Comment ? C’est quoi cette phrase d’accroche vulgaire ?


Ah bah écoutez vu que Gundam a décidé de devenir une série de guignols, il faut bien que je m’adapte. :p Blague à part, il est possible de se demander avec le recul si la trilogie des robots destructeurs était vouée à suivre la même mutation créative que les films de George Lucas : un premier volet introduisant brillamment son univers de space-opera et ses pilotes dotés de facultés extrasensorielles, un second volet qui allie excellence technique, richesse des personnages et bouleversement des repères pour finalement aboutir à un dernier volet qui signe une vulgarisation de son univers et une infantilisation de son propos. Pas d’Ewoks à l’horizon ; mais une bande de joyeux drilles qui va s’évertuer à faire basculer la série dans un registre comique alors même que la guerre continue de faire rage autour d’eux. Le contraste est d’autant plus violent que ZZ Gundam commet l’erreur de situer son action directement dans la continuité de Zeta Gundam et son dénouement plus que tragique avec des membres de l’Argama, visiblement tous frappés d’amnésie, qui s’amusent à faire les pitres alors qu’ils devraient tous être encore en train de pleurer leurs camarades disparus. Malheureusement, on ne s’improvise pas un génie comique du jour au lendemain et cette composante humoristique suscite davantage la gêne et l’incompréhension qu’elle parvient vraiment à faire rire le spectateur ; seul le méchant, littéralement fleur bleue, parvenait à me faire décrocher un sourire mais il est dégagé comme un malpropre de la série au profit d’une antagoniste pitoyable qui sera elle-même virée plus tard par les scénaristes, visiblement conscients un peu trop tardivement de la médiocrité de leur production.


A cet humour archi lourdingue et maladroit se dessine également une édulcoration éhontée des affrontements : on évite soigneusement de montrer l’explosion des cockpits des pilotes ou la moindre goutte de sang et les rares disparitions des soldats ennemis sont surtout l’occasion de scènes comiques où même la figure iconique du Gundam se voit tournée en ridicule avec des animations franchement embarrassantes. Bref, il n’est pas exagéré de dire que cette première partie de ZZ Gundam aura largement eu sa place dans les programmes du Club Dorothée sans grande nécessité de censure ; enfin, à part les inévitables moments malaisants entre une antagoniste avec du chewing gum dans les cheveux qui ne peut pas contrôler ses orgasmes lorsqu’elle est aux commandes d’une Mobile Suit ( ???) ou la sempiternelle gamine geignarde qui va essayer d’embrasser le héros à la moindre occasion parce que Japon (ce qui aurait probablement donné lieu à une version française truculente pour faire passer tout ça auprès du public occidental). Au moins, la série reste agréable à suivre d’un point de vue technique, même si l’ambition visuelle est bien moindre en comparaison de Zeta Gundam avec des designs de Mechas beaucoup moins inventifs et audacieux dans cette troisième itération. Bref, ZZ Gundam n’est vraiment pas loin de la catastrophe et si je n’avais pas déjà connaissance que la série renouait avec sa grandeur passée à partir de la deuxième moitié, je n’aurais clairement pas persévéré davantage dans le visionnage de cette conclusion inconvenante au premier abord.


C’est pourtant là que réside la spécificité de ZZ Gundam dans le vaste monde de l’animation Japonaise : alors que les audiences de la série s’effondraient inéluctablement, le créateur de la franchise Gundam ( jusqu’alors occupé à superviser le film Char Contre-Attaque) reprend les rênes de tout ce bordel et intègre au forceps la violence psychologique qui a fait les beaux jours des séries précédentes, quitte à contraster fortement avec la tonalité jusqu’à alors amorcée par cette troisième itération de Gundam. ZZ Gundam en devient ainsi un curieux objet télévisuel avec l’une des ruptures de ton les plus éloquentes jamais opérées au sein de ce médium, même si la série s’évertuera à jouer un jeu d’équilibriste en associant sa composante tragique avec un humour jamais vraiment renié (mais toujours plus ou moins maladroit). Pour les plus impatients, sachez que la série commence à renouer avec son intensité dramatique à partir de l’épisode 19 mais qu’elle ne devient vraiment intéressante à mon sens qu’à partir de l’épisode 27, même si commencer directement depuis le milieu du récit entraînera inévitablement une perte d’informations sur les évènements antérieurs à ce basculement émotionnel (pour ma part, je doute fortement que je m’infligerais à nouveau le début de la série dans son intégralité). Malgré ses nombreux écueils, il faut néanmoins avouer que les personnages ne manquent pas de charme ; les roublards de Shangri-La sont assez sympathiques à suivre avec la présence de Judau comme meneur convaincant et différent de ses prédécesseurs tandis que la deuxième partie de ZZ Gundam met également en scène les précédentes générations des séries Gundam dans une continuité vraiment satisfaisante pour le coup des premières péripéties entamées aux côtés d’Amuro et de Kamille. Et il faut bien avouer que Kaman, rescapée de Zeta Gundam, demeure une antagoniste franchement réussie en parvenant souvent à porter sur ses frêles épaules une série souvent marquée par un égarement créatif. Enfin, il y a toujours cette virtuosité dans les affrontements, à présent que l’équipe créative semble sacrément rodée en la matière ; même si la présence d’une Gundam Team annihile quelque peu les enjeux des combats avec une surpuissance évidente du côté des héros, je garderais néanmoins en mémoire cet épisode apocalyptique où les jeunes pilotes s’évertuent à fuir les ruines d’une colonie tombée du ciel ; clairement l’un des duels les plus cataclysmiques de toute la licence.


Un regain de qualité sans doute bien trop tardif pour de nombreux spectateurs (en témoigne d’ailleurs la moyenne sur ce site) mais un rebond qui parvient néanmoins à redorer le blason de cette troisième série, condamnée dès ses premiers épisodes à être le vilain petit canard de la licence. Une série qui suscite autant la sidération qu’elle parvient à insuffler l’enthousiasme chez le spectateur en prenant son public au dépourvu ; une expérience en dents de scie mais plus déroutante que ses grandes sœurs à la structure bien plus maitrisée ; bref à vous de voir si vous voulez considérer le verre à moitié plein ou à moitié vide dans le cas présent.

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le 2 nov. 2023

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Leon9000

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