C'était sympa sur les trois premiers épisodes, ces regards et ces tensions silencieuses entre les deux personnages, que la cinématographie plutôt élégante rend palpable, et puis la perplexité de Connell face à la candeur de Marianne, ses grands yeux sous sa frange, les uniformes-cravates, l'accent irlandais...
Et je veux bien admettre qu'il y a quelque chose de juste dans la manière dont la série tente de dépeindre l'équilibre fluctuant des forces en présence dans le couple, et dans l'invraisemblable pudeur émotionnelle qui, paradoxalement, accompagne les relations "passionnelles". C'est assez réaliste, en cela la série/le bouquin portent bien leur nom, et ça explique sans doute l'engouement unanime qu'ils semblent susciter.
Mais c'est comme dans la vie, au bout de la troisième rupture-réconciliation, ça devient un peu redondant, voire carrément alarmant. Plus on avance dans les épisodes, plus les ficelles s'épaississent : la communication entre les personnages devient monosyllabique, les justifications aux tourments qu'ils s'infligent sont de plus en plus ténues, puis confinent à l'absurdité. Et ils ont même plus besoin de se toucher pour soupirer et gémir de plaisir à plein volume.
Au bout d'un moment ça tend à la complaisance : ils s'obstinent à dire l'inverse de ce qu'ils pensent, s'évertuent à "rester amis" afin d'empiéter juste ce qu'il faut sur la vie de l'autre, et accueillent à gros sanglots les conséquences pourtant prévisibles de ces décisions complètement claquées.
Alors au bout de 5-6 épisodes, c'est devenu assez évident que sous ses airs d'ode mélancolique à l'amour impossible et ses plans épurés façon cinéma indé, Normal People c'est juste une autre fan-fiction masochiste sur des gens intelligents/riches qui s'ennuient.