!!! Attention SPOILS !!!
Voilà qu'en deux jours je finis Katanagatari. Et pourtant : le scénario épisodique de la recherche d'épées, l'intrigue qui tarde à vraiment s'installer, un deuxième épisode presque ennuyant, le regret que les éléments ne soient pas développés plus tôt... Alors comment expliquer une si bonne surprise ? D'où vient ce sentiment d'accomplissement qui nous accompagne vers la fin et nous porte sur une vague de réflexions profondes ?
On comprend rapidement que cette œuvre ne réside ni dans les combats ni dans le suspens. Ce sont les personnages, les dialogues et les interférences qui sont le socle de Katanagatari.
Et pour cause : on commence avec Yasuri, un personnage brute, hors de la civilisation, vivant sur une île isolée et dont l'existence de l'âme serait presque à douter tant sa parole et ses gestes sont machinaux...
Et là, la rencontre. Notre héros se retrouve projeté dans le monde par Togame, sans même que celui-ci ne sache vraiment pourquoi. Il suit les instruction de ce nouveau personnage qui dans sa vie fait l'effet d'une bombe. Le voici parti sur les quatre chemins dans une quête initiatique où les sabres n'ont presque qu'une importance secondaire.
Le parcours que Yasuri mène, avec ses hauts et ses bas, nous amène à nous poser des question sur la morale, le sens des mots, l’accomplissement des actes et le sens de la vie (au bas mot !) .
On revient ainsi sur le vrai enjeu de l'histoire : les personnages et leurs évolutions.
Hors, la multitude de thèmes gravitant autours de la progression de nos héros ne serait que partiellement intéressant si l'on ne parlait pas du moteur de l'intrigue : l'échec.
Tout est voué à l'échec dans cet animé : vous pouvez encore y réfléchir, rien ne réussi.
Tous les enjeux initiaux sont ratés. Au niveau du scénario d'abord, comme la quête des sabres qui s'avère être vaine, la modification de l'histoire qui échoue bien que le shogun soit tué, le fait que Togame n'atteigne jamais ses objectifs (qui pourtant sont le cœur de l'histoire !). Et au niveau des personnages, c'est presque pire (ceux-ci étant la pierre angulaire de l'animé, c'est fort). Seulement quatre personnages vont survivre sur tous, l'amour, la compassion et plus généralement les sentiments humains sont mal interprétés, mis en échec, comme incompatibles... Et quand je vous parle des personnages et du scénario qui échouent dans leur aspiration, cela va même plus loin et s'attaquer jusqu'à l'univers même de la série qui perd notre confiance. Le destin lui-même est renversé, les prédiction ne s'avèrent ni fausses ni justes.
Et cet à-peu-près est partout dans la série : qu'en est-il de la relation entre Yasuri et Togame ? Il est non-assumé et finira même par être décomposé en relation de manipulation qui elle-même échouera à aboutir vu que Togame n'arrivera pas à rejeter son amour. Une boucle sans fin. On pourrait voir partout dans cette série une malédiction qui détournerait et ferait échouer tout acte, toute aspiration à la grandeur ou toute perfection. Rien n'est sacré, rien n'est abouti.
Et dans ce chaos sans nom, on voit finalement émerger la réponse : Yasuri. Le voilà sorti de la mort de sa bien-aimée, complètement sorti de sa chrysalide après 11 épisodes. Fini les comportements machinaux et la faiblesse d'esprit. La dernière leçon de Togame passée, voilà que notre héros dépasse ses échecs, reprend revanche sur son passé (très bien illustré par la montée dans la tour) et fini par exister par lui-même. C'est une réelle ascension qui dévoile à la fois la force de ce personnage (mentale et physique) ainsi que la portée du message de l'auteur.
La montée en puissance de notre héros n'est que contraste avec toute l'imperfection dont il est issu : Yasuri est humain. Certains raccourcis un peu rapides nous amèneraient à y voir un héros de l'absurde dépassant sa condition et existant par lui même. Le voilà en dernière scène partant découvrir le monde et disparaissant de la scène ne laissant derrière lui un Japon sauvé par ses actes de l'invasion étrangère (ou non ?).
S'élever pour mieux vivre, on assiste à une magnifique leçon d'humanisme et de recherche de sens à sa vie. Et c'est beau.