Il était une fois un livre de Fables...
EDIT : cette critique a été rédigée en fin de première saison. Malheureusement, la qualité a baissé depuis, tant en terme d'intrigue, de réalisation, que de jeu d'acteur. Pas encore assez mauvaise pour faire partie de mon cimetière de séries loupées, ça reste quand même décevant... /EDIT
Lorsque vous avez épuisé votre A-list des séries en cours, que vous tombez en crise de manque en attendant votre prochaine dose que les producteurs ont décidé de repousser d'une semaine, d'un mois, voire pire, que vos séries fétiches commencent à fatiguer, s'offre à vous le faux-dilemme : est-ce que j'attends le prochain épisode, ou est ce que je commence une nouvelle série ?
Et là, un vrai problème se pose, trouver des critères qui vous permettrons de discerner le grain de l'ivraie. Et comme il n'y en a pas vraiment, vous piocherez certainement au hasard.
Si comme moi vous avez un faible pour le fantastique, et que vous êtes un peu fatigué des séries policières de tous poils (toutes à peu près interchangeables et globalement de bonne facture, mais bon, ça va 5 minutes, vous pouvez vous vautrer par exemple (et surtout par erreur) dans l'expérience calamiteuse qu'est le visionnage du début de Vampires Diary, avant d'aller vous laver les yeux avec du savon, et ensuite tenter d'effacer ça de votre mémoire en vous lobotomisant vous-même avec un marteau et un tournevis rouillé (en même temps, pas vraiment besoin, normalement Vampire's Diary l'a fait pour vous).
Vous pouvez aussi tomber sur le très moyen mais sympathique Secret Circle, qui aligne tout autant de clichés que Vampire's Diary, mais qui s'avère un tantinet plus digeste, appelle un minimum de sympathie, malgré quelques personnages à tuer et une trame prévisible.
Vous pouvez aussi tomber sur le sympathique Grimm, qui commence à tirer son épingle du jeu, avec humour un peu acide, et un minimum de propos, de suspense, de tension, des personnages attachants, bref, on commence à se faire plaisir.
Et si vous avez de la chance, vous tombez sur Once Upon A Time qui, sous ses airs de resucée de Grimm sauce Disney et d'adaptation édulcorée de la série de comics Fables (indispensable pour tout amateur de ... non, en fait indispensable tout court!!), offre quelque chose de plus consistant, et réussit à faire mouche dans la catégorie casse-gueule des relectures de contes version "adulte", genre qui semble en vogue en ce moment, avec les deux Blanche Neige sortant cette année, le relativement récent Chaperon Rouge, sans oublier Alice de Tim Burton.
Le postulat de la série est assez audacieux mine de rien : Dans un monde abritant tous les personnages de contes, avec leur coté rose bonbon mais aussi leur noirceur, le coté des histoires que Disney a tendance à laisser de coté par commodité, centrant la trame sur l'histoire de Blanche Neige, la méchante reine trouve un moyen de se venger de l'humiliation que lui a causé cette dernière. Un sortilège sombre, même sur son échelle, fait basculer les personnages de contes dans notre réalité, dans une petite ville appelée Storybrooke, et détruit le concept de happy end. Figés à jamais dans l'espace et dans le temps, dans cette petite poche de réalité qu'est Storybrooke, ils subissent la dictature de la Reine, devenue Maire de la ville, Regina. Tous ne sont plus que l'ombre d'eux mêmes, et ont oublié leur monde d'origine. Tous, sauf un certain Mr Gold, ou Rumplestiltskin dans l'autre monde, sorcier sombre et calculateur ayant son propre agenda, les autres personnages n'ayant que de vagues réminiscences ponctuelles, pour s'oublier à nouveau dans un quotidien sans âme. Personne ne peut quitter Storybrooke, et personne ne peut y entrer. C'est en tout cas ce qu'affirme Henry, le petit garçon qui frappe à la porte d'Emma, une jeune femme débrouillarde au passé agité, mère biologique de Henry, désormais fils adoptif de Regina, evil queen/maire de Storybrooke. Emma débarque dans la petite ville du Maine pour restituer Henry à sa mère adoptive, et s'installera finalement dans la petite dictature de la sombre Regina, pour s'assurer que son fils n'est pas victime de mauvais traitements, comme pourrait le laisser supposer sa théorie au sujet de sa mère adoptive. Mais sa simple présence change déjà les choses, et l'horloge de l'église, bloquée depuis longtemps, se remet à tourner. Simple délire d'un gosse qui cherche à s'échapper de la réalité, ou y-a-t-il vraiment un sortilège à l'oeuvre qui sévit à Storybrooke ? Quelle que soit la réponse, la confrontation entre Emma et Regina trouble l'équilibre apathique de la petite ville, et à chaque épisode, on découvre un nouvel aspect de la ville, un nouveau personnage, une nouvelle preuve étayant la théorie de Henry.
L'intelligente structure de la série, offrant un conte par épisode, sans pour autant négliger la trame centrale et jouant sur les résonances entre le conte et le réel sclérosé de la ville, est addictive au possible, et nous entraine rapidement dans une série qui a plus à offrir que ce qu'il semblerait à première vue. Les relectures des contes sont généralement habiles et non dénuées d'une certaine profondeur, le personnage d'Emma, si son scepticisme peut agacer au bout d'un moment, est riche et attachant, et permet de supporter une Blanche Neige parfois fade et un gosse qui mériterait sa fessée déculottée de temps en temps.
La façon dont s'imbriquent les contes entre eux est particulièrement bien gérée, et la cohérence des deux univers s'impose rapidement.
Une mention spéciale à Mr Gold, interprété par un Robert Carlyle en grande forme, assumant son double manteau avec élégance et frénésie mesurée.
La série étant encore en cours (épisode 17), et à un point de basculement, je ne peux pas juger globalement, mais il est certain que tant les amateurs de contes fantastiques que ceux de séries surnaturelles y trouveront leur compte, les quelques éclaboussures de bon sentiment ne venant que rarement dégouliner sur le plaisir et l'excitation que soulève cette histoire.
Que les amateurs de Fables, la série comics sus-mentionnée, mettent leurs attentes sur le stand-by, car Once upon a Time ne se hisse pas vers de tels sommets, mais offre une alternative télévisuelle de plus qu'acceptable, et dans la mesure où, si le jeu de déterritorialisation des contes est une activité particulièrement prisée ces temps-ci, c'est la seule à attaquer sous cet angle, il serait idiot de s'en priver.
Que ça passe ou que ça casse, goûtez-y, tentez quelques épisodes, et jugez par vous même. Moi, j'aime.
MAJ fin de seconde saison : ...Après une première saison enthousiasmante, la seconde se vautre au ralenti. Blanche-Neige devient agaçante (peut-être l'était-elle déjà auparavant, mais l'ensemble masquait les fissures de son personnage, et de sa médiocrité en tant qu'actrice, semble-t-il), le gamin reste égal à lui-même, le prince charmant ne charme toujours pas, Emma semble absente, lassée par son rôle...etc
Bref, seul Rumplestiltskin continue d'assurer, la baisse de qualité ayant frappé tout le reste de la série. Triste destin que celui d'un soufflé...