En 2011, FX lance Lights out, une série avec en toile de fond, l’univers de la boxe, annulée au bout d’une saison, malgré sa qualité, mais l’audience n’était pas au rendez-vous. Deux ans plus tard, Showtime mettait à l’antenne, une série fortement influencée par Lights out, avec de nouveau la boxe, une famille dysfonctionnelle, mais avec en tête d’affiche Liev Schreiber, plus charismatique et reconnu que Holt McCallany. Le succès est cette fois-ci là, ouvrant la porte à Kingdom, la première série originale de Direct TV.
Kingdom reprend les mêmes ingrédients : un univers viril et violent; mais avec le MMA (Mixed Martial Arts) à la place de la boxe, dans un contexte familial compliqué. Mais à première vue, le casting est moins impressionnant. Dans Lights out, Stacy Keach était la figure paternelle, un homme veuf, en proie à l’alcool. Dans Ray Donovan, on retrouve Jon Voight sortant de prison, un arnaqueur dénué de conscience, honni par son fils Liev Schreiber.
Ici, on retrouve Frank Grillo, découvert dans le film Warrior, au sujet similaire à la série. Un acteur physique, ancien boxeur amateur, une gueule que l’on retrouve dans Captain America 2 et American Nightmare 2. Il est plus proche d’Holt McCallany, que de Stacy Keach et Jon Voight. Un nom pas encore reconnu, mais qui porte sur ses épaules cette création de Byron Balasco. Il a déjà diverses séries à son actif, en tant que scénariste : Huff, FBI-portés disparus, FlashForward, Happy Town et Detroit 1-8-7, puis en tant que créateur : Westside et donc Kingdom. C’est fort de ses nombreuses expériences, qu’il se lance dans ce drame familial.
Une série à l’atmosphère sombre, aux personnages torturés, où les corps sculptés cachent des blessures plus profondes, que la violence des coups reçus, à l’entrainement, et dans la cage. Cette cage, élément central ou la rage et frustration de chacun s’exprime, tels des animaux emprisonnés attendant que le gibier y pénètre, pour une mise à mort digne d’un corrida. Cette violence contenue, refoulée, ressortant parfois sous l’influence de l’alcool, délie aussi les langues, et est souvent plus percutante, qu’une droite à la mâchoire.
C’est dans cet univers, que débarque Ryan Wheeler (Matt Lauria), ancienne star de MMA, avant de péter les plombs et de passer 4 ans en prison. Un homme plus proche de l’animal, le loup dans la bergerie, celui qui va mettre à mal l’équilibre fragile dans la salle, mais surtout dans le couple Alvey Kulina (Frank Grillo) et Lisa Prince (Kiele Sanchez), son ex. Alvey Kulina devant aussi composer avec sa difficulté d’être père, auprès de ses deux fils Jay Kulina (Jonathan Tucker) et Nate Kulina (Nick Jonas). Le premier est un talentueux combattant de MMA, mais une tête brûlée, tout le contraire du second, en pleine ascension, au calme apparent. Ils suivent les pas de leur père, ancien champion de MMA. Un héritage lourd à porté, surtout avec un autre retour, celui de leur mère Christina Kulina (Joanna Going), devenue une prostituée et toxicomane.
La qualité de la série, tient par sa réalisation, caméra à l’épaule, collée aux visages et aux corps, en style documentaire, avec une lumière et une photographie réussies. A son casting, où chacun semble porté l’autre vers le haut, d’abord par le biais d’une métamorphose physique impressionnante. Matt lauria en tête, inoubliable Luke Cafferty dans Friday Night Lights. Jonathan Tucker, un habitué des séries avec The Black Donnellys, Ro et Parenthood. Nick Jonas, ancien membre du groupe de pop-rock Jonas Brothers. Ces trois acteurs réussissent à faire oublier leur passé et à camper des combattants de MMA crédibles. Leurs performances sont impressionnantes, mais elles ne sont pas seulement physiques, Kingdom reste avant tout un drame, même si des combats réalistes et bien chorégraphiés, ponctuent certains épisodes. Dans ce monde d’hommes, où règne aussi Frank Grillo. les femmes ne sont pas en reste, Kiele Sanchez faisant doucement oublier son joli minois, devenant tout aussi dure, qu’eux. Joanna Going, en mère démissionnaire, aux rapports ambigus avec son mari et ses enfants.
Une famille qui semble emprisonnée dans ce milieu, comme Matt Lauria, passant de sa cellule, à la salle de sport, puis à la cage, toujours enfermé, dont le seul exutoire est le combat. Kiele Sanchez, victime consentante, aussi en rupture avec son père. Cette figure du père, qui dicte les actes de chacun, hommes comme femmes. Une influence néfaste, où le bien semble avoir disparu de cette salle vétuste de Venice Beach.
Kingdom est une bonne surprise, un drame réussi, aux dialogues épurés, évitant les artifices, mais sombrant parfois dans la facilité, pour mieux rebondir, en prenant des chemins insoupçonnés. Un pari osé et réussi, mais surtout, la série est renouvelée pour deux saisons, face au succès critique.