Quand l’énigme devient un art et la pipe une arme de déduction massive

Les Aventures de Sherlock Holmes (version ITV, 1984) n’est pas juste une adaptation classique des célèbres récits de Conan Doyle, c’est comme si tu rentrais dans un vieux manoir anglais et que tu t’y retrouvais enfermé avec le détective le plus brillant, mais aussi le plus excentrique, de l’histoire de la littérature. Jeremy Brett, dans le rôle de Sherlock Holmes, ne se contente pas d’incarner le célèbre détective : il en devient littéralement l’incarnation vivante, la pipe au coin des lèvres, le regard perçant, et cette touche de folie qui te fait te demander s’il ne pourrait pas aussi résoudre le mystère de tes clés perdues à distance.


L’une des premières choses qui frappe dans cette version de Sherlock Holmes, c’est la fidélité presque maniaque aux textes originaux. Chaque épisode est un hommage aux récits de Doyle, avec une attention aux détails qui frôle l’obsession. Les dialogues sont ciselés, les intrigues brillamment construites, et les reconstitutions du Londres victorien te transportent littéralement dans une autre époque. C’est un peu comme si les pages des livres de Doyle avaient été projetées sur l’écran sans passer par le filtre de l’adaptation moderne : ici, tout est authentique, tout est so British, jusqu’à l’odeur du tabac de pipe et des pages jaunies.


Mais là où la série ITV se distingue vraiment, c’est dans son interprétation de Sherlock Holmes par Jeremy Brett. Ce n’est pas juste un détective brillant. C’est un personnage excentrique, imprévisible, parfois effrayant dans son intensité. Brett nous donne un Holmes qui oscille constamment entre la pure génialité et un brin de folie contrôlée. Il n’est pas là pour résoudre des crimes avec le sourire, non. Il les dissèque, il les démonte avec une précision quasi chirurgicale, et chaque déduction te laisse autant perplexe qu’admiratif. Tu le regardes en te demandant : est-ce que c’est un génie ou un fou ? Et la réponse, bien sûr, c’est un peu des deux.


Visuellement, la série ITV mise tout sur l’authenticité. Les décors sont à la hauteur des romans de Doyle : des rues londoniennes embrumées, des manoirs victoriens sinistres, des appartements aux meubles de bois sombre et aux bibelots poussiéreux qui semblent sortis d’un musée d’époque. On a l’impression que chaque recoin du 221B Baker Street pourrait receler une énigme supplémentaire. Et que dire des costumes ? Le style vestimentaire de Holmes, avec son célèbre manteau et son chapeau de chasse, est rendu à la perfection. Mais là où les autres adaptations s’arrêtent à l’apparence, celle-ci s’intéresse aussi aux nuances : Holmes n’est pas juste un homme bien habillé, il est un homme torturé, complexé par sa propre intelligence, et souvent incapable de comprendre les émotions humaines qu’il observe avec un détachement presque scientifique.


Quant à Watson, interprété par David Burke puis Edward Hardwicke, il n’est pas ici réduit à un simple faire-valoir pour le génie de Holmes. Watson est un personnage à part entière, loyal, parfois dépassé par les événements, mais toujours capable de ramener Holmes à la réalité lorsque ce dernier s’égare dans ses propres pensées labyrinthiques. La relation entre les deux hommes est l’un des piliers de la série : un mélange de camaraderie, de respect mutuel, et parfois d’incompréhension. C’est cette dynamique qui fait que la série fonctionne si bien. Watson n’est pas juste un observateur passif, il est la boussole morale qui guide Holmes dans ses moments les plus sombres.


Les intrigues des épisodes, basées sur les nouvelles et romans de Doyle, sont tout simplement fascinantes. Chaque enquête est un casse-tête complexe, rempli de fausses pistes, de personnages ambigus, et de retournements de situation dignes des meilleures thrillers. Mais là où la série ITV excelle, c’est dans sa capacité à rendre chaque mystère profondément humain. Les criminels ne sont pas des génies du mal, ce sont souvent des personnes ordinaires poussées à l’extrême, et chaque enquête est une plongée dans les motivations les plus obscures de l’âme humaine.


Musicalement, la série ne déçoit pas non plus. Le générique est devenu aussi iconique que la silhouette de Holmes lui-même, et chaque note semble nous plonger un peu plus dans l’atmosphère sombre et mystérieuse de l’époque. Les musiques d’accompagnement, elles, oscillent entre des moments de tension presque insoutenables et des instants de calme réfléchis, où l’on peut presque entendre les rouages du cerveau de Holmes tourner.


En résumé, Les Aventures de Sherlock Holmes (ITV) est bien plus qu’une simple adaptation des romans de Conan Doyle. C’est un véritable chef-d’œuvre de la télévision, porté par un Jeremy Brett au sommet de son art, qui parvient à rendre chaque enquête aussi palpitante qu’une chasse au trésor intellectuelle. Si tu cherches une série qui mêle brillamment mystère, drame humain, et un sens du détail quasi obsessionnel, alors cette version de Sherlock Holmes est faite pour toi. Une aventure dans l’esprit du plus grand détective de tous les temps, à savourer pipe au coin des lèvres et loupe à la main.

CinephageAiguise
9

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le 9 oct. 2024

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