Kids On The Slope est un anime fait par l’immense Shinichiro Watanabe, connu particulièrement pour avoir fait deux œuvres primordiales dans l’évolution de l’anime : Cowboy Bebop et Samuraï Champloo. Bien loin d’avoir tant de prétention, Kids On The Slope s’éloigne pas mal de ses deux ainés qui bien qu’eux même assez différent, avait une certaine vision commune de l’anime, pour donner quelque chose de bien plus courant, mais pas forcément moins qualitatif.
Moanin’
Car si ses deux prédécesseurs se démarquaient notamment par leurs univers originaux, et leurs histoires épisodique, ici c’est tout l’inverse car on se trouve dans un slice of life adolescent et feuilletonesque, où il sera avant tout sujet d’amitié, d’amour et de passage à la maturité. Rien de nouveau sous le soleil donc, et là où on aurait pu penser que le jazz aurait une place de choix dans les thématiques, ce n’est pas tant le cas. Car, on s’aperçoit bien vite qu’on est plus là dans un anime de construction de soi et de romance avec un peu de jazz en toile de fond, qu’autre chose. Mais je n’irais pas jusqu’à dire que le jazz n’est qu’un prétexte ou un thème superficiel afin de rendre l’anime un peu plus original, et je développerai ça un peu après.
Commun, Kids On The Slope l’est aussi plus ou moins dans son histoire, qui utilise des artifices aussi vu et revue que la famille explosé, le triangle amoureux, le loisir pour transcender son manque de confiance en soi, etc… Car il faut bien avouer qu’on se doute de ce qu’il va arriver aux différents personnages dans la majeure partie des situations, j’en prends pour preuve l’amourette Yurika/Junichi qui est surement la plus cousue de fil blanc.
Et là vous devais surement vous demander comment j’ai pu mettre 8 à cet anime, avec une telle introduction. Et c’est justement là toute la magie de l’œuvre. Car si tout ce que l’on voit sent le déjà-vu et le scenario stéréotypé, ce n’est pourtant surprenamment pas un défaut. Car au lieu d’être un anime creux qui se raccroche à quelques trames connus de tous pour faire plaisir au moins exigeant d’entre nous, Kids On The Slope n’oublie pas d’être un anime vivant. Malgré le fait qu’on se sent suivre des ficelles déjà connue, l’anime est suffisamment cohérent, profond et avec des personnages crédibles qu’on en oublie presque que l’on est dans une fiction et pas une véritable histoire. Cette impression est tellement bien faite, que même si on sait où on va, on ne peut s’empêcher de redécouvrir certaines situations avec le plaisir intact de quand on les a vu ou vécut pour la première fois. C’est peut-être aussi dût au fait que l’anime a la bonne idée de ne pas tomber dans des pièges récurent de la concurrence : ici pas de moment forcé comme des « séquences humoristique », des « séquences émotion », des « séquences kawaï » ou autre. Bien sur l’anime nous fait passer par pas mal d’émotion (dont ceux dites juste avant), mais il est assez subtile pour ne pas y aller au marteau-piqueur, et séquencer ça par scènes, ainsi les discussions font plus réalistes et surtout plus touchantes.
La réalisation est d’ailleurs totalement dans ce sens, car elle nous incite plus à nous focaliser sur les détails afin de comprendre un peu l’histoire et l’évolution entre ses personnages, plutôt que de le dire explicitement, ou en faire des caisses. Un détail amusant est aussi que j’ai mis énormément de temps à comprendre que ce récit était dans le passé (fin des années 60 pour être précis), tant c’est très peu appuyé. En fait, si on croit au fait qu’il peut y avoir de tel fan de jazz en 2016, et qu’on enlève 2-3 marqueurs temporelles du milieu de l’anime, on peut totalement croire à une histoire contemporaine, tant elle se focalise sur quelque chose de bien plus profond et personnel que de simple objet superficiel.
Et ceci est surement l’une des plus grandes qualités de l’œuvre, sa subtilité et son aspect réel vont d’ailleurs en faire découler d’autre qualités comme l’implication que l’on ressent dans les épisodes (personnellement je n’ai pas pu décrocher avant d’avoir fini les 12 épisodes, et j’avais pourtant commencé à regarder ça plutôt tard, d’une certaine manière ça m’a fait le même effet que pour The Office (US)) ou l’attachement immédiat qu’on a pour les personnages.
Someday My Prince Will Come
Car évidemment, comment pourrais-je parler de Kids On The Slope sans faire une partie sur ses personnages. Là aussi, si ils sont loin de briller par leurs originalités, j’ai été assez surpris de voir comment quasiment tous les personnages un peu développé pendant l’anime m’ont touché par leurs authenticité et leurs actions. C’est surement la première fois que je me suis sentie autant en symbiose avec des personnages d’anime.
D’ailleurs, chose intéressante, comme dans tout anime slice of life qui se respecte, il y a pas mal de moment où les personnages principaux font des erreurs, que ce soit par faiblesse, fierté, jalousie ou autre. Et alors que ce sont justement ce genre de scènes qui sont assez pénible d’habitude, car elles donnent une impression de surplace et de remplissage, ici j’ai toujours trouvé ça très cohérent et crédible avec le développement qu’ils ont eu avant. J’irais même jusqu’à dire qu’elles sont vitales car ma compassion pour eux était telle que toute ces scènes de chute pour se relever renforcent encore plus cette symbiose avec les personnages. On a ici un anime qui est une parfaite synthèse de ce que peut être l’adolescence, des différents chemins que l’on peut prendre, des différentes situations auxquelles on peut être confronté. Et là-dessus, je trouve que cet anime rejoint 2 de mes œuvres préférés : Six Feet Under et Lorsque nous vivions ensemble. J’ai vraiment l’impression que l’anime est arrivé à capter toute l’essence même de ses personnages à un âge donné, ce qui donne une profondeur et un attachement à l’œuvre remarquable.
