"Nous sommes autant des machines qu'eux" : l'ambiguïté Hubot.
Les androïdes font partie de notre monde. Ils ont toutes les fonctions : ils peuvent faire le ménage, accomplir des tâches difficiles, aider les enfants à faire leurs devoirs ou être de dociles objets sexuels.
Dès les premières minutes, on pense inévitablement à Blade Runner, d'autant plus que parmi les personnages principaux, il y a des policiers d'une section spéciale chargée des crimes commis par les machines.
La série va aborder différents problèmes posés par ces machines baptisées Hubots. En jouant constamment sur l'ambiguïté (qui sera un maître-mot de cette critique).
Ambiguïté des machines pour commencer.Ainsi, certaines sont parfaitement agréables et sympathiques et se comportent comme de parfaits petits robots. Elles accomplissent leurs tâches et subissent sans broncher les volontés de leurs propriétaires. Mais ce n'est pas toujours le cas. Ainsi, le premier épisode commence par l'attaque de robots contre un vieux couple isolé dans la forêt. On apprend alors l'existence de Hubots rebelles cherchant à mener une sorte de révolution.
De même, je trouve Vera particulièrement inquiétante. Véra est un Hubot gériatrique : elle est utilisée pour aider un vieil homme qui n'a plus toute sa tête. mais très vite elle sème une ambiance angoissante : elle espionne constamment son propriétaire, lui désobéit et semble prête à aller loin pour faire ce qu'elle croit être son devoir.
La série joue donc sur les deux aspects des Hubots, à la fois agréables et angoissants. Deux sentiments : de l'empathie ou de la peur.
Mais là où la série devient vraiment géniale, c'est qu'en parlant des machines, elles traitent également des humains, de nous. Ainsi, ces robots devraient faciliter la vie des humains en accomplissant ce qu'ils ne veulent plus faire. Les employer pour s'occuper de ses vieux parents, c'est donc admettre que ceux-ci sont devenus une charge qu'on juge inutile. ça en dit long sur la solidarité générationnelle. Et que dire quand ces Hubots sont engagés pour s'occuper des enfants ? Ou quand une femme avoue qu'elle préfère parler à son robot, qui l'écoute, plutôt qu'à son mari ? Les machines permettent ainsi de faire le constat d'une société qui s'enfonce dans un individualisme forcené.
A travers le rapport entre humains et Hubots, la série joue beaucoup sur différents thèmes : racisme, exploitation d'une partie de la population, société de consommation et son attachement à des biens de consommation, déshumanisation des rapports sociaux et indifférence envers les humains (même s'ils sont de notre famille)...
L'ambiguïté se retrouve donc dans la vision qu'ont les humains envers ces machines : de simples mécaniques dépourvues de sentiments ou des presque humains ? Une prêtresse (elle-même très ambiguë) propose une Bible à des Hubots en fuite. Anita (Hubot) se souvient avec tendresse de l'enfant dont elle s'occupait. Une avocate, Inger, propose un statut juridique pour les Hubots et impose, dans son foyer, de traiter son Hubot comme un membre de la famille.
D'un autre côté, un parti extrémiste cherche à éradiquer la présence de ces Hubots (ce même parti qui donne son nom à la série : Vrais Humains). Les Hubots sont victimes d'actes racistes : on les traite de Pacman, il existe du café certifié "100% humains" (donc aucun Hubot n'a été utilisé pour sa production), et des attentats se préparent.
Un scénario donc très complexe et qui va au fond du sujet, présentant le problème sous tous ses aspects (sentimental, politique, juridique...). Mais ne pensez pas que cette série soit uniquement une réflexion intellectuelle. Le rythme est rapide, il y a du suspense et du drame (parfois même un peu d'humour), les rebondissements sont nombreux et on vibre bien souvent. Il faut dire que la série présente plusieurs actions qui se croisent. Jamais on ne se perd parmi les nombreux personnages : tout se fait avec fluidité et clarté.
La réalisation est très sobre mais permet de tirer parti de la qualité de l'interprétation. Le jeu sur les lumière et les couleurs est très bien foutu. Les personnages sont attachants, même ceux qui ne sont pas sympathiques a priori. Une formidable série !
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