régularité étonnante) le commissaire cède et met une agente sur l'enquête, Adelaide Stratton, censée les surveiller. Ainsi commence les aventures de Houdini et Doyle à Scotland Yard.
Certes, Houdini et Doyle n’ont jamais enquêté sur des meurtres ensembles ! Certes, il ne se sont rencontrés que plus tard ! Et certes, Houdini était marié ! Bien sûr, la séries prend d'énormes libertés avec la réalité, mais elle n'a jamais annoncé vouloir la suivre. De plus, on s'en fiche royalement ici, parce qu’Houdini et Doyle forment un véritable duo de choc. L’un est juif, américain, homme à femme, spécialiste de l'illusionnisme... l’autre est catholiques, anglais, marié, docteur en médecine (et écrivain). Tout les sépare. L'un sceptique au possible pour qui le paranormal ne peut absolument pas exister, l'autre croyant qui jure que la science n'explique pas tout et qu'elle a ses limites.
Mais, malgré leurs croyances qui sont radicalement opposées, ils ont une chose en commun : la méthode avec laquelle ils enquêtent. Grâce à cela, ils en arriveront toujours aux mêmes conclusions, même si certains points restent mystérieux. Dès lors, la série ne prend aucun parti, traitant les personnages avec une rigoureuse égalité, nous montrant que l'important n'est pas d'avoir des croyances ou non, mais d'être capable de les mettre à l'épreuve du réel et s’en affranchir si les preuves qui y vont à l’encontre sont suffisantes.
Voyances, miracles et punitions divines, extraterrestres, réincarnations, fantômes, monstres démoniaques... pratiquement tout y passe. L'entièreté étant saupoudré de critiques politiques et sociales : féminisme, racisme, antisémitisme, etc. Il est essentiel, afin de comprendre les personnages, de se remettre dans le contexte de l'époque où la science avait magistralement fait ses preuves et en était presque toute puissante. Puissance qui faisait dire à certains qu'on était à l'aube de prouver l'existence d’une vie après la mort (qui était une hypothèse pratiquement rationnelle). Mais puissance déjà contestable éthiquement (pratiques des hôpitaux psychiatriques), et qui sera vraiment remise en cause plus tard lors du naufrage du Titanic et de la 1ère Guerre Mondiale.
Les dialogues sont particulièrement bien écrits et desservis par des acteurs qui en font légèrement trop mais pile-poil ce qu’il faut. Ce sont des archétypes et des personnages de fiction avant d’être des personnages historiques. Chaque blague fait mouche. Les décors et les costumes nous entraînent parfaitement dans l'Angleterre de la Révolution industrielle avec quelques petits airs Steampunk. On croisera notamment les chemins de Bram Stocker et d'Edison, on apercevra également le jeune Churchill.
La véritable histoire des deux personnages est particulièrement bien invoquée pour les caractérisés et comprendre d'où viennent leurs croyances. Adelaide Stratton ne fait pas figure de rajout superficiel participant réellement aux enquêtes. Elle fera sans cesse la balance entre les deux personnages et les tirera de guêpier plus d'une fois, ce qui n'est pas commun pour une femme du début du XXe oppressée par une hiérarchie qui ne cache pas sa misogynie. Elle sera également au centre de la trame principale qui s'étale sur l'ensemble des épisodes.
On regrettera la construction un poil simpliste de la série, en même temps c’est une série policière, et les quelques explications un peu extravagantes et abracadabrantesques, mais en même temps normales pour une série sur le paranormal.