Pour ce qui est des personnages en tant que tels, je trouve que le trio principal + les deux de l’autre amourette périphérique, sont de très bons personnages. Bien sûr, j’ai surtout beaucoup apprécié Sentaro, une sorte de « brute » au grand cœur, et qui a parfois un peu de mal avec sa fierté. C’est peut-être le personnage que j’ai trouvé le plus original d’entre tous et surement l’un des plus complexes. Mais les autres sont aussi assez intéressants, et comme je l’ai dit juste avant sont tellement attachant qu’on entre totalement dans leurs psychologies.
My Favorite Things
Et bien sûr, je ne pouvais pas faire une critique de Kids On The Slope non plus, sans aborder la musique. Du point de vue de l’OST, elle est, comme chaque anime de Watanabe, excellente. En général, les deux grandes forces des OST de ses animes sont pour moi, qu’à la fois elles sont très plaisantes à écouter « sans l’anime », mais en plus certaines chansons se trouvent transcendé par leurs utilisations dans certaines scènes. Ainsi, pour prendre exemple sur Cowboy Bebop, il m’est très dur aujourd’hui d’écouter Rain sans penser à la scène de l’église, ou alors Space Lion sans imaginer ce travelling verticale qui partait d’une planète pour se perdre au fin fond de l’espace à la fin de Jupiter Jazz. Et ici, ces deux qualités sont bien sûr aussi présentes. Car à la fois l’OST est plein de chanson vraiment chouette comme Sakamichi no Melody, Moanin’, My Favorite Things, … mais vu que la plupart de ces musiques sont utilisé de manière in (c’est-à-dire que c’est les personnages eux-mêmes qui la jouent), il y en a pas mal qui font tout de suite penser à de grande scènes de l’anime, et surtout arrivent à restaurer cette ambiance si fragile qu’a l’anime. En fait, seul l’ending, un peu mièvre, vient ternir cette OST de grande qualité.
Mais ce n’est pas la seule chose à dire sur cette OST. Car si dans Cowboy Bebop et Samuraï Champloo, elle servait surtout à caractériser une ambiance ou une scène, ici la musique a un véritable rôle. Mais pas comme thématique, comme je l’ai souligné en début de critique, car ce n’est par exemple pas un Shonen musical, où le but est de faire de concert et être le meilleur groupe. La musique ici n’est pas vraiment une finalité, et même si il y a quelques évènements qui utilisent un peu la musique comme objectif (le concert dans le bar américain, et la fête de l’école), son utilisation est bien plus intelligente que ça. Car à l’instar d’un Whiplash, Kids On The Slope ancre parfois la musique dans l’action : elle n’est donc pas un prétexte mais un moyen d’avancer. Ainsi, on verra plusieurs fois la musique être utilisé afin de faire évoluer des mentalités, ou de faire se comprendre des personnages qui n’ont pas forcément grand-chose en commun. Et c’est peut-être ce que l’anime fait de plus beau. Voir Kaoru et Sentaro se réconcilier par la musique (scène ô combien cliché, mais tout de même très authentique) ou Sentaro et Junichi régler leurs comptes dans un bœuf est quelque chose qui touche à l’absolu. Arriver à faire partager des émotions par la musique et non par les mots est toujours un pari risqué, mais quand il est réussi, c’est toujours bien plus profond que n’importe quelle longue discussion. Et cet anime y arrive extrêmement bien.
But Not For Me
Je n’irais néanmoins pas dire que l’anime est sans défaut. Il a des qualités exceptionnelles, mais certaines choses m’empêchent de lui mettre plus. Déjà, je trouve que l’anime parle de tellement de chose, et fait traverser tellement de situation, que certains arcs narratifs n’auront aucune conclusion. Par exemple, celui de la mère de Kaoru n’aura plus aucun écho une fois l’épisode terminé. Après, je pense que avoir mis des choses inutiles ou juste passager et aussi une volonté de vouloir rendre le récit plus crédible et réel.
La fin est aussi plutôt particulière. C’est une bonne idée, assez originale et qui apporte pas mal de bonne choses, mais je la trouve tout de même assez perturbante, voire carrément déprimante sur certains aspects.
Mais ce ne sont pas des défauts bien graves, et je pense vraiment que Kids On The Slope mérite votre visionnage. C’est un anime profond et dense, à un tel point que malgré cette critique assez longue, je n’ai pas pu aborder tous les angles d’attaque voulue (par exemple je n’ai pas beaucoup parlé des différentes amourettes, et des évolutions qu’elles apportent), et cela malgré le fait qu’il ne fasse que 12 épisodes. D’ailleurs qu’une œuvre arrive à donner autant de choses dans un temps restreint est pour moi la marque de la grandeur. Et c’est comme ça que je voulais finir d’en parler, Kids On The Slope est une œuvre simple, honnête et modeste, mais elle contient en elle ce petit supplément d’âme qui la distingue des autres, et en fait une des meilleures du genre.
Edit: La note est maintenant de 9, car je n'ai pu me résoudre à mettre "juste" 8 à un coup de cœur pareil.