Diablerie

Cette critique porte sur la série et le film The End et contient des spoilers.

La série

Dans Evangelion, il y a les apparences et la réalité.

La série (comme les personnages) semble faire de son mieux pour paraître normale jusqu'à l'épisode 15 ou le vernis des apparences commence à voler en éclats. À partir de cet épisode, la série s'engage sur une pente raide et tout part littéralement en vrille. On ne peut clairement pas reprocher à la série de manquer d'intensité dramatique.

On ne peut pas non plus lui reprocher de manquer de subtilité, exemples :

- Dans l'épisode 9, Asuka ferme la porte de sa chambre au nez de Shinji en lui disant "Ceci est l'indestructible mur de Jéricho, franchis-le et je t'exécute." Dans l'histoire, le mur de Jéricho est tombé, c'est une manière de lui dire qu'elle veut qu'il fasse le premier pas.

- Dans l'épisode 12, Misato promet d'offrir un steak aux enfants en cas de victoire. Sachant que Misato est pauvre et que Rei ne mange pas de viande, c'est Asuka -que l'on croyait un modèle d'égoïsme- qui propose d'aller manger des ramens, faisant d'une pierre deux coups.

- Dans l'épisode 15, il y a un plan réellement brillant. Lorsque Misato, Ritsuko et Kaji boivent un verre au Q.G de la Nerv, on voit un glaçon flotter dans le verre de Misato, symbolisant son passé (le pôle sud et donc sa relation avec son père) et le fait qu'à cause de celui-ci elle est incapable d'avoir une relation saine avec Kaji. Je trouve que c'est un chef-d'œuvre de mise en scène.

Une petite dose de féminisme pour la route

Non seulement le destin de Shinji est tout tracé avant même sa naissance, mais c'est sa mère Yui qui tire toutes les ficelles et manipule tout le monde, en particulier Gendo et Fuyutsuki, véritables modèles de simps. Fuyutsuki allant encore plus loin puisque qu'authentique modèle de cuck (en plus !). Au début de la série on se demande bien quel peut être l'objectif mystérieux de ces hommes, lorsqu'on l'apprend c'est à mourir de rire.

Evangelion, œuvre féministe ? Absolument.

Le seul moment où Shinji se comporte en homme (épisode 16) il est immédiatement châtié. Comment as-tu pu seulement oser y songer, Shinji-kun ?! Nous sommes en 2015 (dans la série) c'est fini le moyen-âge ! Pensais-tu pouvoir reprendre Jérusalem tout seul, sur ton violet destrier ?

C'est un autre débat, mais... vous vous demandiez avec qui le héros allait finir ? Avec les cheveux bleus, les violets ou les rouges ? Eh bien, non, et je ne parle même pas de l'épisode 24, je crains de ne pas arriver à rester poli. Quel pied de nez de la part des créateurs.

L'occulte

D'après les créateurs de la série, les références occultes ne seraient là que pour donner un côté à la fois esthétique et cool, c'est un gros mensonge puisque tout tourne autour de la kabbale et du concept de tikoun olam ou "réparation du monde".

Une réparation du monde par l'homme, évidemment. Aidé de sa propre création, considérée comme une divinité en soi et à travers laquelle l'homme se divinise lui-même ; la science. Dans Evangelion, l'humanité tente d'évoluer pour devenir elle-même Dieu. L'idée est déjà ridicule, mais le film The End of Evangelion, lui, est franchement malsain.

Malgré les références chrétiennes, Jésus-Christ est bien évidemment absent de tout ce bordel.

Beaucoup de gens se sont éreinté à analyser ces références occultes, quelle perte de temps ! Tout est clair dès les premières secondes du générique : Tel un ange cruel, Jeune homme, tu deviendras une légende.

Un ange ne peut être cruel, à moins d'être un ange déchu et dans ce cas c'est un démon, si ce n'est le diable lui-même. Le machin avec 12 ailes que l'on aperçoit dès le début du générique est une représentation de Samael, aussi connu sous le nom de Satan ou Lucifer. Bref, le diable.

Plus loin dans la série, il est aussi question de Lilith, un démon considérée comme l'épouse de Samael. Dans la série, l'humanité est fille de Lilith.

Dans le film The End, Shinji fait clairement figure d'antichrist, avec tout le côté blasphématoire qui va avec (stigmates, crucifixion, etc.). L'EVA-01 est clairement d'apparence démoniaque.

Dans Evangelion comme dans Matrix, les choses sont à l'envers, les héros étant en fait le mal luttant contre le bien.

L'ennemi n'est jamais clairement nommé, mais c'est Dieu lui-même. L'humanité soutenue par une science diabolique combat les anges du Seigneur pour tenter de prendre la place de Dieu. Evangelion est réellement une diablerie.

La psychologie

Certains pensent que la série est une métaphore de la dépression de son auteur Hideaki Anno, mais il faut savoir que les œuvres individuelles sont très rares au Japon (même si un nom sort du lot).

La série ne parle pas de dépression, mais de perversion narcissique.

Tous les personnages sont cinglés, en particulier les trois principaux : Shinji, Misato et Asuka. Cinglés à cause des traumatismes de leur enfance.

- Shinji, abandonné par son père, n'a quasiment pas connu sa mère.

- Misato, délaissée par son père absorbé par son travail.

- Asuka, abandonnée par sa mère ET son père. Sa mère folle avec sa poupée, son père qui l'abandonne pour se remarier.

Il n'y a pas de famille saine. Qu'il s'agisse de Ritsuko et de sa mère (où est le père ?) ou des camarades de classe de Shinji qui sont tous orphelins.

Asuka est selon moi la véritable héroïne de la série, car elle est la seule à vaincre ses démons intérieurs.

La vraie vie est à l'intérieur de l'être. Personne ne peut mener un combat intérieur à notre place et c'est bel et bien notre âme qui est le vrai champ de bataille de l'existence. Nos actes extérieurs sont toujours le reflet de qui nous sommes à l'intérieur.

C'est à cause de ses traumatismes non surmontés que Shinji est incapable d'aimer ou de faire preuve d'affection à l'égard d'Asuka. À la fin de The End, lorsque Shinji étrangle Asuka, elle lui répond par une caresse. Elle répond à la haine par l'amour. Ayant vaincu ses démons intérieurs et surmonté son passé, Asuka est capable d'aimer, pas Shinji. Shinji se met à chialer dans son nombrilisme tandis qu'Asuka ne peut que déplorer que l'homme qu'elle aime soit incapable de faire sa part du chemin ; "Ça me dégoûte !".

Quant au dernier épisode de la série dans lequel Shinji prend conscience de son droit à être lui-même et a exister, c'est directement lié au traumatisme de l'abandon qu'il a subi. La série se termine sur un note positive pour Shinji, contrairement au film.

Certains pensent que la série s'adresse aux otaku et que le message de l'auteur serait quelque chose comme "Sortez de chez vous".

Si c'était le cas, la série n'aurait jamais connu un tel succès mondial, les otaku n'étant qu'une frange bien particulière et minime de la population japonaise.

S'il y a bien un message à tirer d'Evangelion, c'est celui-ci :

Soyez de bons parents et occupez-vous de vos enfants.