À l'heure actuelle, on n'adapte plus. C'est surfait. Non aujourd'hui, on "s'inspire", on dynamite, on disperse, on ventile. Du coup quand on a vu qu'Omar Sy, un Noir, incarne le nouveau Arsène Lupin dans une série Netflix, beaucoup ont crié au scandale. Qu'ils se rassurent, l'ex-réceptionniste du "SAV des émissions" "s'inspire" du célèbre voleur imaginé par Maurice Leblanc pour incarner Assane Diop, un pro de l'esbroufe qui va échafauder un plan machiavélique pour prouver l'innocence de son père, accusé du vol d'un bijou de collection 25 ans auparavant et qui s'est depuis suicidé.
L'idée n'est pas mauvaise en soi, l'exécution est en revanche maladroite. Autour d'une mise en scène pourtant soignée, d'une photographie impeccable (on est loin de "R.I.S." ou "Léo Matteï") et d'acteurs relativement bien impliqués, c'est surtout dans son scénario que le bât blesse. Pensé comme un pamphlet anti-raciste bienvenu mais terriblement grossier, Dans l'ombre d'Arsène arrive à demeurer autant subtil par moments que caricatural dans d'autres (on se croirait presque dans Yamakasi ou une production EuropaCorp des années 2000). C'est fort dommage car le récit, dans son ensemble, n'est pas si mal écrit et contient même quelques séquences envolées. Quelques séquences seulement.
Entre flics bornés et racistes (sauf un fanât d'Arsène Lupin à qui on ne la fait pas), quidams proportionnellement stupides, bourgeois malveillants et racistes et gosses de riches racistes, les stéréotypes sont légion en dépit de dialogues naturels et d'un acting encore une fois plus ou moins soutenu. D'autre part, les rebondissements capillotractés ne fonctionnent pas toujours, certains étant étonnants, d'autres méchamment ringards. Quant à Omar Sy, s'il incarne avec brio ce magouilleur déterminé capable des meilleures entourloupes devant une multitude de débiles incapables de le reconnaitre (sans déguisement aucun), il peine à demeurer crédible lorsqu'il faut être plus sérieux.
Épaulé par le Britannique George Kay ("Criminal"), le scénariste François Uzan ("Family Business") n'arrive pas à proposer une constance dans ses épisodes, le fil conducteur étant bien mené (quoiqu'un brin lourdingue dans sa structure agrémentée de flashbacks) tandis que la qualité d'écriture varie d'un épisode à l'autre, usant parfois de modernité bien pensée comme de contrecoups éculés. Pas mémorable pour un sou ni vraiment spectaculaire, cette première partie, relecture tout de même finalement mensongère, ne fera pas date au petit écran mais arrive cependant à relever le niveau des récentes productions françaises du genre.