S1e01 L'arrivée
J’ai le souvenir d’une sitcom sympathique, forcément avec des personnages attachants et un ton volontiers moraliste, mais écrite avec une belle justesse parfois, au moins lors des premières saisons (les toutes dernières étaient vraiment laborieuses malheureusement). Impossible de mettre la main sur d’autres saisons qui je crains n’ont tout simplement pas été éditées en dvd, ce qui ne me laisse pas d’être surpris. Alors, comme j’aimais beaucoup cette série lorsque j’étais enfant ou pré-ado, je vais faire l’effort de la chroniquer épisode après épisode.
La revoyure de ce pilote ne permet pas tout à fait d’apprécier la justesse d’écriture de la série. Les épisodes suivants seront beaucoup plus chiadés, mieux structurés, équilibrés. Le pilote n’est pas totalement nul pour autant (il met en place les enjeux avec clarté), mais il manque de dynamisme et de propreté dans la mise en scène. Les enchaînements entre les différentes scènes paraissent un peu secs, sans grande subtilité dans les liaisons.
Surtout, les comédiens ne possèdent pas encore leurs personnages. On les sent empruntés par moments. La direction d’acteur n’est pas au point : ils grimacent trop, forcent le trait. Au final, la subtilité de certaines scènes ne sont pas encore au rendez-vous.
Judith Light apparaît un peu fade, quand Tony Danza en fait des tonnes. Alyssa Milano joue très mal (elle n‘a que 13 ou 14 ans à sa décharge). Danny Pintauro joue aussi mal, mais ce sera constant pour lui qui ne fera pas vraiment carrière. Seule Katherine Helmond sait déjà prendre parti de ce fabuleux rôle de grand mère iconoclaste, sexy et rock’n roll.
Bref, on voit bien que les efforts majeurs sont dans la mise en évidence des éléments caractéristiques de l’éventuelle série (fonction même d’un pilote) qui pourraient donner peut-être de jolis fruits. Pour le moment le pilote n’a qu’un but : convaincre les décideurs de donner une chance à cette production. Le tout est par conséquent rudimentaire, mais se laisse regarder a posteriori avec curiosité.
C’est un épisode bien entendu marquant dans la mesure où il introduit les personnages et donne tout de même deux ou trois avant-goûts des thématiques abordées prochainement : les statuts sociaux chahutés par la modernité, la société américaine bousculée et la famille traditionnelle bouleversée. Avec cette histoire de femme grande patronne d’agence publicitaire qui embauche un homme à tout faire, les rôles sont inversés.
Il ne s’agit pas non plus de faire une représentation révolutionnaire : on est dans un schéma de sitcom très classique, dans sa forme comme dans le fond, avec systématiquement un problème plus ou moins moral qui touche un ou des membres de la famille. Il est résolu par les valeurs traditionnelles qui restent fondamentales : l’amour, la famille, l’honnêteté, la fidélité, la tolérance, etc. Et le tout est enrobé dans un humour de sitcom, toujours présent, percutant sans être trop incisif, jamais méchant.
Même s’il s’agit d’un pilote, où l’on doit donc brasser le plus large possible, on aborde ici l’ascension sociale d’Angela Bower (Judith Light) et les conséquences du flirt qu’elle entretient avec son supérieur hiérarchique. Elle y met fin pour ne pas suspecter une promotion canapé. Comme quoi, d’entrée, le problème de la femme au pouvoir est posé comme sujet à caution. Au moins la série affronte-t-elle ce cliché sans détour.
De son côté, que Tony Micelli (Tony Danza) soit homme à tout faire chez une femme célibataire est de suite l’autre préoccupation centrale que la série met en avant. Pour Tony Micelli, le regard qu’il porte sur lui-même, mais plus encore par le regard que la société pose sur un homme subalterne, au service d’une femme, la série se penche de suite sur une certaine forme de malaise. Cela reviendra également à de nombreuses reprises dans la saison.
Nous voilà donc avec deux personnages qui ont des rôles à l’époque encore considérés comme a priori pour l’autre sexe. Au milieu d’eux, les deux enfants et la grand-mère viennent faire lien et vont permettre d’enrichir les trames essentielles, les enjeux et les relations entre les protagonistes principaux.
Pour conclure sur ce pilote, la série démarre doucement, prudemment, mais sûrement. Les meilleurs épisodes sont à venir, le temps que les acteurs comme les scénaristes soient sûrs de pouvoir donner libre court à leur créativité.
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S1e02 Brève rencontre:
Il n’aura pas fallu longtemps pour que la proximité entre ces deux personnages n’alimente une trame basée sur l’ambiguïté sexuelle de leur relation. Après le pilote, ce 2e épisode commence par une intrigue où la différence de sexe est primordiale. Bien que le propos ne soit pas encore directement axé sur un éventuel rapport de séduction entre Tony Micelli (Tony Danza) et Angela Bower (Judith Light), il est tout de même question de positionnement, de règles à établir pour qu’un homme et une femme partagent sous le même toit, en tout bien tout honneur, ou du moins qu’un semblant d’intimité soit maintenu.
D’ailleurs, Tony exprime facilement son malaise à faire le ménage de la chambre et de la salle de bain d’Angela. Pudeur, respect, autorité ou attirance potentielle ne sont pas réellement exprimés mais peuvent constituer un ensemble de raisons qui expliquent la gêne des deux protagonistes.
Quoiqu’il en soit, l’épisode est beaucoup mieux écrit que le pilote. Cette fois, les scénaristes ont eu plus de temps. La mise en place des situations est beaucoup plus claire et efficace : le comique de ces scènes profite d’une meilleure assise, c’est évident.
Même si les comédiens continuent de parfois de grimacer un peu trop à mon goût (et perdront peu à peu cette mauvaise habitude au fur et à mesure que la saison avancera, fort heureusement), il n’en demeure pas moins vrai qu’ils paraissent beaucoup plus à leur aise. Sans doute ont-ils pu bénéficier de davantage de temps. L’urgence d’un pilote est derrière eux.
Ce deuxième épisode est très bien équilibré. La mécanique mise en place fonctionne très bien. Comme de bien entendu, comme il s’agit d’une sitcom, la lecture des événements peut être très morale, avec un balancement des valeurs qui renforce les liens de ce nouveau groupe familial que construisent les Bower et Micelli.
Pour ce faire, le personnage de la psy interprété assez mollement par Nancy Lane joue le rôle de catalyseur. Rien de bien original : dans les sitcoms, les psys sont souvent décrits comme des personnages falots, pédants condescendants, imbuvables et finalement complètement marteaux, mais qui au final aiguillonnent par l’orgueil le meilleur des héros. On l’a vu ailleurs. Le scénario applique la recette, peut-être pas avec une grande subtilité. Ce qui est bien normal : la caricature donne toujours cette impression de portrait un peu grossier.
Mais ce qui compte ici c’est la complicité naissante et émouvante de Tony et Angela, que l’on sent vraiment sincère. Je ne sais pas si elle était déjà forte en dehors des plateaux, mais le jeu des deux comédiens semble très naturel. Un bon petit épisode.
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