Saison 1 :
Aborder "Orange Is the New Black" avec 5 ans de retard nous protège évidemment du buzz qui avait accompagné, pour le meilleur et pour le pire, l'une des premières séries Netflix. Mais ne nous protège pas de nos attentes vis à vis d'une nouvelle création de Jenji Kohan dont on avait adoré - du moins le temps des premières saisons - la virulente et hilarante "Weeds". Sans même parler de l'ombre l'écrasante de "Oz" qui va planer pour longtemps sur toute tentative de chronique de la vie carcérale ! Par rapport à ces deux références inévitables, "Orange..." est indiscutablement une série "héritière" (même si une réplique amusante tente dès le début de se dédouaner de "Oz")... mais aussi une légère déception. Elle semble souvent manquer de méchanceté et de folie provocatrice comparée à "Weeds", même si elle célèbre tout autant l'audace féminine à se placer au delà des règles de la société, voire même de ses lois. D'un autre côté, la quasi absence de violence physique dans les relations entre détenues - même si elle n'est pas illogique et est sans doute à l'honneur d'un scénario qui tente (difficilement) de se démarquer de "Oz" - peut parfois frustrer le téléspectateur.
On retrouve néanmoins le talent de Jenji Kohan pour croquer des personnages hauts en couleurs, presque cartoonesques (Chapman bien sûr, mais aussi Crazy Eyes ou Pennsatucky...) et pourtant terriblement touchants, capables du pire comme du meilleur. Et qui rendent la balade en rollercoaster formidablement addictive. Sans véritable surprise certes, "Orange..." nous offre des situations régulièrement immorales sublimées par un humour léger qui fait passer les exagérations et invraisemblances comme une lettre à la poste.
Pourtant, ce qui fait de "Orange Is the New Black" une pierre blanche dans l'histoire de la série moderne, c'est son traitement décomplexé de d'homosexualité féminine, qui est très intelligemment dédramatisée, représentée comme "non-centrale" au récit, mais faisant partie de la palette de possibilités de jouir de la vie et de d'amour. Le formidable appétit qui se dégage de la relation tumultueuse entre Chapman (joliment incarnée par une Taylor Shilling qui échoue néanmoins à égaler le charisme et l'abattage de Mary-Louise Parker dans "Weeds") et Vause est indiscutablement l'un des points forts de cette première saison.
[Critique écrite en 2018]