Difficile de comprendre et d'expliquer quels sont les ressorts psychologiques qui ont fait passer cette série de "bof" à "C'est génial! qu'est ce qu'il va se passer ?"
Je vais pourtant essayer de ce pas. Ayant toujours adoré les fables naïves sur la révolution comme "V pour Vendetta" et "Fightclub". Ces deux œuvres en tirent un constat différent, pour fight club la secte des changeurs de monde entraînera l'aliénation/stupidités des individus (le constat de presque tous les épisodes de south park), mais le grand reset à lieu à la fin, parce qu'il faut bien une happy end. Pour V par contre la révolution ou "le grand soir" à lieu grâce au courage du héros qui fait porter son message et est suivie par la masse.
Il est évident que l'on trouve peu d’œuvres qui tentent de créer une dystopie prenant coeur dans le vécue des années 90 à 2015. Comment un héros pourrait-il bouleverser et changer le monde, dans une époque ayant été décrite comme la fin de l'histoire, ou les institutions, le deep state, nos faiblesses psychologiques (décrite dans l'économie comportementale) et la puissance du monde de la finance forme un réseau résiliant, une situation indéboulonnable. Ce mal-être ressenti, complètement actuel semble condamner par avance toute idée et volonté de changement profond, entraînant découragement et apathie à l'image de la figure du personnage principal au début de l'épisode 1. Comment peut-on changer le monde tout pourri de notre époque ? C'est la fable que va nous raconter monsieur robot.
Premier point la série nous donne des figures de héros contemporain qui me touche particulièrement, à l'instar de Laurence Lessig, Edward Snowden, Julian Assange et beaucoup d'autres. Des figures d'insiders qui comprennent le poids politique énorme des outils informatiques et a quel point ils deviennent des instruments de pouvoirs peu à peu hors de portée de nos petites mains (la technologie n'est pas neutre, la façon dont est façonné un outil dépeint aussi la façon de voir le monde de ses créateurs).
Ensuite l'enjeu, le grand reset économique (qui est en fait une variante nerd du grand soir), gagne vraiment à être plus exploité après avoir été esquissé par la fin de Fight Club, surtout après la crise de 2008 qui a dévoilé au grand public le scandale de l'argent-dette.
Enfin même si la série ne se donne ni le temps ni les moyens de traiter ces enjeux, le fait quelle les utilisent comme toile de fond suffit à en faire à me yeux une série moderne qui me parle personnellement. On peut appeler cette toile de fond clairvoyance ou paranoïa, et c'est justement entre ces deux pôles entre lesquels tangue dangereusement le personnage principal.
Évidement, cette série est bourrée de défauts, d'emprunts voyants, de ficelles de showrunner du dimanche, mais merde au moins elle essaye (maladroitement) de me parler d'enjeux majeurs, de continuer à penser la résistance et la rébellion contre les absurdités de notre monde. Elle propose en effet de conjuguer la naïveté de la révolution rapide avec ses conséquences.
Le format série pourra peut-être nous montrer ces conséquences, on ne sait jamais : peut-être dans la saison 2.