Viol & Consentement - Coup de poing - Féminisme - Racisme - LGBTQ - Amitié - Génération Y - Londres
Mini-série britannique sortie au début de l’été 2020, I May Destroy You (IMDY) est un véritable chef d’oeuvre qui s’attaque à la notion de consentement comme aucune œuvre audiovisuelle ne l’avait fait auparavant en seulement 12 épisodes percutants de 30 minutes. Disponible en France sur OCS.
Alors qu’est-ce que ça raconte ? ????
On suit les mésaventures d’une jeune londonienne, Arabella, qui suite à un succès populaire sur les réseaux sociaux s’est vue offrir un deal pour écrire son premier roman. Plus talentueuse que rigoureuse, elle tente de percer dans une industrie opportuniste dont on elle ne partage pas forcément les codes. Mais sa vie change le lendemain d’une soirée obscure en boite de nuit, lorsqu’elle réalise -entre page blanche et trou noir- qu’elle a été violée.
Loin de suivre l’enquête policière en cours, la série s’intéresse à sa victime, aux conséquences du traumatisme et aux armes dont elles disposent pour aller de l’avant. Arabella peut notamment compter sur Kwame et Terry, ses deux amis de toujours qui la soutiennent et tentent aussi de cicatriser leurs propres blessures dans un monde où violence et plaisir charnel se confondent.
I. Pourquoi faut-il regarder IMDY ? ????
Michaela Coel nous livre une critique cash, authentique et sans complexe : à force de faire face au racisme, elle avait oublié qu’être une femme était aussi un combat à mener, et c’est dans la douleur et la solitude qu’elle va le vivre. Le ton est vite donné dans cette série #MeToo qui rentre dans le vif du sujet. On dit souvent que l’amour n’a pas d’âge, pas de couleur, pas de genre etc… Eh bien IMDY nous rappelle que c’est pareil avec le viol : la série vient retravailler la notion du consentement dans sa complexité et son omniprésence. On assiste à différents viols, subis par un inconnu, ou bien par une connaissance, précédé d’un premier rapport consenti, à l’adolescence, dans la communauté gay masculine, avec ou sans pénétration etc… Ainsi on résume l’acte à ce qu’il est : la violation ou la manipulation du consentement d’autrui. Quand on accepte un rapport c’est sous certaines conditions, toute modification qu’on y porte doit elle aussi être soumise à acceptation, sinon c’est un viol un point c’est tout.
La série aborde également d’autres thématiques aussi brûlantes que pertinentes avec toujours autant de justesse et de nuance : le racisme et la manipulation de la notoriété des personnes noires, l’addiction aux réseaux sociaux et le détachement du réel qu’ils procurent, les limites de la wokeness et l’agressivité parfois liée, le bullying à l’école et la cruauté de la sexualité adolescente, l’usage récréatif abusif et nocif des drogues dures… Tant de sujets complexes de la génération Y, traités avec brio. IMDY nous montre par exemple qu’il n’est malheureusement pas nécessaire d’être homophobe ou transphobe pour créer des situations qui le sont. Certains personnages vont involontairement, par maladresse et ignorance, avoir des propos blessants, clichés ou hostiles aux personnes LGBTQ+. Il en va de même avec le racisme : les questions sur les cheveux et les origines ne sont pas seulement de la curiosité mal placée mais bien des phrases qui, sans être injurieuses, font ressortir la différence de manière péjorative et vont à l’encontre de l’égalité. La série vient remettre les points sur les i avec son style unique oscillant entre pédagogie et intransigeance et on l’en remercie.
Et l’une des forces de la série c'est justement de ne jamais tomber dans les clichés : chaque minorité, chaque métier et chaque action a son double -souvent à quelques épisodes d'écart. Un procédé simple, aussi bienvenu que nécessaire qui évite les généralisations. On voit deux jeunes écrivains qui tentent de percer, l’un élitiste et méthodique, l’autre populaire et critique ; les deux sont finalement complémentaires et apprennent au contact de l’autre. On voit aussi divers enquêteurs tantôt emphatiques et impliqués tantôt gênés voire incompétents. La pluralité des représentations permet à la série de dénoncer des situations imputables à un système et ses coutumes, dont découle un cadre souvent nuisible aux minorités. Les personnages ne sont pas foncièrement mauvais et se rapprochent souvent de Monsieur ou Madame Tout le monde, mais leurs comportements n’en demeurent pas moins condamnables et ce n’est plus aux victimes de culpabiliser.
Pour lire le reste de la critique et découvrir d'autres séries proches c'est par ici :
https://amauryboat.substack.com/p/1-critique-i-may-destroy-you-pourquoi