Usul et Lumi ont passé une année à décortiquer et documenter la bascule de plus en plus rapide des médias français dans le fascisme.
CNews et ses outrances ridicules, Hanouna qui invite trois fois plus l'extrême droite que le reste des partis et humilie avec des manières de tyran ses chroniqueurs complaisants, l'Arcom qui cautionne, les médias classiques qui répètent à l'envie les éléments de langage de Macron diabolisant la gauche et normalisant les discours racistes, etc.
Certains épisodes ont été particulièrement éclairants et ont créé le débat dans certains milieux web, comme celui sur Tibo inshape, où les deux animateurs ont montré comment, sous couvert de capitalisme, le fan de muscu favorise les discours nationalistes et les valeurs virilistes. Idiotie ou volonté de sa part ? Débat insoluble mais l'émission montre comment ce genre de succès, fondé sur le plagiat de trends américaines, d'humour gras et de fierté mal placée, n'aurait pas pu être possible dans un pays non bollorisé.
Au fil des épisodes, c'est tous les pans de la société qui sont scrutés à travers le prisme de la droitisation des esprits dans et par les médias. Comment on parle de l'école, de l'hôpital, des immigrés, des guerres et des crises sanitaires. Puisqu'aucune émission de TV mainstream ni aucune radio n'aborde ces sujets ainsi, avec un logiciel de lecture de gauche, Rhinoceros est d'utilité publique. Ce qui est d'ailleurs le socle de la légitimité de la liberté de la presse : l'intérêt général.
Lorsqu'on ajoute à ces qualités politiques et documentaires le ton souvent grinçant et drôle, les musiques originales et les archives mobilisées pour montrer l'histoire des médias, on peut conclure légitimement que l'émission Rhinoceros, si elle n'a pas la prétention d'être aussi illustre artistiquement que son modèle dramatique, ne lui fait pas honte. Au contraire, elle actualise le propos de Ionesco sur les mécanismes de bascule d'un peuple vers le fascisme par instinct grégaire.