Sherlock, scandal in London
Sherlock... Ou l'histoire du détective le plus célèbre de tous. Tout le monde le connait, ou en a entendu parler. Ne niez pas, j'en suis certaine.
Pourquoi faire une critique, alors qu'il en existe par pelletées de 10 ? Car je crois que quelque chose a changé en moi depuis que j'ai vu cette série. Surtout dans ma perception des autres séries, mais aussi dans le domaine de la littérature comparée.
Présentons d'abord l'auteur qui a fait naître Sherlock Holmes : Sir Arthur Conan Doyle. La première fois que j'ai croisé ce nom, c'était au collège. Une fiche infâme de lecture, sur le Chien des Baskerville. Puis un contrôle de lecture sur le dit bouquin. Tout ce qui me dégoute de la lecture. Pour parler franchement, je m'étais décidée à ne plus jamais toucher à un bouquin de Doyle. C'était viscéral, le traumatisme était là.
Puis un beau jour de déprime, j'ai découvert Sherlock. Pas celui qui m'avait traumatisée, mais celui qui faisait littéralement vibrer une personne que j'apprécie énormément. Elle m'en a parlé, m'a fait partager sa passion pour cette série. Nous étions alors en 2014, deux saisons existaient déjà, la troisième était en cours de diffusion sur la BBC. Je me suis demandé "Mais pourquoi est-elle aussi enjouée ?", alors j'ai téléchargé. En VOSTFR, car elle ne cessait de me raconter la richesse des dialogues et la beauté des voix.
Quand j'ai regardé le premier épisode, je ne connaissais strictement rien de l’œuvre d'origine. Mais ça, vous vous en doutiez. A Study in Pink. Un premier personnage débarque, John Watson, traumatisé de la guerre, une jambe foutue en l'air par un traumatisme psychologique. J'avais déjà vu sa tronche quelque part, mais où ? Mais passons. "Il ne m'arrive jamais rien", qu'il disait. Puis le générique commence, une musique entêtante qui me sert de sonnerie désormais. Et c'est là que j'ai compris que cela allait être épique.
Une réalisation soigneuse, sans fausse note. Des acteurs au top, et qui vivent à 200% leur personnage. Et c'est ça qui est bon. Des films à part entière, agréables à regarder, il ne manque plus que la loupe pour qu'on puisse enquêter nous aussi. Le sujet aurait pu mener à des détails horriblement dégueulasses, mais même là, la mort est douce. Et ce n'est pas un reproche, loin de là. Le sang aurait tout gâché. Tout se joue sur des tensions psychologiques, des déductions que nous sommes incapables de faire. En fait si. Il est possible de déduire de nous même, et c'est ça qui est génial. Pourquoi ? Car Sherlock est un parfait crétin. Pas le crétin au QI de moule, mais le genre de crétin que j'adore. Il ne sait pas que la Terre tourne autour du Soleil, mais il est capable de reconnaître 200 cendres de cigarette différentes. Ajoutons à cela un léger autisme, et nous avons le portrait de cet étrange détective Sociopathe.
Parlons en, de ce Sociopathe. Benedict Cumberbatch se doit d'être comparé aux autres Sherlock de ces derniers temps : que ce soit RDJ ou celui de Elementary (excusez moi, le nom m'échappe, ça reviendra.), ils ont tous fait de l'excellent travail. Un travail qui parfois se retrouve à l'opposé du Sherlock original : où est le gentleman anglais ? Chez Cumberbatch on a du mal à le retrouver : manipulateur, il n'hésitera pas à manipuler des femmes pour arriver à ses fins. Non pas des attentions sexuelles, techniquement il ne ressent pas grand chose de ce côté là, mais bien pour résoudre des enquêtes, s'infiltrer... Un mufle comme on en voit rarement. Mais que voulez vous, cela lui va à merveille.
