Sabagebu! par Ninesisters
Officiellement, Sabagebu! est l’adaptation d’un shôjo manga publié dans le magazine Nakayoshi (qui fût aussi celui de Sailor Moon et de Sakura la Chasseuse de Cartes). Si je précise « officiellement », c’est que cette production semble clairement plus orientée vers les otaku que vers le public cible des shôjo, à savoir les jeunes filles. Et pour cause, le narrateur nous explique d’entrée que si cet anime porte le même nom qu’une série du Nakayoshi, la ressemblance risque fort d’être discrète. Comme ça, c’est dit. De la même façon, l’héroïne vient nous prévenir que, malgré son titre, elle n’aura qu’un lien lointain avec le survival game et l’airsoft. Le ton est donné.
Avant d’aller plus loin, évacuons un problème fondamental : la comparaison entre Sabagebu! et Stella Women’s Academy High School Division Class C³. Pour faire court : le premier est une version débile et post-moderne du second. Soyons honnête, le propos même de ces deux animes n’est pas sérieux une seconde ; sauf qu’après une entame plutôt délirante, Stella Women’s Academy High School Division Class C³ commence à sérieusement se prendre au sérieux. Là où les individus derrière l’adaptation de Sabagebu ! savent que c’est n’importe quoi, et écrivent le scénario de chaque épisode après avoir pris une ligne de crack. Tout-de-suite, ce n’est plus du tout la même chose.
Le mot a été lâché : « post-moderne ». En l’occurrence, la série a conscience d’être une série et d’adapter de travers le manga d’origine, et permet à ses personnages – narrateur compris – de s’adresser directement au spectateur dans la plus pure tradition de Deadpool. Cela permet aussi de transformer chaque joute à l’airsoft en bataille rangée digne d’un film d’action, en justifiant la démesure et la mort des protagonistes par l’imagination débridée de ces-derniers : il peut se passer n’importe quoi, rien de tout cela n’est réelle. D’où notamment une relecture nerveuse d’une des scènes les plus emblématiques de Matrix.
Et c’est là qu’il faut parler des personnages… Elles sont tarées. Toutes. Complètement. Avec pour commencer Miô, la présidente du club qui se ballade toujours avec ses armes, et ne se rend absolument pas compte à quel point elle peut être décalée et dangereuse. Ensuite, nous avons Maya, qui travaille comme mannequin, et qui est celle qui ne sert à rien dans le club sinon à attiser la jalousie de ses collègues planche-à-pain. Kayo, l’otaku cosplayeuse, dont personne ne sait vraiment pourquoi elle a rejoint le club. Urara, la loli masochiste hyper-positive. Et enfin Momoka, en apparence la parfaite héroïne de shôjo, mais en réalité une fille vénale, violente, limite vicieuse, et surtout rancunière. Pas une pour rattraper l’autre. Au passage, n’oublions pas Kamo, la mascotte du club, un ornithorynque capable d’imiter Michael Jackson.
Pour résumer cet anime en un mot, je dirai : « con ». Mais vraiment, hein ! C’est profondément, fondamentalement, intrinsèquement con comme pas permis ! C’est inimaginable à quel point Sabagebu! peut être con. Les délires sont outranciers, les running-gags lourds au possible, et il y a même de l’humour avec des excréments.
Est-ce gênant ? Un peu, quand même… Autant la série peut faire rire à condition de bien espacer les épisodes, avec même quelques passages hilarants, autant nous tombons souvent dans le consternant. Surtout, la série semble ne fonctionner que sur l’instant, et ne laisser aucune impression sur le long-terme. Comme si notre cerveau tirait la chasse après coup, ce qui parait étrangement approprié.
Sabagebu! fonctionne et divertit à condition de se laisser emporter par son n’importe-quoi. C’est mieux que rien, et il ne faut rien attendre de plus.