Invincible me laisse sur me faim. Sur le plan technique, la série est en-dessous des standards actuels en animation, qu'il s'agisse de l'image ou du son. Pourtant le casting est de qualité, avec des grands noms et des belles voix (Steven Yeun, J.K. Simmons, Sandra Oh, Gillian Jacobs) mais l'exécution est bancale. Certes, les dialogues ne sont pas exceptionnels, néanmoins ils sont gravement desservis par un jeu d'acteur faiblard et parfois à côté de la plaque. Visuellement, c'est mou et statique, avec des efforts concentrés sur les scènes de baston dont les enjeux sont malheureusement plutôt faibles.
Sur le fond, la série se cherche beaucoup. Il y aurait plein de choses à dire sur la condition de « super-héros », la responsabilité, le risque que posent des êtres humains capables de se transformer en armes de destruction massives. Mais Invincible peine à tracer sa voie. On alterne entre questionnements existentiels dans une origine story vue et revue, romances adolescentes sans grand intérêt et scènes chocs dont la raison d'être semble être de tenter de rendre la série adulte.
Narrativement je trouve que Kirkman se prend régulièrement les pieds dans le tapis. Certes, il n'épargne rien à ses personnages, qui souffrent en permanence face à une vie qui est loin d'être aussi rose que dans les comics. Pour autant, une partie de cette souffrance est complètement gratuite. Les blessures physiques ont peu de conséquences, grâce à la magie de la « médecine du futur high-tech » qui permet de tout réparer. Les questionnements sur la place des héros est abordée maladroitement via Omni-Man, le père du héros, qui oscille entre allié et antagoniste sans que Kirkman ne parvienne à trancher.
Le scénario tient d'ailleurs un double discours assez complexe autour du fait de tuer. Dans la saison 1, Mark est gravement traumatisé par le fait d'avoir (involontairement) tué des innocents. Pourtant, les super-héros en général ont une approche assez brutale qui est susceptible de faire d'importants dommages collatéraux et personne d'autre que Mark ne remet en question cette possibilité. Le semi arc de rédemption amorcé par Omni-Man dans la saison 2 ne présage rien de bon : Omni-Man est sauvé par le « pouvoir de l'amour ». Dans le même temps, le début de la saison 3 montre Mark s'opposer frontalement à Cecil et le GDA qui réforment d'anciens super-vilains. Cecil pointe justement du doigt que Mark refuse aux autres la clémence qu'il a accordé à son père. Je ne sais pas comment Kirkman compte résoudre cet arc narratif mais jusqu'à présent, tous les arcs se sont résolus de la manière la plus simple possible (Mark est en couple avec une super-héroïne ce qui règle les problèmes d'identité secrète, Debbie a accepté Oliver malgré ses réticences, etc.).
Ma dernière critique concernant le scénario est le power scaling. Dans l'ensemble, les capacités des super-héros fluctuent énormément d'un épisode à l'autre. Invincible est aussi faible ou fort que le scénario le veut selon la scène, ce qui sabote la cohérence interne du récit. Ce ne serait pas un problème si la série ne prétendait pas montrer une face plus réaliste des super-héros et les conséquences de leur existence dans un monde proche du notre.
Dans l'ensemble, je trouve les critiques complaisantes avec la série. C'est une adaptation passable d'un comics pour jeune adulte qui a du mal à dégager un message clair. Difficile de mettre une bonne note dans la mesure où la réalisation accumule les défauts. Et non, faire une blagounette sur la qualité de l'animation dans la saison 2 n'excuse pas la faiblesse de l'image de la série.
En résumé, du potentiel mais largement inexploité. Un peu comme le personnage titre, finalement..