Tout fan de mangas et d’animes s’accordera sur le fait que les adaptations live-action, c’est une affaire délicate (qu’elles soient réalisées par des occidentaux ou des japonais, d’ailleurs). Nombreux ont encore le traumatisme de Dragon Ball Evolution, ou plus récemment, Death Note, Attack on Titans et Cowboy Bebop. J’étais moi-même dubitatif lorsqu’une série live-action One Piece a été annoncée ; d’une part, il s’agit de mon manga favori (et aussi l’une de mes œuvres favorites), d’autre part, One Piece est une série très unique, lorgnant parfois dans l’absurde et le cartoonesque, aussi l’adapter en prises de vue réelle relève du véritable challenge. Et même si les annonces du casting, puis les trailers, avait de quoi rassurer, j’étais resté sceptique jusqu’au bout.
Je suis content de m’être trompé.
Dès la première scène j’ai réalisé l’amour, le respect et la compréhension envers l’œuvre originale des personnes impliquées dans cette série. Dès le premier épisode j’ai compris que le cheminement serait similaire, mais non la manière d’y parvenir. C’est qu’adapter East Blue en 8 épisodes d’une heure, saga d’une centaine de chapitres dans la manga, est loin d’être aisé. Pourtant ils ont aussi bien réussi que les contraintes le leur permettaient.
Je vais souligner l’évident : le casting est excellent. Inaki Godoy est littéralement Luffy, il a son énergie, son optimisme, son humour, sans oublier d’être sérieux et ambitieux lorsque la situation l’exige. Les autres membres de l’équipage ne sont pas en reste ; et malgré leur temps d’apparition réduit, leur caractère et « quirks », tels le cynisme de Zoro, la sournoiserie de Nami la lâcheté d’Usopp et le côté charmeur de Sanji sont très bien retranscrits. Ceci dit, certains personnages secondaires m’ont impressionné, d’aucuns étant des transpositions exactes du manga. Je pense notamment à Garp (dont le rôle a été grandement accru dans la série), ainsi que Baggy, Kuro, Mihawk et Zeff, pour ne citer qu’eux, volant temporairement la vedette aux personnages principaux.
La qualité de la production est également très soignée, et témoigne elle aussi du respect envers l’œuvre puisque ni le chara design parfois « over the top » des personnages n’a été minimisée, ni les décors aux couleurs parfois très criardes. Des réalisateurs cyniques auraient rendu tout ceci plus « sombre et réaliste », ici c’est littéralement un anime en live-action pour notre plus grand plaisir. Par restrictions temporelles et budgétaires, la série enchaîne cependant beaucoup d’espaces fermés, de réutilisation de décors et parfois des huis-clos (ce qui fonctionne parfois comme à Syrup village). Je déplore un peu cela car l’âme de One Piece réside dans les grands espaces, dans ces îles fascinantes pleines d’histoires, et j’espère que les saisons suivantes se déroulant à Grand Line n’effaceront pas cet aspect.
Certains passages et personnages ont été réduits voire passés à la trappe du fait des contraintes, et néanmoins l’essence de l’œuvre est préservée. Le thème sur le désir les rêves de poursuivre est même renforcé par la présence de Garp en figure d’autorité face à Luffy. Et bien que les flash-backs entrecoupés dans les épisodes diluent quelque peu leur impact (là où le manga les montre d’une traite), leur force émotionnelle résonne encore. Il y a une grande alchimie entre les « Mugiwara » visible à l’écran, qui n’a pas manqué de m’arracher des sourires.
Malgré certains choix discutables, et l’absence de scènes importantes (ou amenées plus maladroitement), je n’ai pas boudé mon plaisir devant cette adaptation. Je me suis surpris à apprécier sa musique grandiloquente, sonnant comme un appel à l’aventure, et à apprécier les clins d’œil dont fourmillent la série sans jamais tomber dans le fan-service excessif.
One Piece est une œuvre massive. Les sagas suivantes seront d’autant plus difficiles à adapter, et je doute que cette série pourra même tout adapter. Mais si elle peut servir de porte d’entrée aux néophytes rebutés par la longueur du manga, et rendre honneur aux fans de longue heure, tout le monde en ressort gagnant. Un petit miracle, en somme !