Mr. Robot est une série américaine produite, depuis 2015, par Sam Esmail.
Primé aux Golden Globes 2016, la série est le premier grand succès de ce jeune réalisateur. Dans une ambiance très sombre, presque asphyxiante, elle nous narre, par épisode de 45 minutes, la vie trépidante du hacker Eliott Alderson.
La principale force de la série Mr. Robot est sa polyvalence. Chaque spectateur y trouvera son compte. Depuis l’utilisateur lambda d’Internet jusqu’au hacker chevronné. Un vocabulaire technique est utilisé (rootkit, code source et autre proxy) mais est il toutefois rendu compréhensible pour nos grands-parents. Le jeune Eliott, mentalement instable, va avoir l’opportunité d’agir pour changer la société et le monde qu’il déteste profondément. La première scène forte de la série chez son psychiatre est symbolique de cette haine couplée au talent d’hacker mais aussi de la capacité exceptionnelle du héros à comprendre les rapports humains qu’il peine pourtant à construire. Nous avons d’ailleurs relevé ici un paradoxe intéressant. Finalement, la réalité des liens tissés sur les réseaux sociaux est questionnée étant donné qu’un expert en la matière tel qu’Eliott est agoraphobe.
Cette série repose sur trois ressorts qui s’entremêlent et qui font sa richesse : les rapports humains du héros, l’importance que le numérique a pris dans nos vies et enfin ce combat pour changer la société capitaliste.
Plusieurs points sont à relever et méritent d’être débattus comme par exemple : le combat pour la moralisation de la société et en particulier le piratage d’E-Corp (dont le logo est fortement inspiré par celui d’Enron).
Ce combat semble légitime néanmoins pour atteindre ce but, le héros devra violer la vie privée de dizaines de personnes. La légitimité du combat moral du héros peut être alors remise en cause. Plus largement, la question de la légitimité du white hacking est posée au spectateur.
Est-il légitime de hacker des personnes ou des entreprises qui font du mal ? Mais qu’est-ce que le mal ? Et qui est légitime pour catégoriser une entreprise comme bénéfique ou néfaste ? Remettre le poids de cette décision à l’appréciation souveraine d’un
hacker tel qu’Eliott ne nous enchante guère, d’autant plus lorsque l’on connaît son instabilité psychiatrique.
Par ailleurs, le numérique semble être un moyen de combattre aujourd’hui contre les excès du capitalisme. Néanmoins certains détails peuvent surprendre dans la façon que l’organisation d’Eliott mène sa révolution. Contrairement aux groupes réels, le groupe d’Eliott comme ceux avec qui il travaille est très centralisé. Autre petit détail surprenant : tout semble hackable dans la série.
S’il est intéressant de renverser le paradigme : « tu mets tout sur internet, on sait tout de toi » par la phrase d’Eliott « je le connais dans sa vie, donc je connais son mot de passe », certaines choses ne sont pas totalement numériques.
Au milieu de la saison 1, Eliott fait sortir un trafiquant de prison en hackant les portes de chaque cellule ainsi que les portes intérieures et extérieures de cette prison. Or aucune présence humaine n’est à signaler et bien plus certaines portes ne sont que mécaniques. Cette scène semble quelque peu irréaliste.
Pour autant, ce qui rend cette série agréable est aussi les nombreuses références au monde du 7ème art avec les films WarGames de John Badham ou Fight Club de David Fincher. L’actualité est également très prégnante, les Anonymous sont souvent représentés et les ombres d’Edward Snowden et Julien Assange planent sur la série.
Le débat sur la surveillance généralisée de nos vies est au cœur de la trame. La facilité du hacking venant aussi de la digitalisation de nos informations. Finalement, Mr Robot participe à la prise de conscience des risques d’une société numérisée. Très ancrée dans les débats qui font l’actualité, son grand succès n’est pas une surprise.