Créée par Stewart Harcourt et mise en scène par Ashley Pearce et Jon East pour ces deux premiers opus, «Maigret tend un piège» et «Maigret et son mort», un Maigret joué par des anglais, tourné en Hongrie, et notre Commissaire qui reste définitivement «international».
Si la personnalité de Maigret est réussie, homme mutique, à la réflexion intérieure et tenace, cela vaut par la performance de Rowan Atkinson, qui contre toute attente se révèle tout à fait à l’aise pour incarner le fameux personnage créé par Simenon. Tout en retenu -et ce n’est pas peu dire-, son côté casanier et heureux en ménage, est assez bien retranscrit dans son rapport avec son épouse, confortée par Lucy Cohu en Madame Maigret, femme au foyer aimante, à l’image des épouses de cette époque, qui s’en oublieraient presque. Compréhensive et disponible, pour un Maigret en prise au doute constant. Tenue vestimentaire, gestes à l’économie, chapeau et pipe, évidemment, nous brossent un Maigret crédible. On le suit sur le terrain, comme il se doit, accompagnant ses hommes sur les lieux du crime. Le rapport à la ville qu’affectionne Simenon, pourra être décevant. Si Maigret aime à se balader dans sa ville, à côtoyer le monde grouillant, ici peu de pérégrinations sur les quais ou autres lieux préférés de Maigret, peu de réflexion lors de longues ballades. La série en oublie également une certaine finesse de dialogues, même si quelques touches d’humour sont bienvenues, l’ensemble reste flegmatique et Maigret est quelque peu absent, ses rapports avec son équipe, ses supérieurs et sa capacité à être à l’écoute des gens qu’il rencontre, sont légers...Quelques vélléités de bonté font leur apparitions dans quelques scènes très courtes. L’intuition, l’observation, la capacité de l’homme à saisir les lieux et les ambiances nous font plutôt penser à un Maigret proche du « commissaire Adamsberg » de Fred Vargas. La ville, ses rues, les allers-retours de Maigret entre "le 36" et son domicile, ses deux lieux de vie, ou encore la faune urbaine et les travailleurs, ne sont pas ce que l’on retiendra, pourtant propres à l'environnement de Maigret.
Dans le premier opus, le tueur, jeune homme invisible et insaisissable, parfaitement joué par Alexander Campbell, n’apportera pas grande tension. On retrouve la marque distinctive du tueur en série : celle d’un homme à l’enfance traumatique et qui permettra à Maigret de tendre «son» piège et finalement de venir à bout d’une situation qui lui échappe. Sans nous offrir une réelle réflexion, en oubliant de mettre en avant les ressorts de l’enquête et une résolution théâtrale, renforcent l’idée que les intrigues servent plutôt les acteurs et les ambiances, que l’enquête elle-même ou sa crédibilité.
Le second épisode se révèle plus prenant, croisant deux intrigues. Une enquête qui suit son cours, les freins de la hiérarchie et le regard parfois vague de Maigret, pour une mort inexpliquée et des cambriolages violents. Jouant encore sur ses personnages plutôt que sur l’enquête, on reste dans la même ligne, peu d’effet, pas de scène choc, tout est suggéré et s’adressera à un large public. C’est ce qui en fait son charme et nous rappellent ces vieilles séries policières où l’action et les rebondissements étaient quasiment absents et les intrigues peu compliquées.
Avec une reconstitution des années 1950 réussie, cette série, malgré un léger manque de dynamisme et un rythme vacillant a du charme. Aidan McArdle dans le rôle du Juge est remarqué malgré le peu de présence, Shaun Dingwall et Leo Staar qui interprètent les inspecteurs Janvier et Lapointe, sont les supports indéfectibles de Maigret, Mark Heap pour le professeur Lissot, ou encore Fiona Shaw, dans le rôle d’une mère pour le moins excessive, jouent tous justes et permettent aux deux épisodes de se tenir par tous les seconds rôles (anglais et hongrois) et par cette ambiance surannée et nostalgique.
A regarder pour tous les curieux.