Ceux qui sont nés dans les années 80 n'apprendront rien puisque la télé des années 90 s'est régalée avec la bande à Vorilhon. TF1 et Dechavanne (le fameux Ciel mon mardi !) se sont vautrés dans la Raëlsploitation plus d'une fois.
L'escroc libidineux dégage un parfum comique, la faute peut-être à cette voix de comédien de la Comédie-Française, à ses faux airs de Billy Crystal et à sa mythologie inspirée de la SF des 70'.
Le destin de Claude Vorilhon a quelque chose à voir avec celui de Bernard Tapie. Deux titis gouailleurs qui ont d'abord pensé se la couler douce, en tant que parasites de la chanson française. Tout deux s'essayant à la chanson réaliste - entendez par là l'imitation paresseuse de Jacques Brel. Claude et Bernard seraient donc des Pierre Bachelet qui n’ont pas réussi... Ce n'est pas ce qu'il y a de plus facile me direz vous, mais c'est à ça qu'on mesure l'ambition et la confiance en eux de ces deux monstres médiatiques.
Tapie a fait son chemin dans le business et l'entreprise, Vorilhon a tâté du journalisme dans le sport auto avant de comprendre le besoin de son époque : la spiritualité, le bien-être et l’envie de culte. Il y a des gens qui ont besoin de croire et d'aduler. La demande existe, il va se proposer en offre. Pas même beau, pas même mystérieux, la figure christique/prophète demeure indémodable. Tapie et Vorilhon l'ont compris, et le meilleur moyen pour que les gens vous donnent leur argent est de leur proposer le salut. Le foot et la politique pour nanar, les aliens et la vie éternelle pour celui qui se fait appeler Raël.
Son histoire de révélation, et de rencontre avec les Elohims - fameux être extraterrestre, est totalement abracadabrante et s’inspire même ouvertement d’un bouquin de SF. Il débute sa PME en une secte Baba post 68, mais il voit vite plus grand. Il connaît une forte expansion grâce à la télé comme Bernard Tapie tiens. Il comprend vite que la publicité traditionnelle coûte cher et que la télévision est gratuite, et touche infiniment plus de gens qu’une simple campagne de tract ou d'affichage.
Bien sûr, la plupart des gens vont rigoler de lui et de ses cheveux en poil de zizi, de ses postulats délirants, mais il reste une petite partie de gens perdus dans leur vie, séduits par le merveilleux de cette proposition et sans doute aussi par la perspective de baiser en plein air avec des nanas branchées expérience, cosmos et vie éternelle.
Le pire étant que beaucoup de disciples lui sont encore fidèles des décennies plus tard. À part les dérives sexuelles (c'est un gros baiseur), le Wild wild country français est un peu décevant. Alors que la vague #mi too est passée, et que 25% des artistes français en ressortent avec au pire des procès pour viols, au mieux des réputations ruinées par le bouche à oreille, on ne tombe pas sur des témoignages directs relatant des abus sexuels.
Un comble que Raël s’en sorte mieux que PPDA ou Cauet. C’est le gros problème du documentaire, pas de témoignage accablant sur les abus (tant sexuels que financiers) qui n’ont pas manqué de se produire durant des décennies. Les quelques membres qui témoignent sont soit encore embrigadés, soit ils s’en sont éloignés, comme on s’éloigne d’un groupe de rock qu’on a aimé X années avant et dont le virage artistique ne nous convient pas. Le docu pourrait avoir été financé par Raël que ça ne me surprendrait pas plus que ça.
La partie la plus distrayante du documentaire est évidemment celle du clonage avec la fameuse Brigitte Boisselier, une "scientifique" avec un look d'actrice porno des 70' et un sourire de piranhas. Raël et elle ont fait croire à toute la planète, et ce pendant des années, qu'ils étaient parvenus à cloner une petite fille. Ils en rient encore.
Le con de l'histoire est bien cet avocat américain, tout content de lui et qui s'est persuadé qu'il allait faire tomber cette laborantine incompétente... Quand elle a sorti la carte Israël de sa toge, il a vu trouble. Il a passé des heures sur un dossier pour un chiard qui n'existe même pas et se prend encore pour un super-héros quand une caméra passe par là. Plus con qu’un membre de base de la secte commis à la cueillette des olives.
Comme les plus grandes stars françaises (Alain Delon, Mireille Mathieu, Arsène Wenger, Rémi Gaillard...) Raël est très respecté au Japon, il y a même trouvé refuge, après s’être fait dégager à coup de pied au cul du Canada. Pourquoi le Japon ? Peut-être en raison de cet aspect proche d’un personnage de jojo’s bizarre adventure. Ou bien, en raison de leur laxisme dans la lutte contre les mouvements sectaires.
"Raël : le prophète des extraterrestres" est distrayant, trop conciliant, et absolument pas rigoureux, et ne tranche pas la question que tout le monde se pose : doit-il son nom à cette chanson des Who ?