Six épisodes puissants, d’une grande cohérence, plastique et dramaturgique, entièrement réalisés par Jean-Xavier de Lestrade, à qui l’on devait aussi sur France 2 récemment l’excellente série Laetitia, qui arpentait également un fait divers sordide.
Ce qui m’impressionne en premier lieu c’est l’angle choisi pour aborder cette affaire. Par personnages, un peu comme dans le Esterno notte, de Bellocchio. Et surtout par dates, puisque l’affaire se déroule sur trente ans. Trente-quatre si l’on part du premier viol jusqu’au procès.
Les quatre premiers épisodes sont inouïs, une superbe variation sur l’impossibilité d’établir la vérité, quelque-soit le terrain arpenté : une victime, une juge, une maire, une scientifique. Que des femmes, tiens. Je crois pas que ce soit un hasard. Comme si au même titre que les nombreuses victimes du violeur de la Sambre, les femmes n’étaient pas écoutées, considérées.
Quatre épisodes où chaque fois il faut repartir de zéro. Où l’on comprend que l’enquête a été abandonné. Il faut attendre l’arrivée du commandant de police pour que ça bouge, qu’il soit celui qui débloque l’affaire en 2012 avant de participer à son arrestation six ans plus tard. La juge, la maire, la scientifique auront un épisode puis disparaîtront des radars. Je trouve ça hyper radical et réaliste.
Autre élément qui m’a semblé percutant aussi : la série fait mine de suivre un policier, jeune recrue au début, vieux briscard à la fin. Il est en quelque sorte notre boussole puisqu’il apparaît dans chaque épisode. Or c’est un personnage assez antipathique, sur lequel on fonde des espoirs avant de comprendre qu’il devient le même flic que les autres, davantage préoccupé par sa machine à café que par les dépôts de plaintes. La scène de l’Adn je l’aurais baffé ce fdp.
Mais ce n’est pas tout, l’autre personnage qui revient dans chaque épisode c’est la première victime. Victime qui n’en est pas une puisqu’elle refuse de l’être, qui lui faudra trente ans pour sortir de son déni. On imagine donc sans mal à l’aune de cette trajectoire qu’il pourrait y avoir bien plus que 57 accusations au procès si l’on prend en compte celles qui préfèrent se taire. Bref j’arrête là, je vous conseille de voir ça illico. C’est dur mais indispensable.