Parfum
6.1
Parfum

Série Netflix (2018)

Un parfum allemand plus que convaincant

Décidément les investissements de Netflix en Allemagne semblent porter leurs fruits. Après l'excellente série "Dark" qui faisait office de "Stranger Things" version allemande, "Parfum" est une série policière noire qui semble ainsi faire figure de nouveau "True Detective".
La série est une adaptation très libre du célèbre roman de Süskind et c'est tant mieux de mon point de vue car, bien évidemment il s'agit là d'un débat sans fin, mais à mon sens je ne vois pas l'intérêt qu'il peut y avoir à reproduire le plus consciencieusement possible une oeuvre originale pour l'adapter à l'écran. En outre, dans le cas présent, cela a d'ores et déjà était fait par le réalisateur allemand Tom Tykwer et le résultat était très loin d'avoir fait l'unanimité chez les téléspectateurs tant on gardait nécessairement à l'esprit le souvenir inaltérable du chef d'oeuvre littéraire originel. Par conséquent si le débat concernant la légitimité ou l'illégitimité d'une adaptation télévisuelle n'a pas nécessairement d'intérêt en règle général, il s'avère semble-t-il tout à fait hors de propos ici tant les créateurs de la série s'emploient à faire référence de façon extrêmement explicite à l'oeuvre originale (au livre très directement mais aussi au film) comme pour nous montrer qu'ils cherchent avant tout à ne retenir au final que l'idée même du tueur et des motivations qui sont les siennes.
Pour en revenir à la série elle-même donc, celle-ci s'avère ainsi plus que convaincante et témoigne d'une réalisation extrêmement soignée qui prouve que lorsque l'on donne l'opportunité à des metteurs en scène inconnus (mais néanmoins prometteurs) de s'exprimer et que l'on met à leur disposition les moyens financiers qui vont de paire avec celle-ci, ces derniers s'avèrent capables de produire de grandes choses comme c'est ici le cas. A l'instar de"True Detective", la mise en scène parvient immédiatement à nous plonger dans l'ambiance glauque et macabre de certains romans policiers noirs dont comme on le sait (par le biais de ce genre très spécifique que constitue le Giallo) la couverture s'avérait être jaune. Or, il apparaît justement essentiel de s'arrêter quelque peu sur le travail sur la photographie qui a su être effectué ici et le choix du jaune comme couleur primaire car en effet, du jaune on en a et on en voit absolument partout (jusqu'au mobilier lui-même ou encore aux liquides) tout au long de la série et ce à tel point que la couleur semble vraiment constamment imprégner le grain de l'image. C'est quelque chose qui, dés le début, frappe nécessairement l'œil du spectateur car les personnages eux-mêmes ont l'air jaunes ! Leurs peaux et leurs cheveux possèdent un teint jaunâtre qui leur confère un aspect, au mieux inquiétant, mais au pire carrément repoussant, car le jaune a toujours possédé une connotation extrêmement péjorative dans son utilisation et s'avère être (si mes souvenirs sont bons sur ce point) la couleur la moins appréciée au monde et notamment la moins utilisée quand il s'agit de faire de la communication. Ainsi, une utilisation aussi abusive du jaune s'avérait donc aussi risquée que pertinente ici et de mon point de vue cela fonctionne en définitif très bien. En réalité celle-ci confère certes un côté très organique à l'image cependant le côté vivant auquel elle renvoie n'a absolument rien d'attirant ou de jouissif, bien au contraire ! Le vivant qui est ainsi convoqué apparaît en effet plus malade qu'autre chose, un vivant infecté au sein duquel le mal semble d'ores et déjà avoir pris racines.
La nature elle-même est jaune et apparaît malade (voire morte) et c'est pourquoi la végétation n'est pas verte mais jaunâtre à l'écran. Comme si le mal s'était d'ores et déjà insinué absolument partout et qu'il avait tout contaminé jusqu'aux personnages eux-mêmes. Des personnages plus qu'inquiétants comme on a pu le dire, qui s'avèrent être à l'image de leur sexualité qui apparaît comme un point essentiel au bon déroulement de l'intrigue dans la série. En effet, celle-ci ne s'avère à aucun moment jouissive ou attirante pour le spectateur car même si les corps des personnages sont beaux, leur teint jaunâtre semble à tout moment nous avertir que quelque chose ne va pas et que l'assouvissement du désir apparaît plus dérangeant ou malsain qu'autre chose.
La nature, les personnages et la sexualité, tout cela ne semble donc former qu'un même tout altéré et même infecté par ce parti-pris esthétique consistant à recouvrir constamment l'image d'un filtre jaunâtre qui rend bien évidemment l'ensemble très beau visuellement mais qui, dans le même temps, inspire de manière souterraine une certaine forme de dégoût voire de répugnance chez le spectateur...
En ce sens, "Parfum" fait ainsi penser à cette autre série qu'est "Hannibal" et qui avait pour sa part opté (toujours si mes souvenirs sont bons) pour un filtre bleu très clair qui donnait un teint grisâtre à l'image et parvenait ainsi efficacement à instaurer la même tension entre les personnages. Force est de constater cependant que l'on est ici très loin de la performance inoubliable de Mads Mikkelsen en tueur psychopathe même si dans l'ensemble il faut reconnaître que les acteurs s'avèrent assez convaincants et parviennent ainsi plutôt bien à incarner des personnages qui ont vraisemblablement tous un truc qui cloche. On retrouve aussi avec plaisir l'acteur allemand August Diehl et son sourire mesquin que l'on avait oublié depuis "Inglorious Basterds" de Quentin Tarentino.

VHS1
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Créée

le 8 févr. 2019

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