Seirei no Moribito est une belle petite perle dont la découverte, tardive pour l'humble griffonneur de ces quelques lignes, aura été une chouette surprise.
De prime abord, sortant du délirant, survitaminé et outrancier Kill La Kill, l'ambiance réaliste de cette œuvre m'a quelque peu refroidie. Nonobstant, pour un animé de 2007, Seirei no Moribito tire fort bien son épingle du jeu. Nul hasard ici puisque on est sur un animé issu des studios I.G Production.
Les paysages sont somptueux, jouant sur une palette de couleurs qui n'est pas sans nous rappeler des productions Ghibliesques, on voyage dans un monde fantastique puisant ses inspirations aussi bien dans la Chine impériale pour la cour de l'Empire de Yogo que dans le Népal, le Japon médiéval voir l'Inde ou la Mongolie (pour le royaume de Kanbal). Point fort de cet animé, la cohérence et la beauté de ce monde et de ses décors n'étonnent pas, lorsqu'on sait que le réalisateur Kenji Kamiyama travailla précédemment pour les décors de Kiki la Petite Sorcière, d'Akira. Le bonhomme a par ailleurs une activité prolifique, il faut toujours que je regarde Eden of the East et il a bossé aussi sur quelques épisodes de Ghost in the Shell - Stand Alone complex, du même studio par ailleurs, ce me semble.
Sans être centré sur l'action - qui passe vraiment au plan secondaire, l'animé faisant la part belle à ses personnages principaux, leurs interactions et évolutions - les combats sont fort plaisants, voir virevolter la lance de Balsa, retenir notre souffle lorsqu'elle cabriole ou lorsque l'on découvre les prouesses de son "mentor", Jiguro. Du reste l'animation de nos principaux personnages jusque dans leurs gestes anodins est de grande qualité. On regrettera par contre l'emploi d'une 3d mal à propos pour ajouter de la densité aux scènes urbaines (les modèles 3d dans les plans de foules sont dégueulasse) ou bien quelques objets qui s'intègrent fort mal à l'ensemble. J'ai l'impression que c'est quelque chose de propre à ces années là, ces palliatifs un peu hideux. Rien qui n'enlève à la qualité de l'ensemble.
Car avant toute chose, Seirei no Moribito tire toute sa force non pas de son scénario - quoique sympathique inversion de la princesse en détresse - mais bien de ses personnages. Je le disais, l'action est en retrait, d'où une certaine impression de lenteur qui pourra en agacer certains mais ne devrait pas, lecteur de mon cœur, te rebuter. Car cet animé est avant toute chose une franche réussite, montrant que l'on peut tirer d'une "Light Novel" assez simple et destinée aux enfants une production à cent lieues des clichés habituels de la japanimation et propre à attirer aussi les adultes.
L'histoire, disais-je donc, est fort simple : un prince est possédée par un "démon de l'eau" et afin de ne point couvrir d'opprobre la famille impériale son père décide de le zigouiller discrètement. Balsa, qui revenait dans le coin après deux ans d'absence, tombe incidemment sur le gamin, le sauve et va donc se retrouver par la seconde impératrice et mère de l'enfant pour le protéger. Portant sur elle le fardeau des huit vies qu'elle a prise, Balsa s'est faite garde du corps et pour expier les huit meurtres a jurer de protéger huit personnes. Chagum, le jeune prince, est la huitième personne qu'elle doit sauver.
Et je ne vous en dis pas plus, car bien évidemment l'histoire comporte son lot de révélation ; pas de manichéisme ici, les antagonistes ne sont pas mauvais, tous essayent de se débattre avec leur destin, d'obeir ou de faire ce qui leur semble le mieux. Les excès de larmes versée par les serviteurs de l'empereur sur le sort des jeunes princes m'ont semblés exagéré, mais en dehors de cela il est agréable de sortir des clichés du genre et de voir qu'antagonistes et protagonistes ne sont pas traités par dessus la jambe.
Toutefois tout se centre autour de la relation qui va se développer entre Chagum et Balsa. Celle-ci, âgée de trente ans, bénéficie d'un Chara-design au poil. Loin des poncifs attendus de la japanimation, la jeune trentenaire est une guerrière accomplie, sûre d'elle, dure à la tâche et sévère avec la pointe de sensibilité qui va bien ... c'est un vrai personnage, en fait, pas un cliché ambulant ou un faire-valoir, ni une mary sue. Probablement l'une des meilleures héroïne d'animé que j'ai pu voir et capable de se remettre en question ... bref, vous comprendrez que j'ai aimé, ce genre de personnage bien construit est rare, son design réaliste renforce l'attachement et l'impression d'être en face d'une guerrière de trente ans.
Chagum est lui aussi un personnage attachant, exit le poncif de l'empereur hautain ou du gamin geignard, il grandit au fil des vingt-six épisodes, connaît ses moments de doutes, ses bêtises et bravades d'enfant mais fait néanmoins preuve de sagesse et d'abnégation.
Gravite autour d'eux Tanda, un guérisseur élève de la chaman Torogaï. Ce sera là, avec peut-être le jeune Touya les personnages qui, de par leurs interactions avec notre tandem Chagum/Balsa. Mais leur personnalité est moins fouillée, à l'exception peut-être de Tanda qui de par ses interactions et sa relation avec Chagum et Balsa sort aussi des poncifs attendus.
En bref, un animé qui vaut le détour. L'histoire est simple mais loin d'être simpliste, les personnages ont une âme, loin des clichés et le tout invite au voyage avec nos héros, voyage initiatique, voyage intérieur et rite de passage.