Mr. Sunshine
7.8
Mr. Sunshine

Drama tvN (2018)

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Bon bah voilà, à force de le remettre à plus tard, je sentais que j'allais passer à côté, et ma stratégie de ne regarder que des dramas moyens pour ne pas faire de nuits blanches m'a temporairement lassée. Donc, c'est parti pour Mr.Sunshine. Malgré les super critiques, bizarrement, j'étais un peu dubitative. Je ne sais pas pourquoi, quelque chose dans les images de promos me faisait faire la moue. Du coup, j'ai commencé à visionner ça avec un œil critique : en pointant les traits forcés de certains personnages notamment. Il aura fallu quelques images d'une beauté à couper le souffle pour me faire taire.


Je vais commencer par un exemple parfait qui fait echo à l'ensemble : le personnage de Dong-Mae, coréen devenu Yakuza (japonais, donc), joué par Yoo Yeon-seok ... Alors voilà, hein, Yoo Yeon-seok c'était pas tellement mon copain, il avait (a ?) tendance à m'agacer, en plus de ça, il débarque dans la peau d'un personnage aux traits marqués : "je suis un dangereux yakuza qui tranche dans la chair de tous ceux qui m'irritent, je parle avec des mots forts choisis qui fuitent entre mes dents serrées et ma mâchoire fixe, je bloque complètement sur mon passé tropajuste et un amour à sens unique qui me rend dingue." J'avais bien envie d'en faire la bête noire de la série, j'étais prête à tout noter et à rien laisser passer. Sauf que la plupart des plans les plus beaux incluent justement ce personnage. La photo parvient à saisir des regards et des expressions subtiles que je n'aurais pas cru pouvoir percevoir dans ce personnage ni chez cet acteur. Le scénario lui donne la possibilité d'être beaucoup plus complexe que ces quelques traits forcés, notamment par son traitement sincèrement égalitaire envers les femmes (qui rend un réel attachement possible - c'est un exemple d'adelphité* qui dépasse, donc, totalement la notion de sexe), la balance entre son aspect passionnel et son sang froid, entre son aspect traitre et son cœur fidèle... Je crois avoir compris que ce personnage avait été réécrit suite à une controverse sur son rôle peu clair qui oscille entre japonais et coréen à une époque où la différence entre les deux est une question de vie ou de mort, de cruauté ou de liberté... Je ne sais pas comment il avait été écrit en premier lieu, mais je trouve qu'ils sont bien parvenu, justement, à en faire un personnage qui porte tous ces symboles : à travers lui (mais pas que) le système hiérarchique de la Corée est violement critiqué, il est aussi question de traitrise dans les deux sens (il trahis la Corée en prenant l'habit d'un japonais, mais ne cesse également de trahir les japonais - comme il le dit, il n'est pas fidèle au japon mais à ses hommes, il change de camp en fonction de qui va le payer... dans les faits, il reste surtout fidèle à son cœur et fait ce qu'il a envie de faire, il restera vêtu comme un Yakuza du début à la fin, accroché à son paradoxe). C'est un personnage fascinant dont on pourrait parler longtemps (notamment sur le parallèle avec le personnage principal, Eugene. Ils semblent représenter tous les deux la notion de choix, la notion de routes parallèles : d'un même départ, devenus étrangers dans leur propre pays, ils auront deux histoires différentes, mais pas si éloignées, et qui ne feront que se croiser indéfiniment, jusqu'au bout.).


Mais je vais parler d'autre chose, quand même, parce que Mr. Sunshine est une série extrêmement riche. Au delà de la photo dont j'ai encore du mal à me remettre, au delà de la B.O imparfaite mais qui m'a souvent renvoyer des effluves de In the Mood For Love, au delà du rythme si bien mené, jouant sur des plans ni trop longs ni trop rapides en accord avec la scène ... Bref, au delà de la réalisation toute entière qui est teintée d'un sens de l'esthétique tout à fait à mon goût, on a ici un scénario absolument passionnant.


Pour commencer, le contexte historique est vraiment intéressant, car, comme c'est d'ailleurs dit : le monde occidental n'est pas tellement au courant de ce cruel bout d'histoire, finalement assez récent. Alors à première vue on pourrait penser que les traits des vilains japonais colonisateurs et les traitres pro-japonais ont été caricaturés. Mais quand on s'intéresse un peu à la culture et à l'histoire du japon, quand on sait aussi à quel point les guerres et les colonisations ont pu être cruelles partout dans le monde, il m'a finalement semblé que ça pouvait être tout à fait juste. Et ces groupes de personnages "diaboliques" n'empêchent pas l'individu d'exister, même de petits soldats vont agir ou réagir différemment dans telle ou telle situation. (Je n'ai pas eu de sensation de bâclé dans l'écriture des personnages, qu'ils soient secondaires ou simples figurants. Et ça c'est quand même rare.). Scénaristiquement, certains personnages sont un peu délaissés voire oubliés (mais ça n'a que peu d'importance), et d'autres sont juste montrés très rapidement comme ça avec une annonce de leur nom et de leur rôle dans l'histoire, ce qui donne la sensation, quand même, que le drama a été écrit pour des coréens, qui connaissent déjà le déroulement des choses. On peut donc être un peu perdu, ça et là, il faut être attentif aux détails, aux petites phrases qui expliquent, qui piquent tel ou tel pays plus ou moins subtilement. Il y a certains actes dont on ne comprend pas le but ni l'origine. Mais rien de tout ça n'empêche de saisir le propos, de sentir les différents sentiments qui ne trouvent leur place que dans un tel contexte.


Ce contexte, aussi permet quelque chose qui me plait beaucoup : le mélange des langues. J'ai absolument adoré entendre les switch Coréen/Japonais/Anglais, un peu de Français, peut-être aussi une goutte d'une autre langue asiatique lors d'un interrogatoire... Bref, le paradis pour mes oreilles. C'est aussi cette danse de langages qui donne naissance au titre.


Après, pour le choix du fil rouge, j'avoue quand même avoir été un peu gênée par les motivations de ces messieurs... J'ai du mal à trouver crédible qu'une seule femme se trouve la cible de trois amours éternels. Finalement, c'est le personnage de Kim Hui-Seong, en apparence le plus puéril, qui s'avèrera le plus mature et le plus sage : ses raisons pour agir sont multiples et ne se résument pas seulement à protéger la femme qu'il aime. Contrairement aux deux autres... Pour moi c'est ce qui noircit un peu le tableau, il y avait assez de matière pour ne pas donner tant de force à la Romance. Mais c'est mon avis, c'est ce qui a faillit me faire mettre 9, puis je me suis dit que quand même, c'était plus un 9,6 donc on va pas cracher dans la soupe !


Les derniers épisodes secouent pas mal et achèvent sur une note intense (en tout cas pour moi).


Honnêtement, je critique à chaud donc c'est un peu bordélique, mais c'est un drama qui me donne envie de me replonger dans l'analyse. Je n'ai absolument pas le temps, cela dit ! Haha !


*Adelphité = ni fraternité, ni sororité mais les deux en même temps

Zosha
10
Écrit par

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Créée

le 31 déc. 2020

Critique lue 3.6K fois

8 j'aime

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Zosha

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