Parlons en, du Sexe. Celui avec un grand S, oui celui là. Mis à part le fait que toute la série pue la tension sexuelle à 15 bornes et que j'ai failli perdre un ovaire en fin de saison 3, la série n'a pas sombré dans la "facilité" que j'ai déjà pu voir ailleurs. Et c'est tant mieux ! Un Sherlock asexué, un John qui enchaîne les conquêtes au fil des épisodes mais qui fait tout pour ne pas impliquer son coéquipier. Là encore deux antithèses parfaites. Tout est là, en fait. Quand l'un manque dans un domaine, l'autre le compense, et ce systématiquement.
Ils se complètent et s'aident, forment un duo improbable. Et c'est ça qui fait tourner l'affaire. Un John qui boite ? Que nenni ! Un Sherlock névrosé solitaire ? On oublie ! Ils se soignent, c'est un fait. Une pure Bromance comme on en voit rarement, bien foutue et ficelée.
Un autre point, qui me semble important : la Timeline. Elle est parfaitement respectée, et ça, c'est un exploit quand on sait le nombre d'aventures sponsorisées Holmes. Des allusions un peu partout, qui arrivent à nous situer dans le temps : The Greek Interpreter se transforme en un The Geek Interpreter, me faisant bien marrer au passage. On se situe, et surtout on sait. On sait ce qui va arriver, qui va venir, qui va mourir, qui va sombrer dans la démence, qui va disparaître pour revenir plus tard. Eh oui, cette série m'a guérie de ma phobie des bouquins de base. Je les dévore, je les comprends enfin, j'arrive à les apprécier. Et surtout, oh grand plaisir, tout s'éclaire dans la série. Des allusions, des noms, d'adorables parodies. Tout se complète, là encore l'un aide l'autre, et inversement. Analysez, comprenez, chaque saison comporte des indices majeurs pour la saison suivante : la saison 4 et ses antagonistes sont déjà annoncés depuis bien longtemps !
Gatiss, mon héros, et aussi mon ennemi. Deux ans entre deux foutues saisons ! A ce qui paraît à cause d'un emploi du temps surchargé pour les héros. Pourquoi je le déteste ? Car chaque saison nous laisse sur une fin désastreuse. Pas dans le sens qu'elle est nulle, loin de là. Chaque fin est incroyable, et nous laisse sur un suspense improbable. Mais bien sûr, je ne spoilerai pas. Vous pouvez le faire vous même en lisant les romans et les nouvelles.
Reparlons de la réalisation, voulez vous ? La série est bourrée de détails à analyser. Volontaires ? Involontaires ? Le second me semble bien improbable. Des oiseaux qui chantent à un enterrement, qui se retrouvent sur une invitation, un cachet de cire et sur une tapisserie de mariage. La même espèce, le même agencement ? Ce n'est pas un hasard. Un gros plan sur un Cupidon chevauchant une Autruche ? Dégagez votre innocence. Une plante au nom improbable ? Recherchez ses effets, ce qu'elle provoque sur le corps, et regardez l'épisode avec un œil nouveau. Tout est dans le détail, et tous les détails sont impossibles à trouver en une seule lecture. Bien sûr, l'amateur ne fera pas cet effort. Le passionné, lui, décortiquera chaque plan, chaque scène, chaque réplique. Parfois c'est ce que je fais, et je me retrouve à comprendre tout différemment.
Rajoutez à tout un humour bien anglais, et vous obtiendrez une série magnifique qui mérite d'être vue, que ce soit en fan de Sherlock Holmes ou en parfait ignare.
Il est temps de finir : je pense tout revoir encore, je sens que quelque chose m'échappe. Mais quoi ? Je n'en sais rien. Ce sentiment est permanent, à partir du moment qu'on découvre un détail passé à la trappe une première fois. Cherchez, cette série nous transforme inconsciemment en un petit enquêteur du dimanche.
"Tout ça c'est bien, mais pourquoi pas 10, huuum ?"
Même si la perfection est pratiquement atteinte ici, à mon goût, je ne peux pas mettre un 10. Pourquoi ? Comme dit plus haut, l'attente. Chaque épisode est un mini film, certes... Mais deux ans, c'est long. Mais long. Trop long. C'est de la faute de Gatiss et compagnie, surtout Benedict en fait, il ne fallait pas faire un si bon Sherlock Holmes.
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